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Discussion - conclusion

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Au terme de cette étude, on constate que les substrats potentiellement méthanisables présentent des propriétés chimiques, biologiques et physiques très différentes. L’analyse la plus usitée, et celle qui intéresse en général le plus les porteurs de projet est le potentiel

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méthanogène. Cette analyse ajoutée à la MS/MO moyenne du substrat permet d’estimer la production de méthane liée à la dégradation d’un substrat dans le digesteur. Cette donnée représente un enjeu non négligeable car elle permet de s’assurer d’un juste dimensionnement de la filière de valorisation du biogaz et peut être utilisée comme base à des indicateurs économiques dans la définition d’une redevance ou d’un prix pour le substrat considéré.

Des données de MS/MO sont souvent déjà disponibles et permettent de déterminer des valeurs moyennes relativement fiables. Concernant les potentiels méthanogènes, cinq principales sources d’incertitudes impactent l’estimation de la production de méthane liée au substrat considéré et sont présentées Table 14.

Sources d’incertitudes Ordres de grandeur de l’impact sur la mesure

Incertitude liée au protocole expérimental (choix de l’inoculum, protocole expérimental,

durée de suivi, mode de préparation et échantillonnage du susbtrat, …) et à son décalage avec la configuration continue

industrielle

Sur les mesures effectuées dans 21 laboratoires différents, on observe un coefficient de variation (CV) compris entre 7 et 27% selon les substrats considérés (Raposo et al., 2011). A titre indicatif, l’erreur absolue maximale sur la mesure du BMP représente

environ 20% de la valeur déterminée en considérant le protocole appliqué au

Cemagref.

Incertitude liée aux erreurs de mesure sur la production de biogaz et sa composition Incertitude liée à l’échantillonnage du produit sur site qui peut être compliqué (graisses avec

phasage dans la bâche de réception, tas de substrats solides avec de fortes hétérogénéités

macroscopiques, …)

Très variable et dépend de la rigueur apportée à l’échantillonnage sur site

Incertitude de mesure liée à la variabilité dans le temps des propriétés du substrat

Dépend du nombre d’échantillons analysés (pour 3 échantillons, en moyenne 52%

d’incertitude (intervalle de confiance de 90%), pour 10 échantillons l’incertitude est de l’ordre de 10% de la mesure). Les CV sur

les BMP observés sur les substrats dont la variabilité temporelle a été observée sont compris entre 13 et 15% selon les substrats.

Dans le cas de l’utilisation de données génériques, l’incertitude liée à la variabilité inter-sites des propriétés des substrats liées à

leur mode de production (système d’élevage différent, technologie de récupération ou de

production différente, …)

Dépend des substrats considérés, les CV observés sur les données génériques sont de

l’ordre de 24 à 34% sur les trois substrats étudiés ici.

Table 14 : Sources d’incertitude sur l’acquisition des données de potentiel méthanogène.

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Il existe un débat sur l’utilité de réaliser des tests de potentiels méthanogènes plutôt que d’utiliser des données génériques. Dans le cas d’un substrat « original » pour lequel il n’existe pas, ou peu, de données de référence, il apparaît nécessaire d’effectuer une campagne de mesure de potentiel méthanogène. Quand des données existent, comme sur les graisses de flottation, les lisiers ou les boues biologiques de station de traitement des eaux usées, la question de l’utilité d’une mesure de potentiel méthanogène se pose. Quand une analyse de potentiel méthanogène est réalisée, elle concerne en général un seul échantillon par substrat.

Or, cette étude a montré que, pour que le test de potentiel méthanogène représente un gain de précision en comparaison de données génériques, trois points de mesures dans le temps sont nécessaires. D’autre part, si on désire une estimation du potentiel méthanogène moyen avec une incertitude ne dépassant pas 10% (avec un intervalle de confiance à 90%), entre 8 et 11 points de mesure dans le temps sont nécessaires.

Une telle répétition des tests est coûteuse, mais elle est le seul moyen de garantir une précision de mesure supérieure à celle procurée par des données génériques. Néanmoins, le coût représenté par la répétition temporelle des analyses peut être réduit de deux manières :

constitution d’un échantillon moyen analysé ensuite en termes de potentiel méthanogène.

remplacement des triplicats opérés sur les potentiels méthanogènes (3 répétitions sur 1 échantillon) par 3 tests en parallèle sur 3 échantillons sans répétition (1 répétition par échantillon sur 3 échantillons). En général, la variabilité observée sur les triplicats (CV entre 1 et 8% de la valeur moyenne, sur le protocole appliqué au Cemagref) est inférieure à celles dues aux variations temporelles des propriétés du substrat (CV de l’ordre de 15%).

Deux questionnements scientifiques peuvent être considérés comme des limites à l’utilisation du potentiel méthanogène pour l’estimation de la production de méthane sur un réacteur continu :

1°) On considère en général que 80% du potentiel méthanogène sera produit dans le réacteur mais en réalité, cette proportion peut varier selon la configuration du digesteur (temps de séjour hydraulique, charge, …) et le substrat considéré (on peut imaginer un rendement supérieur pour un substrat se dégradant très rapidement ou un rendement inférieur pour un substrat se dégradant très lentement). De plus, il est difficile d’utiliser les données de ces tests dans un objectif de dimensionnement et d’optimisation (prédiction de l’impact des conditions opérationnelles sur le rendement de dégradation d’un substrat dans

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le digesteur continu) car les informations cinétiques qui y sont produites sont peu précises et sont impactées significativement par des facteurs expérimentaux difficiles à estimer comme l’effet limitant lié à la concentration en biomasse ou à son adaptation en début de dégradation.

2°) Les potentiels méthanogènes déterminés en conditions de monodigestion sont utilisés pour estimer le taux de dégradation d’un substrat en codigestion. On dispose aujourd’hui de peu de recul sur l’impact des mélanges sur les vitesses et les taux de dégradation des substrats. D’autre part, si l’expérience a montré que les potentiels méthanogènes pouvaient être utilisés pour estimer une production de méthane moyenne dans le digesteur, il est aujourd’hui difficile d’appréhender la transposabilité des phénomènes d’interactions observés en batch (synergies/antagonismes) à des phénomènes impactant le rendement des digesteurs continus.

Pour aller plus loin, il convient d’investiguer ces différents points, c’est ce à quoi va notamment s’attacher la suite de ce manuscrit.

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