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Des facteurs individuels se cumulant avec l’environnement obésogène

Dans le document RAPPORT D’INFORMATION (Page 67-70)

B. UN PHÉNOMÈNE MULTIFACTORIEL : UN ENVIRONNEMENT PROPICE

2. Des facteurs individuels se cumulant avec l’environnement obésogène

Part des élèves de 3ème regardant plus de deux heures par jour les écrans en semaine selon le groupe socioprofessionnel des parents (en %)

Cadres 61

Professions intermédiaires 70

Agriculteurs et commerçants 73

Employés 78

Ouvriers 81

Ensemble 73

Source : Drees études sur les élèves de 3ème, 2017

2. Des facteurs individuels se cumulant avec l’environnement

Pour la très grande majorité des personnes obèses, le « fond génétique », c’est-à-dire pas moins de cinq cents régions du génome, entraîne une susceptibilité augmentée à l’environnement obésogène. Plus de 12 000 mutations génétiques sont responsables de l’augmentation de la prévalence de l’obésité. Selon l’Inserm, « si chaque gène pris individuellement n’exerce qu’un faible rôle sur la masse et la composition corporelle, la contribution de ces gènes devient significative lorsqu’ils interagissent avec des facteurs externes tels que le déséquilibre énergétique ». Pour prévenir l’obésité commune, il est possible de réaliser un score de risque polygénique qui contribue à prédire le risque d’être obèse d’ici 5 ou 10 ans.

b) Le rôle du microbiote

Le microbiote, ou flore intestinale, est composé de plus de 100 000 milliards de microorganismes issus de plus de 1 000 espèces bactériennes. Depuis le début des années 2000, le rôle d’un microbiote appauvri et peu diversifié a été mis en exergue dans le développement de l’obésité1.

Chez l’enfant, la composition du microbiote à l’âge de deux ans est corrélée à l’IMC à 12 ans. L’accouchement par voie basse et l’allaitement sont deux éléments protégeant d’une obésité future.

c) Facteurs psychologiques et violences sexuelles

Il existe un lien significatif entre violences sexuelles, psycho traumatismes et troubles alimentaires et obésité.

Lors de son audition, Nathalie Dumet, psychologue clinicienne et professeure de psychopathologie clinique, a insisté sur le fait que les troubles des conduites alimentaires (TCA), assortis ou non de troubles pondéraux, sont le révélateur de souffrances psychiques. Ils surviennent en lien ou dans l’après-coup d’évènements de vie désorganisateurs, voire traumatiques, restés inélaborés, et demeurés source de souffrance.

On recense des situations variées : problématiques de pertes, de ruptures, de séparation, burn-out, harcèlement, abus, agressions ou violence. Les troubles des conduites alimentaires, notamment l’hyperphagie boulimique et la prise de poids afférente, peuvent constituer des solutions mises en place inconsciemment pour occulter et/ou réparer les traumatismes et les souffrances psychiques associées. Le trouble a une fonction défensive pour l’équilibre psychique du sujet, ce qui est à l’origine d’un risque d’effondrement (dépression, suicide) lorsque la personne obèse maigrit. Cela explique également pourquoi ces patients reprennent souvent rapidement le poids perdu.

1 Judith Aron-Wisnewsky, Karine Clément, « Microbiote et obésité : données cliniques et chirurgicales », Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition, Vol. XIX, n° 5-6, mai-juin 2015.

La prévalence d’expériences d’abus sexuels, physiques ou émotionnels (maltraitance par le biais de la parole) sont plus importantes parmi les personnes atteintes d’obésité qu’en population générale.

Les négligences des parents durant l’enfance sont également fréquentes dans les histoires de vie des personnes obèses : « les négligences physiques (privation de nourriture, d’hygiène, de soins) concernent 9 à 32 % des personnes en situation d’obésité, les négligences émotionnelles (manque d’attention entraînant des carences affectives, manque d’apprentissage et de relations sociales) sont identifiées chez 20 à 75 % des patients »1. Pour Nathalie Dumet, les patients atteints d’obésité ont souvent des parcours de vie complexes « où la présence d’un nouvel évènement de vie négatif (accident de la route, cambriolage, divorce…) peut venir s’ajouter au(x) traumatisme(s) déjà vécu(s) ».

On estime que le risque d’obésité est augmenté de 40 % en cas de violences sexuelles lors de l’enfance2 ; 8 % des personnes obèses auraient été agressées sexuellement dans l’enfance, cette statistique s’élevant à 17 % pour les personnes atteintes d’une obésité de type III3. Karen Sadlier, psychologue clinicienne et directrice du département « Enfant » de l’Institut de victimologie, a explicité lors de son audition les relations entre obésité à l’âge adulte et violences sexuelles dans l’enfance.

Plusieurs mécanismes peuvent expliquer ce lien étroit :

- le psychiatre américain Vincent Felliti a constaté en 1985, dans le cadre d’un programme de prise en charge des personnes obèses, que les individus ayant vécu des agressions sexuelles dans l’enfance ne parvenaient pas à perdre du poids, ou le reprenaient systématiquement. Pour lui, l’obésité agit comme un bouclier de protection pour se rendre moins attirant et plus imposant vis-à-vis des agresseurs sexuels ;

- le traumatisme crée un état dissociatif à l’origine de conduites addictives, d’automutilation et de troubles du comportement alimentaire pouvant engendrer une obésité. 54 % des personnes ayant subi des violences sexuelles dans l’enfance rapportent des troubles alimentaires ;

- des explications neurobiologiques : les évènements traumatiques, surtout lorsqu’ils sont répétés, engendrent d’une part une augmentation de la protéine-C réactive, à l’origine de phénomènes inflammatoires, d’autre part une augmentation de la production de cortisol, une hormone du stress impliquée dans le métabolisme des graisses et la régulation de l’insuline.

Parallèlement, la sécrétion de deux hormones bénéfiques, la dopamine et la sérotonine, est entravée. Ces déséquilibres biologiques et hormonaux favorisent la prise de poids et l’inflammation du tissu adipeux.

1 Joris Mathieu, C. Petit, C. Lombard et al., « Obésité sévère, quelle prise en charge psychologique ? », Revue de psychologie clinique, 2021-2.

2 H. Hailes, R. Yu et al., « Long-term outcomes of childhood sexual abuse: an umbrella review », Lancet psychiatrie, 2019.

3 Wiss, Brewerton, Tomalyama, (2021). « Limitations of the protective measure theory in explaining the role of childhood sexual abuse in eating disorders, addictions and obesity », Eating and Weight Disorders - Studies in Anorexia, Bulemia and Obesity, 27, 1249-1267.

Les troubles mentaux se retrouvent plus fréquemment chez les personnes atteintes d’obésité que dans la population générale1. Ainsi, l’hyperphagie boulimique est un trouble du comportement alimentaire qui peut se retrouver chez les personnes obèses. Les crises de boulimie qui la caractérisent peuvent entraîner une prise de poids rapide et conséquente.

La dépression augmente quant à elle de 58 % le risque de devenir obèse.

Les troubles addictifs sont également plus fréquents chez les personnes atteintes d’obésité : environ 10 % des candidats à la chirurgie bariatrique évoquent un passé de dépendance à l’alcool ou d’usage de substances illicites. Les personnes souffrant de troubles psychotiques sont également souvent touchées par l’obésité : la plupart des médicaments antipsychotiques destinés à soulager les troubles bipolaires ou la schizophrénie sont obésogènes et peuvent entraîner une prise de poids de plus de 10 kg au cours des premières années de traitement.

C. PRÉVENIR ET GUÉRIR L’OBÉSITÉ : UNE ACTION PUBLIQUE À

Dans le document RAPPORT D’INFORMATION (Page 67-70)