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Le développement du langage de l’enfant : oralité verbale secondaire

I. Développement des fonctions orales et des habiletés manuelles chez l’enfant

1. Alimentation et mastication: oralité alimentaire

2.4. Le développement du langage de l’enfant : oralité verbale secondaire

verbale secondaire.

38THIBAULT Catherine, Orthophonie et oralité, la sphère orofaciale de l’enfant. Issy-les-Moulineaux,

Après l’étape du cri et des vocalises, le nourrisson est désormais capable de se ventiler par la bouche : l’anatomie s’est modifiée, il maîtrise sa respiration. Il peut émettre des vocalisations de plus en plus longues. Les émissions vocales se calquent sur le schéma de la langue maternelle et sont plus compréhensibles. 14

Grâce à la verticalisation (et le développement du cortex pariéto-frontal), le larynx descend progressivement, laissant un espace libre en arrière de la langue, et permettant ainsi une résonance. La partie postérieure de la langue devient mobile, de nouveaux sons apparaissent alors. Il semblerait que la localisation neuro-anatomique de ces nouveautés dans la communication soit cortico-frontale.14

Avec cette nouvelle communication, le bébé entre dans la période du babillage, qui correspond au niveau alimentaire au passage à la cuillère.

2.4.1. Le babillage

a. Le babillage rudimentaire

Il y a dans le babillage bien plus que l’imitation, l’enfant joue avec sa voix, avec les sons : il s’agit d’un véritable plaisir de jouer39. Le champ fréquentiel s’accroît. Ce stade est caractérisé par de nouvelles productions comprenant des sons pleinement résonants qui ont la fréquence d’occurrence la plus importante.40

Avec l’imitation des parents et les jeux de sa voix, l’enfant produit vers l’âge de six mois ses premières combinaisons consonne-voyelle : les protosyllabes. En effet ce ne sont pas des syllabes, car elles ne sont pas facilement identifiables en raison d’une articulation assez lâche, de transitions lentes entre les mouvements d’ouverture et de fermeture du tractus vocal.

Les syllabes émises sont de type « aewa », « aya » …14Certaines études ont permis d’observer que les premiers sons produits sont universels et s’acquièrent dans un ordre similaire. Le « a » est la première des voyelles, il est suivi de « é », de « i », de « ou ».

Les consonnes antérieures « p », « b » sont suivies des nasales « m » puis « n ». Ces consonnes sont souvent imprécises au début, et il est difficile de différencier « p », « b » ou « d » pour un même son. Progressivement, elles ressembleront de plus en plus aux phonèmes de la langue maternelle.39

La capacité de l’enfant à se mettre en position assise permet à la langue de rentrer et de commencer à monter contre le palais. Peu à peu, l’enfant acquiert l’agilité motrice nécessaire à la parole.

39Aimard Paule, Les débuts du langage de l’enfant, Dunod, Paris, 1996 40CHEVRIE-MULLER C. et al. (2007), Le langage de l’enfant. Paris, Masson

Commencent alors des conversations entre le bébé et l’adulte : l’adulte commente le babillage de l’enfant, il laisse des pauses, des tours de rôle se mettent en place.39

b. Le babillage canonique

Les syllabes commencent à être bien formées, de type consonne-voyelle. Les phonèmes peuvent être distingués. Les syllabes sont redoublées, de type « bababa », « papapa », « mamama ». Le bébé, par ces redoublements, fait progressivement le lien entre l’aspect sensoriel et l’aspect moteur de ses productions.14

L’enfant entend d’abord le son qu’il produit, et petit à petit s’installe un lien entre la forme acoustique et le schéma moteur mis en œuvre. Dès cinq ou six mois, le bébé s’amuse à répéter les sons qu’il a produits, comme s’il s’exerçait. Par ces auto-imitations se renforce le lien fait entre la forme acoustique et la forme motrice.39

Vers six ou huit mois, il développe les traits mélodiques, prosodiques, rythmiques de sa langue maternelle, celle qui l’entoure constamment.

Peu à peu l’enfant progresse dans son babillage, de manière continue : les mélodies s’enrichissent et deviennent variées.

C’est à ce stade que l’enfant met en place le regard conjoint ; c’est le stade de la construction de la communication.

Pour Catherine Thibault, il s’agit de la période culminante en ce qui concerne le développement des vocalisations.41

c. Le babillage mixte

Le babillage mixte correspond à la période à laquelle le bébé commence à introduire des mots dans le babillage ; c’est le protolangage.41

L’enfant faisait déjà des réduplications syllabiques, prenait plaisir à jouer avec les formes répétées. De là sortiront les premiers mots.39

La main commence un rôle important par la fonction de pointage ; il s’agit du préalable à la dénomination.42

41THIBAULT Catherine, Orthophonie et oralité, la sphère orofaciale de l’enfant. Issy-les-Moulineaux,

Elsevier Masson, 2007

Vers onze-treize mois, l’enfant ne produit plus que des sons appartenant à sa langue maternelle ; les changements d’intonation ainsi que les gestes sont de plus en plus utilisés pour se faire comprendre et donner du sens aux proto-mots. A ce stade le rôle de la mère est toujours aussi important, elle continue par son interprétation à créer le lien entre ce qui est prononcé et l’objet.41

Anatomiquement, entre neuf et douze mois, la mandibule descend et la langue monte contre le palais ; il y a dissociation entre les mouvements de la langue et ceux de la mandibule.

Puis, entre quinze et dix-huit mois, la langue se muscle, elle peut se déplacer dans tous les plans de l’espace buccal. Les mouvements mandibulaires de diduction sont effectués de manière correcte et sont coordonnés. La langue et la mâchoire continuent de se dissocier. Progressivement, la langue trouve la place de sa future position de repos, et ceci grâce à des contacts sensoriels toujours plus précis, avec des appuis brefs, répétés et successifs en arrière des alvéoles dentaires supérieures.

C’est à partir de cette période que grâce à quelques vagues mots, beaucoup de jargon, des gestes, des intonations, et l’aide du parent, l’enfant peut tenir de vraies conversations39. L’omniprésente interprétation du discours par l’adulte, qui donne un sens à toutes les ébauches de l’enfant, permet de structurer les énoncés et de progressivement les améliorer.

2.4.2. Les premiers mots

Vers deux ans environ, les structures anatomiques buccales sont musclées, à peu près stables et coordonnées. Désormais la langue a trouvé sa place et elle est en position haute pour la déglutition : la déglutition adulte est en place.

A ce stade alimentaire où la praxie de mastication continue à s’installer, le domaine verbal se développe et les premiers mots apparaissent. L’enfant émet un prélangage : il appelle, il nomme, et il émet des sons ressemblant à des noms d’aliments, comme /lè/, /pC/.

Le premier vocabulaire du jeune enfant a trait à l’alimentation. L’adulte met un mot sur un aliment, l’enfant regarde sa forme, sa couleur, le touche, il peut éventuellement entendre le bruit que fait l’aliment, il le sent, le goûte41. Cette exploration multi sensorielle lui permet d’assimiler ces mots, de les reproduire à sa façon, plus facilement que d’autres mots.

L’enfant fait une phrase par une mélodie, c’est dans un discours intonatif et gestuel que vont apparaître les mots. Peu à peu, l’enfant enrichit son lexique, mais la prononciation reste simplifiée. Il n’est pas encore capable d’articuler tous les sons de la langue, alors il les simplifie41. Souvent, il utilise peu de consonnes : les consonnes difficiles à prononcer comme les constrictives ou les /r/ sont déformées ou absentes. Les doubles consonnes comme /fl/, /fr/, /kl/, /kr/, etc sont en général manquantes.

Les voyelles sont prononcées, parfois de manière un peu instable ou peu nette dans certains mots.

La tendance à la simplification touche les phonèmes, leur enchaînement ou la forme générale des mots : les enfants peuvent éventuellement répéter individuellement les syllabes composant un mot, mais pas le mot entier. Par exemple « chocolat » peut être dit /lola/, « la petite fille » /étifi/, etc.39

Ces processus de facilitation sont normaux dans une certaine mesure jusqu’à l’âge de 4 ans. Les acquis moteurs dans l’alimentation influencent fortement les possibilités articulatoires.36 En annexe (II), les tableaux de LE METAYER expliquent les relations entre les troubles bucco-faciaux et les difficultés articulatoires.

Les praxies de l’oralité alimentaire que sont la déglutition, la mastication, la ventilation buccale, la propreté orale, naissent en même temps que les praxies du langage, se mettent en place parallèlement, utilisent les mêmes voies neurologiques c’est-à-dire les zones frontales et pariétales, et les mêmes organes.

« Il est bon de ne jamais perdre de vue que les organes mis en jeu dans l’alimentation sont les mêmes que ceux qui interviennent dans la phonation »43

3. Motricité globale et motricité fine manuelle