• Aucun résultat trouvé

Chapitre II Cadre théorique 44

2.1 Premier objectif : comparaison avec le CdCF 45

2.1.1 Apprentissage de la lecture 45

2.1.1.4 Contexte 54

Le contexte est tout ce qui entoure le lecteur lorsqu’il est en contact avec le texte. Il regroupe les contextes psychologique, social et physique. Le contexte psychologique est principalement l’intention de lecture de l’élève. Le contexte social regroupe les interventions que l’enseignant, les parents et les pairs font pendant la lecture. Finalement, le contexte physique regroupe tous les facteurs qui peuvent influer sur l’apprentissage scolaire au sens large. Par exemple, un élève ayant un trouble déficitaire de l’attention a probablement de la difficulté à rester concentré sur la tâche, peu importe laquelle, s’il est placé à côté d’une fenêtre donnant sur la cour de récréation où jouent les élèves d’une autre classe.

Bucheton et Soulé (2009) mettent de l’avant cinq préoccupations de l’enseignant autour desquelles s’élaborent les activités quotidiennes de la classe. Le modèle de la figure 1 montre ces cinq préoccupations.

Donner du sens, de la pertinence à la situation et au savoir visé

Fig.1 Un multi-agenda de préoccupations enchâssées (Bucheton et Soulé, 2009)

Voici un bref descriptif de chacune des cinq préoccupations.

• Le pilotage de la tâche est une préoccupation centrale des jeunes enseignants. L’enseignant organise de façon séquentielle la leçon. Lors du pilotage de la leçon, l’enseignant doit s’assurer qu’il planifie son temps et qu’il a tout le matériel nécessaire. Il doit aussi animer une tâche signifiante pour ses élèves, cognitivement stimulante et claire.

• L’atmosphère est définie comme un espace qui organise. L’enseignant a la responsabilité de créer une atmosphère propice aux apprentissages.

• Le tissage est une métaphore. En fait, l’élève doit faire le pont entre ce qu’il connait et les nouvelles informations. Il doit également avoir conscience des raisons pour lesquelles ce savoir est essentiel à sa formation. Les débuts d’une

Tissage

Atmosphère Étayage Objets de savoirs,

techniques Créer, maintenir des

espaces de dialogue

Gérer les contraintes Espace temps de la situation Faire comprendre Faire dire Faire faire Pilotage de tâche

leçon, où les connaissances antérieures sont ravivées, sont un moment crucial de tissage.

• L’étayage renvoie à toutes les formes d’aide que l’agent (enseignant, parents ou pairs) apporte à l’élève.

• Les objets de savoirs, quant à eux, renvoient aux contenus enseignés par l’enseignant.

En d’autres mots, l’apprentissage est réalisé notamment à l’intérieur de tâches pilotées par l’enseignant. C’est l’enseignant qui doit gérer le temps et le matériel qui sera mis à la disposition des élèves. Les tâches sont pilotées dans une atmosphère précise, influencée par tous les élèves, mais dont l’enseignant a la responsabilité. Pour faire des apprentissages, l’élève doit tisser des liens entre ses connaissances et les nouvelles informations. Tout au long de l’apprentissage, l’enseignant doit étayer, guider l’élève vers l’acquisition des objets du savoir.

Généralement l’enseignement de la lecture auprès des élèves qui ont des incapacités intellectuelles se fait par le biais de tâches visant le développement de la reconnaissance globale de mots usuels (Ault, Gast, et Wolery, 1988; Brown, Hermanson, Klemme, Haubrich, et Ora,1970; Browder, Wakeman, Spooner, Ahlgrim-Delzell et Algozzine, 2006). Browder et Ping Xin (1998) ont fait une recension de recherches ayant pour objet l’enseignement des habiletés de reconnaissance globale des mots par des personnes qui ont des incapacités intellectuelles. Des 49 études recensées, 19 d’entre elles regroupent dans leur échantillon uniquement des élèves d’âge correspondant à la scolarité primaire (5 à 12 ans), âge normal d’apprentissage des bases de la lecture. Ces 19 études ont un échantillon plus petit ou égal à 10 participants. Il semble, à l’égard de cette recension des écrits, que l’apprentissage global des mots est très efficace chez les élèves qui ont des incapacités intellectuelles, ils retiennent les mots appris lorsqu’ils sont isolés. Par contre, ils ne reconnaissent pour la plupart pas les mots lorsqu’ils sont mis dans un nouveau

contexte. Ces élèves auraient des difficultés déjà mentionnées dans le premier chapitre au niveau du transfert et de la généralisation, ce qui les pénaliseraient dans une approche d’enseignement de la lecture axée sur la reconnaissance globale des mots, puisqu’ils ont des difficultés à reconnaître les mots selon le contexte où celui-ci est placé. Certains auteurs, pour faciliter la mémorisation des mots, proposent d’écrire les mots sur un dessin représentant ce dernier et d’estomper peu à peu le dessin. Les lecteurs avec des incapacités intellectuelles portent alors leur attention sur le dessin et non plus sur le mot.

D’autres études montrent que l’enseignement explicite du décodage augmenterait les compétences en lecture des élèves qui ont des incapacités intellectuelles (Cupples et Iacono, 2002). Selon Cèbe et Paour (2012) ces élèves auraient du mal à induire seuls les règles de correspondances entre les graphèmes et les phonèmes (Cupples et Iaocono, 2002 ; Fidler et Nadel, 2007 ; Lemons et Fuchs, 2010). Un enseignement axé sur le décodage autant qu’un enseignement axé sur la reconnaissance globale pénalisent le lecteur qui a des incapacités intellectuelles. Une méthode d’enseignement mixte combinant des activités de reconnaissance globale et des activités explicites de décodage serait donc à prescrire.

Les études traitant de l’enseignement de la lecture auprès des élèves du début du primaire qui ont des incapacités intellectuelles touchent principalement le développement des microprocessus. Nous n’avons pas trouvé de textes ayant pour échantillon des enfants ayant 9 ans ou moins qui ont des incapacités intellectuelles, traitant de l’enseignement des processus d’intégration, des macroprocessus et des processus d’élaboration. Par contre, les processus métacognitifs sont traités dans la littérature. Certains auteurs recommandent l’enseignement de stratégies métacognitives aux élèves qui ont des incapacités intellectuelles (Janney et Snell, 2006; King-Sears, 2001; Nolet et McLaughlin, 2005). D’autres comme Cèbe et Paour (2012) listent des facteurs critiques pour une intervention qu’ils jugent efficaces dans l’enseignement de la lecture auprès des élèves qui ont des incapacités intellectuelles :

• Proposer aux élèves suffisamment de temps pour apprendre la lecture. Les auteurs mentionnent que pour plusieurs élèves qui ont des incapacités intellectuelles l’apprentissage des rudiments des correspondances entre les graphèmes et les phonèmes peut prendre trois ans.

• Proposer à l’élève des activités qui sont adaptés à son niveau. Pour être certains que ces habiletés sont adaptées à son niveau, proposer des évaluations régulières. • Proposer des tâches qui favorisent l’engagement en donnant des objectifs précis

et en donnant au lecteur du contrôle sur la tâche.

• Proposer des activités qui aident à l’élève à tisser ses apprentissages. Pour ce faire les auteurs proposent de faire décoder le plus rapidement possible aux élèves des phrases et du texte qui contiennent des mots qu’ils sont aptes à déchiffrer.

En résumé, un portrait de ce qu’est la lecture pour tous les lecteurs a été brossé. Lire ne signifie pas regarder un texte. Savoir lire ne se résume pas à la connaissance du son des lettres. Un enfant reconnaissant son nom ne sait pas nécessairement lire. Un élève étant capable d’utiliser chacune des procédures explicitées ci-haut ne saura pas lire s’il n’est pas capable de les combiner et de les intégrer dans un tout harmonieux (Stanovich, 1991). Ce n’est pas parce qu’un enfant a toutes les pièces du casse-tête en main qu’il peut faire le casse-tête. Soulignons que 30 % des élèves de 3e année accusent des retards en lecture (Giasson, 2011). Ces élèves ont eu, pour la plupart, une entrée dans l’écrit plus lente; l’apprentissage et l’automatisation de l’identification des mots ont été laborieux. Ils ont très souvent eu de la difficulté à trouver l’équilibre entre le code et le sens (Giasson, 2011). Selon la même auteure, après la 3e année il est très difficile de modifier leur trajectoire : ils ne sont plus motivés.