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La détermination de l’âge au décès

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 70-75)

ARCHÉOLOGIQUE DU XIII e AU XVIII e SIÈCLE

3.2 Méthodes anthropologiques sur os sec

3.2.2 La détermination de l’âge au décès

L’estimation de l’âge au décès a été effectuée sur la base de différentes méthodes, retenues en fonction de la maturité de l’individu et de l’état de conservation et de représentation du squelette. Pour les individus immatures, elle se base sur l’observation des processus de maturation et de croissance, permettant d’obtenir un intervalle d’âge précis, tandis que pour les individus matures, elle se base sur l’observation des processus de sénescence, conférant à l’individu une fourchette d’âge plus large. Les méthodes utilisées répondent au critère de fiabilité suffisante, c’est-à-dire d’une probabilité minimum de 95 %.

3.2.2.1 Les individus immatures

L’âge au décès des individus immatures a d’abord été attribué grâce à l’observation des stades de minéralisation dentaire, approche à ce jour la plus fiable et la plus précise (Moorrees et al. 1963a ; Moorrees et al. 1963b). Lorsque les germes dentaires ou dents étaient absents ou n’étaient pas observables, la longueur diaphysaire des os longs – épiphyses non soudées – a été utilisée pour estimer la stature et l’âge au décès. En fonction de l’âge au décès pressenti, les équations de régression ont varié, utilisant celle de Sellier pour les moins de 1 an (Sellier 1993 ; Fazekas, Kosa 1978 ; Sellier et al. 1997). Pour les plus grands, âgés entre 1 et 14 ans, d’autres équations proposant une stature pour les individus ont été utilisées (Palkama et al. 1962 ; Telkkä et al. 1962a ; Telkkä et al. 1962b), le résultat obtenu est alors reporté sur les courbes de croissance (Sempé et al. 1979). Les fémurs ont été préférés pour ces calculs et seulement remplacés par les humérus quand ils étaient absents ou trop mal conservés. À conservation similaire, le côté gauche a été privilégié.

L’estimation de l’âge au décès des individus âgés entre 15 et 19 ans a été effectuée sur la base de la maturation osseuse. En effet, à cet âge où la minéralisation des dents est totalement terminée (excepté pour les troisièmes molaires), où la croissance se termine et où les épiphyses des os longs sont en cours de fusion, seule cette approche permet de déterminer l’appartenance d’un individu à la classe des [15-19]

(Bruzek et al. 2005). L’estimation de l’âge a également été effectuée à partir de l’observation des points de fusion des épiphyses aux diaphyses (Birkner 1980).

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3.2.2.2 Les individus adultes

L’âge au décès des adultes, moins fiable, est basé sur l’observation des os coxaux (Schmitt 2005). À partir du développement de critères repérés sur la région de la surface sacro-pelvienne iliaque, cette méthode permet de déterminer la probabilité a posteriori qu’a un individu d’appartenir à un intervalle d’âge en fonction de la combinaison des scores (allant de 1 à 4 selon le caractère) établis pour chaque caractère.

Pour les individus ne possédant que 3 des 4 critères SSPI de Schmitt, soit 100 individus16, nous avons délibérément choisi de les ventiler selon la moyenne des probabilités d’appartenance au score non renseigné. La précision est alors moindre mais le résultat est plus fiable. Pour les jeunes adultes, la fourchette d’âge obtenue a pu être affinée, en couplant le résultat avec l’observation du stade de maturation de l’extrémité sternale de la clavicule et de la crête iliaque de l’os coxal (Webb, Suchey 1985).

Lorsque les précédentes observations n’ont pu être effectuées en raison de la mauvaise conservation et/ou de la mauvaise représentation des os coxaux et des clavicules, nous avons observé les stades de maturation des différentes pièces osseuses à disposition afin de vérifier si le squelette est mature ou non (Birkner 1980). D’autres paramètres biologiques ont également été utilisés ponctuellement (morphologie, épaisseur de l’os cortical, usure dentaire, etc.) pour finir de classer les individus les plus mal conservés ou représentés.

3.2.2.3 La paléodémographie

Les premiers indicateurs paléodémographiques calculés sont l’indice de juvénilité (IJ), correspondant au rapport entre le nombre d’individus compris entre 5 et 14 ans et les adultes de plus de 20 ans17 et l’indicateur 15P5 défini par le rapport Bocquet-Appel18 (Séguy, Buchet 2011, 153). L’intérêt de cet indice permet de s’affranchir de la sous-représentation classique parmi les effectifs archéologiques des petits de moins de 5 ans. Le quotient de mortalité théorique déduit du rapport indique une espérance de vie à la naissance [e(0)] à 26,5 ans (avec IJ) et 23,6 ans (15P5). Le renouvellement générationnel est donc possible selon ces deux indices impliquant alors un possible recrutement naturel de cet espace funéraire.

Les quotients de mortalité et pyramides des âges pour les adultes ont été établis à partir des probabilités d’appartenance par classe d’âge issues de l’observation des bassins (Schmitt 2005). Ainsi les tables de mortalité ont pu être construites à partir des effectifs de décès bruts disponibles pour chaque classe d’âge

16 499 individus présentent les quatre champs de la méthode (Schmitt, 2005) et 599 n’en montrent que trois.

17 IJ = D5-14/D20-ω = 0,197

18 P = D5-19/D5-ω = 0,236

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et en tenant compte de l’hypothèse de Halley19. Le modèle ainsi obtenu a été comparé aux tables types de Ledermann, décrivant une mortalité archaïque, avec une espérance de vie minimale à la naissance à 40 ans pour la courbe basse et maximale à 20 ans pour la courbe haute (Ledermann 1969).

Pour les individus immatures répartis entre deux classes d’âge (26 individus en position primaire pour les deux phases20), il a été choisi de les ventiler en fonction de leur probabilité d’appartenance à chaque classe d’âge en fonction d’une espérance de vie à la naissance de 20 ans (tab. 3). Ainsi les enfants attribués à la classe [5-9 ans] ont été ventilés à 84 % dans la classe [1-4 ans] et 16 % chez les [5-9 ans] ; les enfants des classes [5-14 ans] se répartissent à 64 % chez les [5-9 ans] et 36 % 14 ans] et enfin ceux des classes [10-19 ans] ont été distribués à 42 % chez les [10-14 ans] et 58 % chez les [15-[10-19 ans]. L’objectif de cette étape est de minimiser d’éventuelles distorsions par rapport à une mortalité naturelle sans exclure de l’analyse les individus à cheval sur deux classes d’âge.

Tableau 3 : Valeurs extrêmes des quotients de mortalité selon les tables types de Ledermann (Ledermann 1969).

3.2.3 La morphométrie

Vingt-cinq mesures ont été retenues (neuf sur le crâne, six sur la mandibule et dix sur le post-crâne) pour réaliser une diagnose sexuelle secondaire d’une part et caractériser de façon morphologique les effectifs archéologiques exhumés. Afin de gagner du temps, les mesures ont été prises sur un seul côté et, à conservation similaire, notre choix s’est préférentiellement porté sur le côté gauche. Le matériel utilisé se compose d'un pied à coulisse numérique, d'un compas céphalique (ou céphalomètre), d'un crâniophore de Mollison, d'une planche ostéométrique et d'un mandibulomètre.

19 Nous partons du principe que la population est stationnaire avec une structure par âge invariable et un taux d’accroissement nul. Ainsi le nombre de décès est équivalent au nombre de survivants de départ (Bocquet-Appel 2008, 115).

20 Cela concerne les individus des sépultures 166, 230, 260, 1061, 1107, 1123, 1220 pour les classes [1-9], les sépultures 5, 7, 24, 25, 28, 82, 102, 171, 177, 231, 246, 264, 317, 1153, 1161, 1187, 1318 pour les classes [5-14] et les sépultures 12 et 1249 pour les classes [10-19].

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- hauteur supérieure de la face (nasion – prosthion) (M48) - largeur nasale (M54)

Certaines mesures choisies ont été prises dans l’intention de calculer des indices : indice crânien horizontal (ICH = M8/M1*100), indice nasal (M54/M55*100), indice facial supérieur (M48/M45*100) indice de robustesse à partir de l’humérus (M7/M1*100) et du fémur (M8/M2*100) et indice pilastrique (M6/M7*100).

Il s’agit de calculer un pourcentage d’une dimension par rapport à une autre dans le but de traduire des proportions ou des formes, alors que les valeurs absolues renseignent sur la taille ou le format. Certains auteurs proposent de porter une plus grande attention aux valeurs brutes, apportant des informations plus précises sur les problèmes d’évaluation de la forme et du format. En effet, pour eux, l’évolution d’un indice résulte de valeurs qui peuvent être inter-corrélées, ce qui affaiblit l’interprétation (Demoulin 2003, p. 118).

Les mesures ont également permis de calculer la stature des sujets suivants les équations de Ruff et al.

(2012) à partir des mesures prises sur les longueurs maximales des fémurs et humérus des adultes. Les

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équations sont liées à la détermination du sexe21 et renseignent une moyenne fiable à 95 % selon un échantillon de référence européen. L’importance de prendre en compte une population de référence particulière est capitale pour espérer estimer le plus correctement possible cette stature. Quel que soit l’os considéré, les résultats suivent une Loi Normale22 et sont bien corrélés23 (fig. 29).

Figure 29 : Statures humérales (en cm) confrontées aux statures fémorales des 129 sujets ayant les deux valeurs renseignées. La droite des moindres carrés déduite décrit bien des valeurs dépendantes.

Un écart des statures par sujet est noté selon l’os considéré et le genre des sujets quand les deux valeurs (fémur et humérus) ont été observées (fig. 30). Afin de corriger les données pour permettre un classement individuel des sujets selon leur taille et rajouter les individus ne possédant qu’une seule valeur, une

« stature déduite » de la moyenne des statures fémorale et humérale selon le sexe a été calculée24. L’objectif ici n’est pas de renseigner une stature individuelle, mais de pouvoir classer les individus dans des classes selon leur taille et d’augmenter le nombre l’échantillon. Des classes sont attribuées ensuite à chaque sujet en fonction de la moyenne staturale déduite et des écarts-types (tab. 4).

21 Équations utilisées à partir du fémur (L. max) : Stature femme = 2,69 (fe) + 46,56 ; homme = 2,72(fe) + 42,85 ; combinée = 2,77(fe) + 40,50 et à partir de l’humérus (L. max) : Stature femme =3,38(hum) + 54,60 ; homme = 3,83(hum) + 41,42 et combinée = 3,72(hum) + 44,86.

22 Tests de Shapiro-Wilk non significatifs, fémurs : W= 0,9951, p = 0,58 et humérus : W= 0,9894, p = 0,219

23 Coefficient de corrélation r=0,89, p =2,95e-45

24 La moyenne des différences est de 3,879 pour les femmes, 1,225 pour les hommes et 1,244 pour les sujets non sexés.

« Stature déduite » = stature fémur – moy (stature fémur – stature humérus)/sexe

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Figure 30 : Boite de dispersion des statures selon le sexe et l’os pris en compte.

Très petits Petit (2 σ) Moyen (1 σ) Grand (2 σ) Très grand

Femmes > 140,47 [140,47-147,06] [147,06-153,66] [153,66-160,25] < 160,25 Hommes > 156,79 [156,79-163,73] [163,73-170,66] [170,66-177,59] < 177,59 Indéterminés > 151,92 [151,92-160,02] [160,02-168,11] [168,11-176,21] < 176,21

Tableau 4 : Tailles selon les classes calculées par sexe.

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