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L’utilisation de ce phylum comme système modèle vise à répondre à un certain nombre de problématiques : comprendre l’émergence, l’élaboration et le déploiement des cascades génétiques qui contrôlent la spécification des axes (Gauchat et al., 2000; Hobmayer et al., 2000; Yanze et al., 2001; Ball et al., 2004; Finnerty et al., 2004;

Lee et al., 2006; Rentzsch et al., 2006), la mise en place des patrons d’expression selon les axes de polarité (Gauchat et al., 2000; Hobmayer et al., 2000; Yanze et al., 2001; Ball et al., 2004; Finnerty et al., 2004; Lee et al., 2006; Rentzsch et al., 2006), la transdifférenciation du tissu musculaire strié (Schmid et al., 1998; Technau and Scholz, 2003) le développement des yeux (Kozmik et al., 2003; Stierwald et al., 2004) ou encore l’alloimmunité (Frank et al., 2001).

I.1.6.1. Les différents modèles de cnidaires utilisés

L’hydre (hydrozoaire) découverte en 1740 par Abraham Trembley, est un modèle historique utilisé entre autre pour l’étude de la régénération dès les années 50 (Sturtevant et al., 1951). Cette espèce est néanmoins un représentant des hydrozoaires hautement dérivé (Collins et al., 2000). En effet, la plupart des

hydrozoaires sont marins et possédent un stade méduse alors que l’hydre est un animal d’eau douce qui ne vit qu’à l’état de polype (Steele, 2002). De plus, la reproduction sexuée chez l’hydre est rare et imprévisible en laboratoire, il est donc difficile d’en étudier le développement embryonnaire. L’embryogenèse de l’hydre implique en plus une période de dormance (Martin et al., 1997). D’autres hydrozoaires sont utilisés en biologie du développement en particulier Podocoryne (Momose and Schmid, 2006) ou Clytia (Momose and Houliston, 2007). Les modèles d’anthozoaires sont principalement Acropora (corail) (de Jong et al., 2006; Shinzato et al., 2008) et Nematostella qui représente le modèle le plus utilisé maintenant avec l’hydre.

I.1.6.2. Avantages et inconvénients du modèle anthozoaire Nematostella

Nematostella (anthozoaire) est un nouveau modèle en pleine émergence ces dernières années (Hand and Uhlinger, 1992; Darling et al., 2005). Cette anémone présente de nombreux avantages pratiques. Les cultures se maintiennent très facilement en laboratoire et la ponte peut être induite une fois par semaine dans des conditions de nourriture, de lumière et de température données. Ainsi les embryons sont disponibles toute l’année (Hand and Uhlinger, 1991, 1992; Fritzenwanker and Technau, 2002). Les œufs sont pondus en grand nombre et leur taille les rend facilement manipulables après retrait de la gélatine (Putnam et al., 2007). Le temps de génération de cet organisme est relativement court. Par ailleurs, Nematostella possède des modalités de développement asexué qui permettent d’étudier l’implication des gènes du développement dans des contextes diversifiés (Burton and Finnerty, 2009). Grâce à la contribution du laboratoire d’Uli Technau nous avons pu développer et maintenir une culture de Nematostella pendant 5 années à Genève.

Nous avons profité des avantages liés à l’induction de la ponte pour mener à bien notre approche fonctionnelle du gène Gsx/Anthox2 au cours du développement embryonnaire de l’animal (II.2. Chapitre 2). D’un point de vue génomique, Nematostella possède un génome relativement compact (environ 450 millions de paires de bases contre environ 1100 chez l’hydre) désormais disponible et annoté (Putnam et al., 2007) dans lequel la plupart des familles de gènes impliquées dans les grandes cascades de signalisation et les processus de développement sont représentées (voir I.1.7., I.2.5., I.3.3.). Ces caractéristiques font de Nematostella un modèle d’étude offrant la possibilité de disséquer des mécanismes fondamentaux représentatifs de l’état primitif des eumétazoaires.

Nematostella présente donc de nombreuses qualités pratiques mais comme tout nouveau modèle, les études descriptives font encore défaults. Il existe maintenant

trois études détaillées de son développement embryonnaire rapportées ci-dessus (voir I.1.5.2.) dont deux réalisée au moyen de la microscopie électronique (Kraus and Technau, 2006; Fritzenwanker et al., 2007; Magie et al., 2007). L’anatomie et le développement de son système nerveux a fait l’objet de peu de publications. L’une, également rapportée ci-dessus (voir I.1.5.4), a décrit à l’aide de marqueurs moléculaires les différents types neuronaux (Marlow et al., 2009). L’autre utilise une approche fonctionnelle pour montrer la fonction de FGF dans le développement de la structure sensorielle apicale de la planula (Rentzsch et al., 2008). Mais il n’existe pas encore d’étude approfondie décrivant les différents types cellulaires constituant Nematostella et les marqueurs cellulaires sont encore peu nombreux. Nous avons mis au point quelques marqueurs de cellules neuronales afin d’analyser le développement du système nerveux dans les premiers jours de développement de l’animal (II.2.

Chapitre 2).

I.1.6.3. Outils génétiques disponibles chez les cnidaires

Des outils génétiques et moléculaires de plus en plus nombreux sont disponibles chez les cnidaires. Ainsi, les génomes de Nematostella (Sullivan et al., 2006; Putnam et al., 2007) et celui d’ Hydra magnipapillata sont maintenant séquencés. En outre, différentes techniques permettant la dissection moléculaire des mécanismes de développement émergent désormais. L’approche hétérologue, d’un intérêt limité pour l’analyse des processus biologiques en place chez les cnidaires, a été mise en œuvre il y a quelques années (Hayward et al., 2002; Kozmik et al., 2003; Rentzsch et al., 2006). Plus récemment, des techniques permettant des études fonctionnelles en système homologue ont été mises au point. Ainsi des expériences de perte de fonction sont réalisables par le biais de l’ARN interférence (Chera et al., 2006) ou de l’injection de morpholinos (Magie et al., 2007; Momose and Houliston, 2007;

Rentzsch et al., 2008). De plus, après la mise en place de techniques d’expression transitoire de constructions exprimant des protéines rapportrices (Bottger et al., 2002;

Miljkovic et al., 2002), il existe désormais des lignées d’hydres transgéniques (Wittlieb et al., 2006; Khalturin et al., 2007). Ces avancées techniques offrent des possibilités d’analyses plus précises des mécanismes développementaux chez les cnidaires, pendant longtemps étudiés seulement à partir de patrons d’expression ou d’analyses phylogénétiques de séquences de familles de gènes conservés. Une partie des cinq années de thèse a été consacrée à la mise au point de la technique d’injection de gènes rapporteurs chez Nematostella permettant l’observation in vivo de l’expression des gènes et l’étude de leur régulation (II.2. Chapitre 2).