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4. Approche cartographique : étude de la défendabilité par l’analyse a posteriori de cas

4.5. Les résultats

4.5.6. Comparaison de quelques habitations

Le tableau ci-dessous présente, pour quelques cas, la situation des habitations après l’incendie de 2003 et la situation de ces mêmes habitations plus de 10 années après l’incendie.

N° Bâti Situation après le feu en 2003 (crédit photo : F. Joliclercq, EGA)

Situation en 2015

(crédit photo : M. Long-Fournel, Irstea)

202A

202B

204A 204B

43 253

Tableau 10 : Comparaison de situations après le feu de 2003 et en 2015

Sur l’ensemble des 22 habitations étudiées en 2015 dans le cadre de l’étude sur la défendabilité, la plupart était correctement débroussaillée. En particulier, 3 des 4 habitations présentées dans le tableau ci-dessus (202B, 204A et 204B, 253) et ayant subi des dégâts à l’intérieur des bâtis en 2003 présentent un débroussaillement de qualité.

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Conclusion

Nous proposons un modèle multicritère de défendabilité des bâtis d’interface à dire d’experts. Ce modèle a été spécifié sur la base d’une analyse des résultats d’une enquête « web » auprès d’un panel d’experts issus de différents horizons de la lutte contre l’incendie de forêt. Les jugements d’experts sont quantifiés et agrégés par un processus ascendant de hiérarchisation (AHP). La hiérarchie obtenue comporte trois niveaux de critères : le niveau 1 comporte six ensembles de critères principaux : la disponibilité en hydrants, la structure spatiale du bâti dans l’interface, la topographie et le terrain, les différents combustibles stockés à proximité du bâti, l’accès de proximité à l’enjeu, le débroussaillement et l’accessibilité de l’enjeu. Les poids des critères calculés par l’analyse montrent donc sans surprise l’importance prépondérante des équipements spécialisés dans la lutte dans la défendabilité, en particulier l’approvisionnement en eau. Mais les critères d’aménagement collectif (structure de l’habitat) et individuels (stockage de combustibles) sont également susceptibles de faciliter ou de compliquer la défense des enjeux de façon déterminante. Les critères concernant l’entretien de la végétation naturelle sont avant tout des critères d’aléa et de vulnérabilité d’exposition (voir le rapport de l’action 521) : ils ont un poids plus modéré dans la défendabilité en interface, car la masse combustible y est toujours moins compacte qu’au cœur des massifs, et génère donc des feux plus facilement maîtrisables par les services de lutte : contrairement à la défendabilité des massifs, ce sont donc surtout la structure de l’interface et la disponibilité en hydrants qui déterminent le niveau de défendabilité d’une interface.

Les résultats de ce modèle ont été spatialement confrontés aux endommagements subis lors du feu dit « de Vidauban » de 2003, sur la commune de Plan de la Tour. La relation entre les dommages et la defendabilité, pour une même exposition, reste toutefois difficile à mettre en évidence pour plusieurs raisons : la défendabilité évaluée par le modèle reste purement locale, et ne préjuge pas des actions effectives de défense mises en œuvre par les services de lutte au moment du sinistre. Ces actions sont issues des stratégies et des tactiques de lutte spécifiées au sein des états majors et des postes de commandement qui intègrent un grands nombres de paramètres, parmi lesquels la défendabilité locale n’a pas nécessairement une importance centrale. C’est d’autant plus le cas qu’au moment du sinistre, cette défendabilité locale n’était pas précisément connue des services de secours. La défense effective est d’abord et avant tout priorisé en fonction de la « valeur assignée » aux enjeux : la présence, possiblement conjoncturelle, de personnes, et ce d’autant plus si ces personnes sont considérées comme plus vulnérables (enfants, personnes âgées), est toujours heureusement surdéterminante dans la définition des tactiques de lutte et de protection. De plus la défendabilité locale d’un enjeu individuel (un bâti) n’est pas nécessairement très bien corrélée à la

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défendabilité « de zone », par exemple du quartier de commune dans lequel se situe l’enjeu (même si les défendabilités locales des enjeux sont naturellement contributives à la défendabilité de zone). Dans les situations de crise où la défendabilité a pu constituer explicitement ou implicitement un facteur de priorisation des actions de défense effectives, c’est logiquement la défendabilité de zone qui a dû intervenir, plutôt que la défendabilité des enjeux individuels.

Le modèle de défendabilité proposé reste donc d’abord et avant tout un outil d’aide à l’aménagement micro-local des interfaces habitat-forêt, plutôt qu’un outil d’aide à leur défense. Il s’adresse aux aménageurs des territoires locaux et aux résidents, dans le but de faciliter la défense de leur bien en cas de sinistre, sans préjuger de ce que sera sa défense effective dans une telle situation. Il s’agit donc de diminuer la vulnérabilité en augmentant le potentiel de réponse à la crise. Dans une perspective de recherche à base d’études de cas, on souligne la nécessité de l’analyse de la tactique et des actions effectives de lutte pour l’évaluation a posteriori de la défendabilité. Ces informations sont quelques fois disponibles à la suite de feux récents mais sont difficiles à reconstituer de façon formelle pour les feux anciens. Une acquisition formelle et systématique de ces informations, sur la base de protocoles préalablement spécifiés, pourrait se révéler très utile pour l’étude de la défendabilité des enjeux.

Enfin, tout comme la vulnérabilité, la défendabilité des interfaces peut être cartographiée. L’approche spatiale de la défendabilité est une question d’autant plus riche en perspectives de recherche qu’elle se pose nécessairement à deux échelles : l’échelle micro-locale de la défendabilité des enjeux individuels (bâti) et l’échelle « locale » de la défendabilité des zones d’interface, qui comme on l’a vu, est plus déterminante dans l’élaboration « en temps réel » des tactiques de lutte. L’articulation entre ces deux échelles pour la production d’une carte de défendabilité utile tant aux résidents, aux aménageurs qu’aux services de lutte constitue donc une étape ultérieure de la modélisation spatiale de la défendabilité des interfaces.

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References

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