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Méthode d’analyse du corpus

3.5 Conception linguistico-génétique des EMs

3.5.1 Pauses, répétitions, et marqueurs : nature des séquences non codantes directement à l’oral

L‘utilité de ces répétitions réside entre autre dans leur fonction de préparation à des emplois métaphoriques. Il est difficile de ne pas établir de parallèle structurel avec un autre langage : celui des séquences d‘acides désoxy-ribo nucléiques des gènes. Les séquences codantes sont séparées de séquences hautement répétitives qui ont leurs rôle dans la structure de l‘ADN, et donc dans son fonctionnement, en mettant par exemple en regard deux séquences codantes. A l‘oral, toutes ces répétitions et aussi les marqueurs, particules discursives et connecteurs, peuvent être vues comme des segments non-codants du discours qui jouent un rôle très important structurellement.

Ce rôle est envisageable non seulement dans la préparation pour l‘encodeur et le décodeur du message à la formulation d‘unités hyper-codantes (emplois métaphoriques par exemple) du point de vue de l‘énonciateur, mais aussi dans la signalétique énonciative pour le co-énonciateur qui serait de façon très schématique « attention , j‘essaye d‘atteindre une formulation plus fine ».

Non codant Codant Non Codant Hyper Codant Non codant …

La succession de différentes intensités de sens correspond à des niveaux de codification. En effet on peut considérer les métaphores comme étant au moins des séquences doublement codantes.

Elles codent une première fois pour le sens premier, habituel, et en contexte superpose ce sens à un autre concept, le concept cible. Le sens résultant étant la métaphore vive qui transcendent l‘un et l‘autre des deux sens. Le troisième pan du codage se situe sur un plan métatextuel et consiste à signaler la présence même de la métaphore et donc d‘un degré supérieure d‘encodage.

La pause la plus longue décelée au sein de l‘interview d‘une étudiante en chant (6 secondes) précède la production métaphorique la plus vive: « erm <pause de 6 secondes> it feels a little bit like you‘re out of your body almost (112, E3) ». On peut donc concevoir élaborer une batterie d‘outils électroniques qui pourrait traiter d‘énormes corpus oraux en tenant compte de tous ces marqueurs notamment dans un environnement où des logiciels de reconnaissances vocales s‘améliorent, rendant imminente la présence d‘immenses corpus oraux disponibles en ligne. La taille de ces corpus oraux, qui serait alors comparable à ce que sont les corpus écrits en ligne, justifierait d‘emprunter des méthodes à la biogénétique, ou d‘utiliser des méthodes comparables, à savoir des marqueurs, des repérages de séquences répétitives, de séquences déterminées

3.5.2 Les différents marqueurs vus sous un angle linguistico-génétique à partir d’un exemple

L‘organisation en succession d‘unités non-codantes et hypercodantes des EMs peut être illustrée par un locuteur américain chez qui « you know what I mean man » devient un marqueur qui représente vingt à trente pourcent du discours, ce qui n‘est pas rare. Ce sont des « pauses remplies », et elles existent chez tous les locuteurs, l‘avantage et qu‘elles sont directement utilisable dans le cadre de cooccurrences.

C‘est néanmoins chez ce locuteur, paradoxalement, que l‘on trouve une des plus hautes densités de productions métaphoriques vives, comme si ces séquences répétitives, ces marqueurs, préparaient de façon assez régulière le terrain discursif à des séquences hypercodantes, comme si la haute charge heuristique des EMs était compensée par ces séquences non directement codantes :

(10) 's a very very good quality for a drummer you know what I mean cause I mean you know like with him it 's like the beat is always there but it 's more felt than like heard you know what I mean it 's like more like I mean you know like with some drummers it 's like you can hear like pop pop you know you can hear like the to and fro the whole time but with him like it 's not always heard but you can always feel it you know what I mean like and that 's like a very very hard hard concept to to get as well as he 's got it you know when he 's playing it 's like yeah but he 's at he 's been playing for so long too man like you know it 's good jazz drummer I mean I don't know man when you think of like when you think of

music you can definitely like think of like elements you know what I mean some drummers play like real rock hard you know what I mean real real earthy some drummers play real fluent you know and real like and real like you know more like water some drummers play like real windy you know what I mean where it 's like you know everything everything is

flowing but it 's real light you know what I mean as oppose to like water where it 's like real it 's real strong you know but it has it still has the fluidity you know so like you know it is like I mean you could take like you know every element there is fire huh you know anything man and implement it to like describing a different musician specially drummers you know what I mean like I think with like more like horns like saxophones you definitely like you can think of those of more of like a voice type you know what I mean like you know some drummers sound like they 're talking (…) (127, E4)

en gris foncé: les répétitions, en gris clair: les marqueurs discursifs ( you know what I

mean)  en gras : les métaphores vives potentielles

Si l‘on calcule le taux de séquences non codantes (marqueurs + répétitions) on trouve les résultats suivants:

Mots U know what I

mean

Non codants Hypercodants (métaphore)

352 52 98 (29%) 12 (3.5%)

De cette structure alternée s‘esquisse un sens ou plutôt une indication sur l‘intensité de sens. La fréquence des unités répétitives est proportionnelle à celles des unités hypercodantes. On peut imaginer que dans du discours de degré 0 ( Rastier 1994) il y n‘y aurait ni séquence hypercodante ni séquence non-codante.

A l‘aide du balisage LSA et des courbes sonographiques, est-il possible de prédire cette structure de degrés sémantiques ? On peut tenter d‘observer les coefficients LSA et les courbes prosodiques pour tester la fiabilité de ces outils. Mais ils doivent être affinés.

-0,2 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1 33 65 97 129 161 193 225 257 289 321 353 Série1

Graphe1 visualisation des coefficients LSA (en ordonnée) en fonction de la place du terme (en abscisse) pour l‘énoncé pilote

En cartographiant l‘énoncé à l‘aide de coefficient de distance sémantique par rapport à la topique, on peut révéler cette structure. Les pics vers le haut par rapport à la moyenne correspondent à des valeurs hautes de LSA, donc à des termes proches du concept de musique:

6-drummer, 16-drummer, 34-beat, 45-heard, 63-drummers, 132-playing, 158-jazz, 159-drummers, 162-jazz, 163-drummers, 180-music, 195-drummers, 210-drummers, 228 drummers

Les pics vers le bas les termes les plus éloignés:

141-water, 188-elements, 213-fluent, 226-water, 232-windy, 247-flowing , 252-light, 259-oppose, 300-elements, 310-implement

Le raccrochement au thème du discours présente un forme de cyclicité, et on distingue des zones riches en termes potentiellement hyper-codants. Les répétitions peuvent être dépistées avec un corpus numérisé. De plus en ce qui concerne les coefficients LSA, il n‘apparaît pas extravagant de concevoir une feuille de style qui, à l‘aide d‘un étiquetage morphosyntaxique de dépendance tel celui de connexor6 puisse calculer l‘écart sémantique d‘un mot avec celui auquel il se rapporte, à savoir un terme représentatif du topic :

# Text Baseform Syntactic relation Syntax and morphology

1 when when tmp:>3 @ADVL %EH ADV WH

2 you you subj:>3 @SUBJ %NH PRON PERS NOM 3 think think tmp:>9 @+FMAINV %VA V PRES 4 of of phr:>3 @ADVL %EH PREP 5 music music pcomp:>4 @<P %NH N NOM SG

6 you you subj:>7 @SUBJ %NH PRON PERS NOM 7 can can v-ch:>9 @+FAUXV %AUX V AUXMOD 8 definitely definitely meta:>9 @ADVL %EH ADV

9 like like subj:>10 @-FMAINV %VA V INF 10 think think main:>0 @+FMAINV %VA V PRES 11 of of phr:>10 @ADVL %EH PREP 12 like like ha:>10 @ADVL %EH PREP 13 elements element pcomp:>12 @<P %NH N NOM PL

14 you you subj:>15 @SUBJ %NH PRON PERS NOM 15 know know obj:>10 @+FMAINV %VA V PRES 16 what what obj:>18 @OBJ %NH PRON WH

17 I i subj:>18 @SUBJ %NH PRON PERS NOM SG1 18 mean mean obj:>15 @+FMAINV %VA V PRES

19 some some det:>20 @DN> %>N DET 20 drummers drummer subj:>21 @SUBJ %NH N NOM PL 21 play play @+FMAINV %VA V PRES 22 like like ha:>21 @ADVL %EH PREP 23 real real attr:>24 @A> %>N A ABS 24 rock rock pcomp:>22 @<P %NH N NOM SG 25 hard hard @ADVL %EH ADV

Tableau 8 visualisation des étiquetages morphosyntaxiques de dépendance pour un extrait de l‘énoncé pilote

Ainsi, si les dépendances exprimées par la colonne « syntactic relation » sont insérées dans des balises, le terme « drummers » renvoie au terme 21, « play », et le coefficient de distance sémantique entre les deux est de 0.28.

Document play drummer play 1 0.38 drummer 0.38 1

Le terme « rock » renvoie au terme 22 (like) qui est un terme de rattachement heuristique de groupes prépositionnel (heuristic prepositional phrase attachment) et le programme devrait contenir l‘instruction de continuer jusqu‘au terme auquel renvoie ce dernier qui est le terme 21, à savoir « play ». Cette fois-ci, la distance sémantique donnée par le site LSA est de 0.04 ! Cette métaphore potentielle serait donc repérée par la feuille de style qui calculerait la distance sémantique de chaque terme avec le terme auquel il renvoie, sachant que ce renvoie peut se faire en plusieurs étapes, selon la nature de la relation syntaxique et de la morphologie. Cette méthode et particulièrement efficace dans le dépistage des métaphores in praesentia, ce qui est le motif le plus courant à l‘oral, et notamment pour les métaphores vives :

# Text Baseform Syntactic relation Syntax and morphology 40 some some det:>41 @DN> %>N DET

41 drummers drummer @SUBJ %NH N NOM PL 42 play play obj:>37 @-FMAINV %VA V INF 43 like like ha:>42 @ADVL %EH PREP 44 real real attr:>45 @A> %>N A ABS 45 windy windy pcomp:>43 @<P %NH A ABS

Tableau 9 Visualisation des étiquetages morphosyntaxiques d‘un couple topique-focus

Pour les métaphores in absentia, on peut concevoir calculer le coefficient LSA correspondant à l‘écart entre le terme et le texte comprenant x mots en amont et x mot en aval du terme en question, mais sans espérer une grande efficacité, puisque ce cotexte peut contenir d‘autres métaphores, celles-ci étant souvent réitérées à l‘oral.

3.5.3 Motifs de discours produisant des métaphores : la métaphore comme mutation

Quel que soit le niveau appréhendé entre sens et texte dans la genèse de l‘énoncé oral, la métaphore peut donc être considérée comme une mutation. Ces mutations peuvent être éphémères ou donner naissance à des innovations lexicales. A l‘oral, les données prosodiques contiennent des informations précieuses à ce sujet, et l‘hypothèse est que ces données permettent non plus de dépister les métaphore mais, avec d‘autres indices d‘évaluer la vivacité métaphorique, et donc dans une certaine mesure de trancher si la métaphore est vive ou non (car à l‘extrême, lorsque l‘intonation n‘est plus celle de focus, il n‘y plus aucune vivacité dans la métaphore par définition comme il sera vu dans le chapitre sur la prosodie et la structure informationnelle).

Ces mutations sont très fréquentes à l‘oral, et participent à l‘évolution de la langue. Le contexte franco-anglais semble donc propice à une telle investigation puisque les deux langues se sont éloignées et rapprochées en grande partie par le biais de métaphorisations et d‘emprunts, c‘est à dire d‘utilisations anormales de termes qui d‘un statut de métaphores vives ou d‘emprunt, sont devenues conventionnelles puis lexicalisées.

Bien sûr d‘autres processus tels que les dérivations génère du lexique. Mais la proximité des deux langues à tous les niveaux (morphosyntaxique, culturelle et conceptuelle) rend le contraste intéressant—les différences sont peu nombreuses, ce qui les rends observables.

3.6 Métaphore et comparaison : délimitation des figures à

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