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1. Rapprocher encore la perception du revenu du versement des cotisations

a) Un décalage source d’incompréhension et de difficultés

Comme évoqué précédemment, la principale difficulté liée aux cotisations des travailleurs indépendants est qu’elles sont difficilement compréhensibles du fait de leur décalage avec la perception des revenus auxquels elles se rapportent et du régime d’acomptes provisionnels et de régularisations.

Le revenu d’un certain nombre d’indépendants, en particulier les artisans, se caractérise par une forte variabilité qui peut induire une déconnexion très forte entre le niveau des revenus et le montant des cotisations provisionnelles.

Le principe consistant à payer une régularisation se rattachant au revenu de l’exercice N-2 sur les deux derniers mois de l’année en cours est source de difficultés pour des indépendants qui n’auraient pas provisionné ces régularisations alors que leur revenu peut s’être orienté à la baisse.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a rapproché la date de régularisation des cotisations en prévoyant qu’à compter du 1er janvier 2015, elles porteraient dès l’année N sur le revenu de N-1 tout en prévoyant la possibilité d’anticiper les régularisations dès le printemps.

Il n’est pas certain que cette disposition apporte une réponse complète aux variations de revenus. Elle ne règle pas non plus le cas des cessations d’activité en cours d’année pour lequel il est encore plus crucial pour le régime de recouvrer rapidement les cotisations.

b) L’autoliquidation, un bouleversement discuté

Devant cette situation, l’autoliquidation consistant, pour un indépendant, à calculer lui-même le montant de ses cotisations, est avancée comme une réponse par certains indépendants et par l’ordre des experts-comptables.

Vos rapporteurs ont pu constater que cette solution ne faisait pas l’unanimité. Les indépendants, en particulier les artisans, ne souhaitent pas se voir imposer l’obligation d’avoir recours aux services d’un expert-comptable et redoutent une augmentation des frais. Le RSI et l’Acoss redoutent quant à eux une nouvelle baisse du rendement du recouvrement et la difficulté d’effectuer des contrôles.

c) L’estimation du revenu, un dispositif à généraliser

Vos rapporteurs préconisent de développer le recours aux dispositions dérogatoires prévues à l’article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale qui prévoit que « sur demande du cotisant, les cotisations provisionnelles peuvent être calculées sur la base du revenu estimé de l’année en cours ». La sanction d’une mauvaise estimation n’apparaît pas disproportionnée :

« lorsque le revenu définitif est supérieur d’un tiers au revenu estimé par le cotisant, une majoration de retard est appliquée sur la différence (…) sauf si les éléments en la possession du cotisant au moment de sa demande justifiaient son estimation. »

Ils ont constaté avec surprise que cette disposition était très peu connue des différents acteurs du dossier alors qu’elle permettrait de régler un grand nombre de situations difficiles liées aux variations de revenus. En 2012, moins de 200 000 artisans, commerçants ou professions libérales ont eu recours à cette possibilité. En 2013, ce nombre a plus que doublé - 433 892 travailleurs indépendants - mais reste encore très limité.

Vos rapporteurs considèrent qu’elle apporte une réponse satisfaisante aux partisans de l’autoliquidation des cotisations et qu’elle pourrait, une fois généralisée et associée à une modernisation des déclarations de revenus, en constituer, si nécessaire, le prélude.

Ils demandent que la mention de cette possibilité figure systématiquement sur les appels de cotisations et que le recours à ce dispositif soit expliqué et encouragé, un professionnel qui vient de réaliser un résultat exceptionnel étant plus enclin à s’acquitter de ses cotisations qu’une fois sa situation personnelle devenue plus difficile.

2. Renforcer l’implication des experts-comptables

Si le recours à un professionnel est quasiment généralisé parmi les professions commerciales, 95 % ont un expert-comptable, c’est moins fréquemment le cas chez les artisans. L’intervention d’un expert-comptable ne peut donc être considérée comme systématique.

Lorsqu’elle est sollicitée, l’implication des experts-comptables pourrait être renforcée dans plusieurs directions.

Lors de l’établissement du bilan du travailleur indépendant, ils devraient procéder immédiatement au calcul du montant des cotisations sociales, constituer des provisions au bilan avec une incidence fiscale pour leur client et définir d’emblée le montant des acomptes provisionnels.

Lors de l’audition du président de l’Ordre, vos rapporteurs ont pu constater que le provisionnement des cotisations figurait parmi les recommandations aux professionnels mais il semble qu’il soit encore loin d’être généralisé.

La possibilité de réviser ses cotisations en fonction d’une estimation du revenu semble également méconnue. Le président de l’Ordre des experts-comptables, M. Zorgniotti, a indiqué à vos rapporteurs que si la mention « sur demande du cotisant » était suffisante à la mise en œuvre de cette disposition, sans autre procédure complémentaire, la demande d’autoliquidation lui semblait satisfaite.

Interrogé sur la question du surcoût éventuel représenté par l’autoliquidation des cotisations ou leur estimation en fonction du revenu, il a pris l’engagement solennel qu’elle ne se traduirait par aucune augmentation des honoraires.

Vos rapporteurs considèrent également qu’en complément de la lecture fiscale, il conviendrait de prévoir une lecture sociale des résultats de l’entreprise et d’informer le travailleur indépendant des conséquences en termes de droits à retraite ou encore de couverture sociale du conjoint-collaborateur.

Généraliser la désignation d’un interlocuteur « experts comptables » du RSI dans chaque région, comme c’est le cas pour les Urssaf, permettrait également de renforcer la médiation entre le RSI et ses cotisants.

Enfin, les experts comptables ont un rôle à jouer dans la modernisation des procédures, la conséquence logique de leur intervention étant la déclaration des revenus par voie dématérialisée. Le RSI prévoit un accès pour les experts comptables pour l’ensemble de leur portefeuille de clients. Pour l’année 2013, 11,4 % des flux proviennent des experts comptables, ce qui constitue un apport nouveau mais encore très limité si l’on compare avec le nombre d’indépendants qui ont recours à un professionnel pour l’établissement de leurs déclarations.