Nous d´etaillons le point de d´epart du travail de Dupire, qui suppose a priori le monde sans arbitrage.
4.6.1 Les entr´ ees du probl` emes
Dans cette premi`ere ´etape, nous supposons qu’`a un jour donn´e, dat´e 0, on connait sur le march´e les prix d’un tr`es grand nombre d’options europ´eennes, en fait des options de tout strike et de toute maturit´e sur un sous-jacent donn´e. Les donn´ees en entr´ee sont donc un continuum de Calls d´esign´es par C(T,K).
Nous reviendrons plus tard sur ce probl`eme de continuum.
On n’a `a priori que cette information sur le processus sous-jacent (St), qui est suppos´e verser un taux de dividende qconstant et ´evoluer dans un univers o`u les taux sont constants.
Comme nous l’avons vu, l’AOA implique que les prix de march´e soient coh´erents au sens o`u la famille {C(T, K); (T, K)∈R+×R+}v´erifie
– L’applicationK→C(T, K) est convexe, continue et d´ecroissante – C(T, K)>(e−qTS0−K)+
– Plus g´en´eralement
C(T+θ, K)≥EQ[e−rT(e−qθST −Ke−rθ)+] =e−qθC(T, Ke−(r−q)θ)
Ces prix de calls nous donnent des informations sur la distribution de pricing des v.a. St,t fix´e. En particulier, la d´eriv´ee seconde au sens des distributions est associ´ee `a la distribution implicite risque-neutre,ert ∂∂K2C2(t, K).
Toutefois, en g´en´eral, la connaissance des distributions pourtfixe, vues d’aujourd’hui ne suffit pas `a caract´eriser compl´etement et unisquement les probabilit´es de transition, c’est `a dire la distribution deST
vue de n’importe quelle date et de n’importe quelle valeur observ´ee entre 0 et Tmax. Cette connaissance est fondamentale pour l’´evaluation des options `a d´epart forward.
Nous nous proposons de montrer qu’en absence d’arbitrage, il existe une diffusion markovienne, de rendementret de volatilit´e une fonctionσ(t, x), pour lesquelles les distributions des v.a.St, pour toutt fixe, sont donn´ees par les noyaux de pricing que nous avons identifi´es.
4.6.2 Une ´ etude directe
Nous supposons qu’une telle diffusion existe, c’est `a dire qu’il existe un univers al´eatoire (Ω,Ft,Q), et une fonction de volatili´eσ(t, S) tels que
dSt=St[(r−q)dt+σ(t, St)dWt] (4.6.1) o`u (Wt) est unQmouvement brownien. Les prix des Calls sont donc donn´es `a l’instant initial (t0, St0 =x0) par
C(T, K) =EQ[e−rT(ST −K)+] (4.6.2) L’hypoth`ese que ces fonctions sont de classeC2 entraine que pour toutT > t0,(sous la probabilit´e risque-neutre), la loi de ST sachant queSt0 = x admet une densit´e q(T, K) (les variables (t0, St0 = x0) sont omises s’il n’y a pas d’ambiguit´e) donn´ee par
q(T, K) =erT∂2C(T, K)
∂K2 (4.6.3)
Une autre mani`ere de les calculer est de les consi´erer comme la solution en (t0, St0 =x0) des solutions de l’EDP backward :
∂C
∂t +1
2σ2(t, x)x2∂2C
∂x2 + (r−q)x∂C
∂x(t, x)−rC= 0 (4.6.4)
avec comme condition terminale C(T, S) = (S−K)+.
4.6.3 Calcul de la fonction de volatilit´ e : l’EDP forward
Puisque les donn´ees sont les prix de Calls, nous allons essayer d’exprimer directement la volatilit´e en fonction de ces prix.
L’argument essentiel est une EDP forward satisfaite par ces prix, dont les param`etres de variation sont les strikes et les maturit´es des options. Elle est la version sur les Calls de l’EDP forward satisfaite par la densit´e de la distribution de la solution de l’´equation diff´erentielle stochastique.
Plus pr´ecis´ement, nous avons :
Th´eor`eme 4.6.1 Les calls v´erifient l’EDP forward
∂C
∂T =1
2σ2(T, K)K2∂2C
∂K2 −(r−q)K∂C
∂K(T, K)−qC(T, K) (4.6.5)
Pour une famille admissible de prix de calls, il existe donc une seule fonction de volatilit´e compatible avec cette famille, au sens o`u les prix de Call calcul´es avec la fonction de volatilit´e σ(t, S) dans l’EDP Backward sont exactement ceux donn´es en entr´ee.
Preuve:
⇒ Pour avoir l’intuition de cette ´equation, appliquons la formule d’Itˆo `a la semimartingalee−rt(St−K)+. Il vient en introduisant le temps local ΛKt
e−r(T+(ST+−K)+ − e−rT(ST −K)+= Z T+
T
re−ru(Su−K)+du +
Z T+ T
e−ru1{Su≥K}dSu+1 2
Z T+ T
e−rudΛKu (4.6.6) Utilisons l’´equation de la dynamique deSpour prendre l’esp´erance des deux membres de cette ´egalit´e.
Nous avons un terme de la forme
E(e−ru1{Su≥K}Su) =C(u, K) +Ke−ruP(Su≥K) =C(u, K)−K∂C
∂K(u, K)
⇒ Le terme de la formeE(RT+
T e−rudΛKu) s’obtient grˆace `a la formule sur les temps locaux (4.5.6) E[
Z T+ T
e−rudΛKu] =
Z T+ T
e−ruduE[ΛKu] = Z T+
T
e−rudu σ2(u, K)K2q(u, K)
=
Z T+ T
σ2(u, K)K2∂2C
∂K2(u, K)du
⇒ Il vient donc que
C(T+, K) =C(T, K)−RT+
T rC(u, K)du+ (r−q)RT+
T (C(u, K)−K∂C∂K(u, K))du +12RT+
T σ2(u, K)K2∂∂K2C2(u, K)du (4.6.7) Il reste `a passer `a la limite apr`es avoir divis´e parpour avoir l’EDP.
Remarque 4.6.1 Si nous souhaitons donner un point de vue EDP de ce r´esultat, il suffit de noter que la fonction
q(T,(K) =erT∂2C
∂K2(u, K) v´erifie l’equation forward duale
q0T(T, K) = 1 2
∂2(σ2(T, K)K2q(T, K)
∂K2 −∂((r−q)Kq(T, K))
∂K (T, K) (4.6.8)
Si nous int´egrons deux fois cette ´equation, nous trouvons que
∂erTC(T, K)
∂T =1
2σ2(T, K)K2erT∂2C(T, K)
∂K2 − Z +∞
K
(r−q)KerT∂2C
∂K2(u, K)∂K(T, K)du (4.6.9) Par une int´egration par parties analogue `a celle faite dans le calcul probabiliste, on obtient la bonne EDP.
Remarquons que l’EDP forward permet de calculer de mani`ere simple les prix et les caract´eristiques de toute une famille de Calls.
4.6.4 Diffusion implicite
Etant donn´e un continum d’options satisfaisant les hypoth`eses pr´ec´edentes, et des conditions initiales (t0, St0), il existe une diffusion markovienne, dont la fonction de volatilit´e est donn´ee par
∂C
∂T + (r−q)K∂C
∂K(T, K) +qC(T, K) =1
2(σDupire)2(T, K)K2∂2C
∂K2 (4.6.10)
La fonction de volatilit´e est appell´ee lavolatilit´e locale .
Remarque 4.6.2 L’existence d’une diffusion repose sur la r´egularit´e de la fonction σ(T, K). Si cette fonction est Lipschitzienne, la th´eorie classique des equations diff´erentielles stochastiques montre l’exis-tence dans n’importe quel espace probabilis´e ´equipp´e d’une filatratieon brownienne.
Si la fonction est seulement continue, il existe une solution faible, r´ealisable sur un espace de probabilit´e construit avec la solution. On parle de solution faible.
Volatilit´ e locale et robustesse
Supposons que les prix d’options soient obtenus `a partir d’un processus de prix dont la volatilit´e, al´eatoire, γt n’est pas connue. On suppose que seuls les sprix d’options aujourd’hui sont connus. Quel lien peut-on ´etablir entre la “vraie volatilit´e “ et la vol locale `a la Dupire.
Proposition 4.6.1 Supposons que l’actif sous-jacent soit mod´elis´e par une processus d’Itˆo de rendement r et de une volatilit´eγt, soitdSt=St(rdt+γtdWt. La volatilit´e locale `a la Dupire est
EQ γ2t |(St, St0)
= (σDup)2(t, St)
si la famille des d´eriv´ees secondes des prix d’option est suffisamment discriminante.
Preuve:
⇒ Les id´ees sont les mˆemes que dans l’´etude de la robustesse de Black et Scholes. On utilise le fait que dans le mod`ele `a la Dupire, les prix d’options en (t0, St0) sont les solutions de l’EDP backward dont le g´en´erateur LDup est associ´e `a la fonction de volatilit´e σDup. D´esignons par uDup la solution de condition terminale (x−K)+ `a la maturit´eT dont la valeur aujourd’hui est connueC(T, K).
⇒ Appliquons la formule d’Itˆo `a la fonctionuDupT,Ket au sous-jacentSde volatilit´eγt. Il vient en exploitant l’EDP forward
e−rT(ST −K)+ = e−rt0C(T, K) + Z T
t0
e−rsuDupx (t, St)(dSt−rStdt)
+ 1
2 Z T
t0
e−rs γt2−(σDup)2(t, St)
St2uDupxx (t, St)dt
⇒ Il nous reste `a prendre l’esp´erance :
– Par d´efinition,EQ(e−rT(ST −K)+) =uDupT,K(t0, St0 =C(T, K).
– D’autre part, par hypoth`esedSt−rStdtest uneQ-martingale, ce qui assure que l’int´egrale stochas-tique est d’esp´erance nulle, si les d´eriv´ees sont born´ees.
– Dans la derni`ere int´egrale, on peut remplacerγt2par son esp´erance conditionnelle par rapport `a la tribu engendr´ee par la seule variableSt,puisqueuDupxx (t, St) est une fonction de (t, St). Nous notons cette fonction
γ2(t, St) =EQ γt2|(St, St0) Nous avons donc
Z T t0
e−rs gamma2t(t, St)−(σDup)2(t, St)
St2uDupxx (t, St)dt= 0
⇒ Supposons que les fonctions (uDupT,K)xx(t, x) soit suffisamment riche lorsqueKvarie pour qu’une fonction orthogonale `a toutes ces fontions soit nulle ; on en d´eduit que
EQ γt2|(St, St0)
=γ2(t, St) = (σDup)2(t, St)
Nous pouvons utiliser ces id´ees pour retrouver la volatilit´e implicite `a partir de la volatilit´e locale, mais seulement comme point fixe.
Proposition 4.6.2 SoitΣ2(T, K)la volatilit´e implicite BlacketScholesd’une option de maturit´e T et de strikeK. D´esignons parΓBS(T,K)(t, x)le gamma Black et Scholes de cette option `a n’importe quelle date
Σ2(T, K) Z
R+
e−rtΓBS(T,K)(t, x)∂KKC(t, x)dt dx
= Z T
t0
Z
R+
e−rt(σDup)2(t, x)ΓBS(T,K)(t, x))∂KKC(t, x)dt dx
Le carr´e de la volatilit´e implicite Black et Scholes est une moyenne en temps et espace du carr´e de la volatilit´e locale prise `a des niveaux et des temps diff´erents.
Preuve:
⇒ C’est la robustesse de la formule de Black et Scholes, puisque les prix de Call dans les deux mod`eles sont les mˆemes.
⇒ Il faut noter que la fonction ΓBS(T,K)(t, x) d´epend de la volatilit´e implicite que l’on cherche `a calculer.
⇒ Pour calculer effectivement, on peut utiliser une m´ethode d’it´erative.
4.6.5 Le vrai probl` eme de calibration
Le probl`eme dans la r´ealit´e est qu’on ne connait que quelques prix de Calls pour diff´erents strikes et differentes maturit´es{C(Ti, Ki,j)}. On n’a donc pas l’information n´ecessaire pour calculer de mani`ere unique la fonction de volatilit´es. Le proc´’ed´e de lissage de prix de Calls a manifestement une grande influence sur la forme de la fonction de volatilit´e que l’on peut retrouver.
Une proc´edure classique consiste `a utiliser les volatilit´es implicites de la formule de Black Scholes, et de les lisser de mani`ere au moins parabolique pour g´en´erer l’information manquante. Apr`es un calcul tr`es fastidieux, on arrive `a des formules du genre, si Σ(K, T) d´esigne la volatilit´e de BS implicite pour une option de strikeK et de maturit´eT
σ(T, K) = Σ(T, K)
s 1 + 2TΣ(∂Σ∂T +rK∂K∂Σ) 1 + 2Kd1√
T∂K∂Σ +K2d1d2T(∂K∂Σ)2+K2ΣT∂K∂2Σ2
(4.6.11) o`u les fonctionsd1 etd2 sont celles qui apparaissent naturellement dans Black etScholes .
En fait ce probl`eme d´elicat rel`eve de la th´eorie desprobl`emes inverses mal pos´es classiques en EDP. Sur la bonne mani`ere de s’y prendre pour r´esoudre ce probl`eme, voir le cours second niveau de Rama.
L’´ EVALUATION ET LA
COUVERTURE DES OPTIONS sur MULTI SOUS-JACENTS
5.1 Introduction
Dans le chapitre pr´ec´edent, nous nous sommes int´eress´es `a la couverture des options ´ecrites sur un sous-jacent `a l’aide de strat´egies autofinan¸ccantes. Nous nous int´eressons maintenant au cas o`u plusieurs sous-jacents sont n´egoci´es. Beaucoup d’id´ees sont les mˆemes, mais nous allons d´emontrer un certain nombre de faits nouveaux :
⇒ si le nombre de titres est plus grand que le nombre de sources de bruits, les rendements de ces titres ne sont pas quelconques : l’exc`es de rendement par rapport au cash d´epend essentiellement de la volatilit´e du titre et des primes de risque, dont nous montrerons l’existence par un argument d’alg`ebre lin´eaire.
⇒ Le num´eraire utilis´e pour exprimer le prix des actifs,(en g´en´eral la monnaie du pays), joue un rˆole relatif, car les propri´et´es essentielles sont invariantes par changement de num´eraire : autofinance-ment, absence d’arbitrage...Nous ´etudierons les cons´equences en termes de primes de risque et de taux d’int´erˆet
⇒ Nous d´eveloppons une analyse syst´ematique de l’´evaluation par probabilit´e risque-neutre et ses transformations par changement de num´eraire