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2.3.1 Mesures de spectroscopie optique d’émission

Nous avons utilisé la spectroscopie optique d’émission comme méthode de diagnostique non intrusive. Cette méthode permet de sonder directement les niveaux d’énergies électroniques, tant qu’il y a émission radiative.

Équipement utilisé

Afin d’obtenir des spectres à plusieurs temps au cours de la période de la tension appliquée, nous avons eu recours à un spectromètre à réseau couplé à une caméra matricielle intensifiée. Plus précisément, la distribution lumineuse en fonction de la longueur d’onde est obtenue grâce au réseau de diffraction tandis que la résolution temporelle est obtenue grâce à la synchronisation entre l’obturateur de la caméra et un signal pulsé de porte. La position temporelle de cette porte par rapport au signal de tension de la décharge a aussi été variée de manière à obtenir un spectre à chaque instant au cours de l’amorçage, de l’entretien et de l’extinction de la décharge. Dans ce mémoire, 2 systèmes ont été utilisés. Je référerai au système de spectroscopie optique utilisé à Toulouse comme étant le spectromètre 1 et à celui utilisé à l’Université de Montréal comme étant le spectromètre 2.

Le spectromètre 1

Le spectromètre français est constitué d’un monochromateur Acton de Princeton

Instruments couplé à une caméra PI-Max 3 intensified charged-coupled device camera aussi

de Princeton Instruments. Les mesures ont été prises à l’aide d’une fibre optique placée perpendiculairement à la direction du flux de gaz à environ 1 cm de l’entrée du gaz. Pour une fente d’entrée de 5 μm et un réseau à 300 g/mm, le système offre une résolution spectrale (largeur à mi-hauteur) de 0.7 nm à λ=750 nm. La fenêtre temporelle (largeur de la porte) entre chaque spectre est de 100 ns et la longueur de visée (longueur d’absorption) est de 3.9 cm. La synchronisation entre la caméra et la porte ainsi que les mesures du voltage et du courant sont faites avec l’équipement mentionné à la fin de la section 2.1.

Le spectromètre 2

Ici, les composantes du système spectroscopique viennent aussi de Princeton

Instruments. Nous utilisons un spectromètre Isoplane et une caméra PI-Max 4. La fibre

optique est placée aussi à 1 cm de l’entrée du gaz et la fenêtre temporelle est aussi de 100 ns. Pour une fente d’entrée de 2 μm et un réseau à 300 g/mm, le système québécois offre quant à lui une résolution spectrale de 0.50 nm à λ=763 nm. La longueur de visée est de 1.25 cm puisque les électrodes sont plus petites que celles dans la décharge française. Encore une fois, la synchronisation entre la caméra et la porte ainsi que les mesures du voltage et du courant sont faites avec l’équipement mentionné à la fin de la section 2.1.

La figure 19 présente un exemple de spectre d’émission dans le cas d’une DBD dans Ar/NH3 (montage et équipement de France).

675 700 725 750 775 800 825 850 875 0 20000 40000 60000 80000 100000

Intensité (unit.

arb.)

Longueur d'onde (nm)

Fig 19. Spectre d’argon de 675 à 875 nm.

Bien que la mesure de spectroscopie d’émission soit relativement simple, l’interprétation des spectres peut parfois être très complexe. À la prochaine section, nous discuterons des bases physiques nécessaires à l’analyse des spectres du plasma d’argon.

2.3.2 Bases physiques

Lors de la modélisation des plasmas, il est possible de soit considérer la décharge comme étant à l’équilibre thermodynamique complet, à l’équilibre thermodynamique local ou encore hors équilibre thermodynamique. On considère une décharge à l’équilibre complet ou local lorsqu’il y a un nombre suffisant d’interactions entre les composantes du système (ions, électrons, neutres, photons) de sorte qu’il y ait microréversibilité de ces interactions (10). Dans ce type de plasmas généralement fortement ionisés, on peut décrire les densités des différentes espèces excitées du plasma à l’aide de la loi de Boltzmann (11).

𝑛𝑛 𝑛0 = ( 𝑔𝑛 𝑔0) 𝑒 [−(𝜖𝑛−𝜖0 𝑘𝐵𝑇)] (11)

Dans l’équation (11), on considère le rapport entre la densité d’un niveau excité nn et

la densité de neutres n0 selon leurs dégénérescences respective (gn, g0), leurs énergies

respectives (𝜖𝑛, 𝜖0), ainsi que la constante de Boltzmann kB et la température T. À l’équilibre,

on considère qu’une seule température permet de décrire le système.

Par contre, lorsque le plasma devient faiblement ionisé, les processus collisionnels deviennent souvent insuffisants pour assurer la microréversibilité, notamment celle de l’excitation et de la désexcitation collisionnelle (10). On parle alors de plasmas hors équilibre thermodynamique, ce qui est le cas des DBDs. Dans ces systèmes, on a typiquement une température des électrons beaucoup plus grande que celles des ions et des neutres. Les populations des divers niveaux excités doivent alors être obtenues à partir d’équations de bilan, point sur lequel nous reviendrons dans la section 2.4.

De manière générale, l’intensité d’une raie d’émission peut être représentée selon la densité du niveau émetteur ni, le coefficient d’Einstein pour l’émission spontanée Aij, la

fonction de réponse associée à l’équipement expérimental f(λ) et le facteur d’échappement θij

[46] (12).

𝐼(𝜆) = 𝑓(𝜆)𝐴𝑖𝑗𝑛𝑖𝜃𝑖𝑗 (12)

Dans un plasma à l’équilibre thermodynamique, la densité du niveau émetteur ni peut être

directement obtenue de la loi de Boltzmann. Par contre, dans une décharge hors équilibre thermodynamique, la loi de Boltzmann ne s’applique plus [3]. Cet aspect est illustré à la figure 20 [47] qui présente un diagramme de Boltzmann d’un plasma micro-onde d’argon à la pression atmosphérique. On remarque que les raies issues des niveaux 4p s’écartent considérablement de la loi de Boltzmann (représenté par le trait). Ainsi, pour les niveaux donnant lieu au spectre d’émission de la DBD illustrée à la figure 19, il faut absolument avoir

recours à des équations de bilan pour chacun des niveaux; on parle alors d’un modèle collisionnel-radiatif (section 2.4).

Fig 20. Exemple d’ajustement de la loi de Boltzmann (trait) avec seulement une température sur l’intensité des raies selon leurs niveaux d’énergie émetteurs dans le cas d’un plasma d’argon à la pression atmosphérique. On voit que pour les niveaux 5p la loi s’applique, mais

ne concorde pas avec la distribution d’intensité des niveaux 4p (2p en notation Paschen). Nous sommes donc hors équilibre thermodynamique. [47]

Dans le cas de l’argon, plusieurs notations des niveaux sont utilisées dans la littérature (Paschen, Racah, couplage spin-orbite, orbitale). Pour la suite de ce travail, nous utiliserons la notation de Paschen (Fig 21b) plutôt que la notation orbitale ou celle du couplage spin-orbite (Fig 21a).

Fig 21. Différentes notations pour les niveaux d’énergies de l’argon. À gauche (a), la notation orbitale et à droite (b), la notation Paschen.

Quant à la réponse spectrale de l’équipement f(λ), elle peut être mesurée à l’aide d’une lampe de référence pour laquelle nous connaissons le spectre fourni par le fabricant. On divise alors le spectre de la lampe de calibration observé par l’équipement par le spectre de la lampe fourni par le fabricant. On obtient alors la réponse spectrale de notre système, un exemple est illustré à la figure 22.

300 400 500 600 700 800 900 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5

Fonction de réponse

(u.r.

)

Longueur d'onde (nm)

Fig 22. Fonction de réponse pour le spectromètre Isoplane avec un réseau 300g/mm mesuré à l’aide d’une lampe halogène et une lampe de deutérium ainsi que du facteur hc/λ.

Par contre, bien que la fonction de réponse f(λ) sert tout d’abord à pallier les variations de la réponse en longueur d’onde de la caméra, du réseau et de la fibre optique sur la plage spectrale observée, elle inclut aussi, si nécessaire, un facteur hc/λ permettant de comparer le spectre mesuré à celui fourni par le fabricant. En effet, le fabricant fournit le spectre de la lampe en Watts par mètres carrés par nanomètres, mais le spectre que l’on prend à l’aide de l’équipement est en comptes par mètres carrés par nanomètres par secondes. On obtient donc la fonction de réponse f(λ) en multipliant l’intensité de lampe mesurée Imesurée par

hc/λ et en le divisant par l’intensité réelle fournie par le fabriquant Iréelle (13, 14) pour ainsi

obtenir une fonction de réponse sans unités.

𝑓(𝜆) =𝐼𝑚𝑒𝑠𝑢𝑟é𝑒∙( ℎ𝑐 𝜆) 𝐼𝑟é𝑒𝑙𝑙𝑒 (13) 𝑓(𝜆) =[ 𝑐𝑜𝑚𝑝𝑡𝑒𝑠 𝑚2∙𝑛𝑚∙𝑠]∙[ (𝐽∙𝑠)∙(𝑚𝑠 ) 𝑚 ] [𝑚2∙𝑛𝑚𝑊 ] (14)

La fonction de réponse f(λ) possède une valeur absolue arbitraire puisqu’elle est utilisée pour comparer des spectres en unités relatives, comme nous le verrons dans la section suivante.

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