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1.2 Description et intérêt du SPS

Chapitre II - Vers l’élaboration de composites vitrocéramiques tellurites

II- 1.2 Description et intérêt du SPS

Le frittage SPS est une technique de frittage en température sous haute pression permettant de fritter de nombreux matériaux tels que les céramiques, les métaux, les verres… Le principal avantage du procédé SPS est de pouvoir atteindre des vitesses de chauffe (jusqu’à 1000°C/min [18]) et des températures très élevées (jusqu’à 2500°C) en un temps très court (quelques minutes) [19]. Les cinétiques de frittage permettent, entre autres, d’obtenir des densifications proches de 100% tout en conservant des grains de taille nanométrique.

La configuration du SPS est présentée en Figure II-2 ; la matrice (graphite, carbure de tungstène, …) contenant la poudre ou le cru est placée entre deux pistons en graphite appliquant une pression uniaxiale. Deux électrodes sont situées de part et d’autre de la matrice, celles-ci sont séparées des pistons par des entretoises en graphite. L’ensemble est placé dans une enceinte dont l’atmosphère (air, argon, azote, vide,…) est contrôlée. Dans notre cas, le piston supérieur du SPS Dr Sinter 825 Syntex Machine (Kawasaki, Japon) est fixe, seul le piston inférieur peut se déplacer verticalement. Du graphite souple (papyex®), du molybdène ou du tantale sous forme de feuille sont généralement utilisés pour tapisser la paroi interne de la matrice et pour séparer l’échantillon des pistons, ces feuilles permettent de retirer plus facilement l’échantillon de la matrice sans l'endommager après frittage.

Figure II - 2 Configuration du frittage SPS [19].

Un courant, sous forme de pulses ultra-rapides de quelques milli-secondes, est injecté à travers la matrice et les pistons : c’est pourquoi les éléments du SPS sont conducteurs (généralement en graphite). La pression uniaxiale couplée au courant permet de densifier la poudre qui est chauffée par effet Joule.

69 Les mécanismes mis en jeu durant le frittage SPS ont fait l’objet de nombreux travaux, plusieurs hypothèses ont été proposées [19]–[23].

L’une des approches les plus connues est schématisée en Figure II-3 ; cette théorie considère qu’aux premiers stades du processus, les pulses de tension créent des arcs électriques ou décharges de plasma entre les grains. Un état local de haute température de plusieurs dizaines de milliers de degrés est alors généré momentanément. La surface des grains fond, permettant la vaporisation des particules adsorbées, puis une jonction se crée entre les particules. La surface des particules est ainsi activée, ce qui augmente la diffusion aux joints de grains [20], [25] dans le cas d'une poudre céramique.

Figure II - 3 : Mécanismes se produisant lors du processus de frittage SPS [26].

Parmi les autres mécanismes proposés, nous pouvons par exemple citer le phénomène d’électromigration basé sur le déplacement d’atomes [27], [28].

II-1.2.2 Contamination au carbone

La densification par SPS peut également être la source de certains inconvénients. Ainsi, une contamination au carbone des échantillons réalisés par SPS est couramment observée [27]– [30] ; il s’agit du principal inconvénient de cette technique de frittage. Bernard-Granger et al. [29] ont ainsi détecté la présence de particules de carbone de 22 µm dans des spinelles transparents MgAl2O4. Les échantillons sont préparés par frittage SPS sous vide à partir de la poudre sous forme de cru. Des échantillons noirs/marrons sont obtenus par SPS (Figure II-4).

Figure II - 4 : Photographie d’un échantillon de spinelle MgAl2O4 préparé par SPS [29].

Morita et al. ont observé une dépendance de la contamination au carbone de spinelles MgAl2O4 avec la vitesse de chauffe du SPS [30]. En effet, une accentuation de la contamination au carbone est observée pour des vitesses de chauffe élevées comme le montrent les photographies de la Figure II-5.

Figure II - 5 : Photographies de spinelles obtenues par frittage SPS à 1300°C pendant 20 minutes, à différentes vitesses de chauffe α = 2 – 100 °C/min. Les échantillons sont placés à 1 cm du texte. Selon Bernard-Granger [29], même pour des expériences réalisées sous vide ou sous argon, il semblerait qu’une faible teneur résiduelle en oxygène persiste et réagisse avec le carbone présent dans la chambre pour former des espèces gazeuses telles que CO et CO2. Ces espèces s’infiltrent dans la porosité ouverte de la poudre au début du frittage et se retrouvent piégées dans les pores une fois que ces derniers se referment. Les espèces gazeuses sont ensuite libérées dans tout le volume de l’échantillon au cours du frittage SPS sous l’effet de la pression appliquée. Ensuite, il se produit une précipitation de particules carbonées aux interfaces gaz-céramique. La réaction mis en jeu durant le processus correspond à l’équilibre inverse de Boudouard :

2CO(g) = CO2(g) + C(s)

Cette réaction est favorisée pour des températures inférieures à 700°C. Il est possible dans certains cas d’éliminer cette pollution au carbone par un traitement thermique ex-situ à 600°C. Cette méthode n’est malheureusement pas transposable aux verres tellurites dont les températures de cristallisation et de fusion sont plus faibles.

Wang et al. ont récemment réussi à éliminer la pollution au carbone de céramiques CaF2 en utilisant une feuille de molybdène comme barrière physique de diffusion [31]. La feuille de graphite communément utilisée, est remplacée par une feuille de molybdène placée entre la poudre CaF2 et la matrice graphite. Les photographies de la Figure II-6 montrent l’aspect de deux céramiques CaF2 élaborées l'une en utilisant une feuille de graphite (a), et l'autre en utilisant une feuille de molybdène (b).

Figure II - 6 : Photographies des céramiques CaF2 (épaisseur de 1 mm) élaborées par SPS avec une feuille de graphite (a) ou une feuille de molybdène (b) placée entre la matrice et l’échantillon [31]. L’échantillon densifié avec la feuille de graphite est gris et présente une transmission maximale à 1100 nm de 63%, alors que celui obtenu en utilisant une feuille de molybdène offre une transmission maximale de 86% (Figure II-7-a). De même dans l'UV à 300 nm, une nette augmentation de la transmission (8% à 54%) est observée avec l’utilisation du molybdène.

71 Figure II - 7 : (a) Transmission optique des céramiques CaF2 obtenues par frittage SPS en utilisant

une feuille de graphite (courbe noire) ou une feuille de molybdène (courbe rouge) placée entre la matrice et l’échantillon (b) Spectres Raman de la matrice graphite et de la feuille de graphite

comparés aux céramiques SPS [31].

Les spectres Raman en Figure II-7-(b) mettent en évidence les bandes D et G du carbone à 1350 et 1600 cm-1. La bande G traduit la présence de carbone sous forme graphitique et la largeur de la bande D renseigne sur le degré d’ordre de la structure [33]. Les bandes D et G sont présentes dans les céramiques SPS obtenues uniquement avec la feuille de graphite et non dans le cas du molybdène, prouvant ainsi l’efficacité du procédé face à la contamination par le carbone.

A. Bertrand et al. ont combiné l’utilisation d’une barrière physique en alumine et d’une étape de préfrittage de la poudre de verre avant le frittage par SPS afin de diminuer la porosité et ainsi limiter les chemins de diffusion du carbone [32]. Dans cette étude, la poudre de verre de composition 85 TeO2 - 15 WO3 est traitée thermiquement dans un four à moufles au-dessus de la Tg afin de la pré-densifier. En effet, grâce à l'élévation de température, la poudre de verre ramollit et flue, ce qui permet une certaine densification des préfrittés. Leur compacité est de 95%.

Deux tailles de poudres ont été utilisées afin d’étudier l’influence de la granulométrie sur la pollution carbone ; une poudre qualifiée de fine (dmédian = 5 µm) et une poudre dite grossière (dmédian = 165 µm). Des verres SPS ont ainsi été élaborés à partir de ces deux poudres avec (Figure II-8 (c et e)) et sans (Figure II-8 (b et d)) barrière de diffusion en alumine.

Figure II - 8 : Photographies (a) du verre élaboré par fusion/trempe, de verres SPS réalisés à partir de poudre fine sans (b) et avec (c) l’utilisation d’une barrière de diffusion du carbone, de même avec de

la poudre grossière (d) et (e) [32].

L’ajout d’une étape de préfrittage à 350°C pendant 1h avant le frittage par SPS permet de réduire, de manière considérable la pollution au carbone comme illustré en Figure II-9.

Figure II - 9 : Photographies d’un échantillon avant (gauche) et après (droite) SPS [32].

Après cette introduction bibliographique, nous allons nous intéresser à la première série de composites vitrocéramiques, c’est-à-dire ceux contenant des cristaux de LiNbO3 (cristaux conduisant à la génération de seconde harmonique).