• Aucun résultat trouvé

Chapitre II. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

II.2. Les contaminants

II.2.2. Choix des contaminants étudiés

II.2.2.2. Le choix du cation ammonium

L’ammonium (NH4+) constitue un cation majeur présent dans les lixiviats. Comme il

a déjà été noté auparavant, la concentration en ammonium présent dans les lixiviats augmente graduellement après la fin de l’exploitation à cause de la lenteur des processus de minéralisation de l’azote et est maximum après plusieurs années. Pendant la phase acide, les concentrations de la plupart des ions majeurs sont les plus élevées et elles chutent ensuite

pendant la phase de méthanogénèse. Au contraire, la concentration en ammonium déjà élevée n’a pas tendance à diminuer avec le vieillissement de la décharge. Trabelsi et al. (2000) ont notamment montré la forte diminution du rapport C/N dans les lixiviats avec le temps. L’ammonium est principalement produit par la dégradation des protéines et son élimination ne peut se faire que par lessivage, car aucun processus de minéralisation (en NO3- ou N2) n’est possible pendant la phase de méthanogenèse. Les auteurs (Belevi et

Baccini, 1989 ; Ehrig, 1990 ; Robinson, 1991 ; Dockhorn et al., 1997 ; Christensen, 2001 ; Öman et Junestedt, 2008) sont unanimes pour mettre en évidence la forte concentration en ammonium dans le lixiviat. Koenig et Liu (1997) reportent même des concentrations record de 8400 mg/L dans des lixiviats de centre de stockage de Hong Kong. De plus, cette concentration reste élevée pendant des décennies. Notamment pour ces raisons, Kjeldsen (2002) l’a décrit comme le plus durable des polluants majeurs sur le long terme parmi les composés inorganiques majeurs. Des études ont estimé que l’émission d’azote sous plusieurs formes dans les lixiviats durait de nombreuses années après la fermeture du site. Leikam (1996) estime par exemple entre 120 et 450 ans les rejets d’azote au sein du lixiviat, Kruse (1994) à 815 ans et Kruempelbech et Ehrig (1999) à des centaines d’années. Öman et Junestedt (2008) ont de plus noté que malgré la présence occasionnelle d’autres composés nitrés dans les lixiviats (nitrate, nitrite ou composé organique nitrogéné), la plus grande fraction de l’azote présent est sous forme d’ammonium. Selon la nature du centre de stockage, Trabelsi et al. (2000) ont montré qu’entre 70 et 85% de l’azote total dans les lixiviats est sous forme d’ammonium.

De nombreuses études mettent en avant la nécessité de s’intéresser de près au traitement de l’ammonium. Chen et al. (1997) mentionnent déjà la diminution de la quantité d’azote comme la priorité dans le traitement des lixiviats. De plus, l’ammonium peut avoir un impact environnemental très néfaste en raison de sa toxicité. Il a notamment été reconnu comme l’un des contaminants majeurs des nappes phréatiques par l’Environment Agency (1996). Dans les réserves d’eau potable, NH4+ peut réduire l’efficacité de la désinfection,

conduire à la formation de nitrite ou encore provoquer des problèmes de goût et d’odeur (World Health Organization, 1993). L’ammonium est classé comme une substance de Liste II sur la Groundwater Directive (80/68/EEC) et sur la Dangerous Substances Directive (76/464/EEC). De plus, l’ammoniaque (NH3) est en équilibre chimique avec l’ammonium

(pKa=9,24 à 25°C) et a été défini comme très toxique pour les organismes aquatiques (US EPA 1984, 1989). L’ammoniaque a pour cette raison été reporté comme la cause première de

toxicité des centres de stockage dans des travaux précédents (Ernst et al., 1994 ; Clément et

al., 1997).

Pour ces raisons, il est aussi intéressant de noter que de nombreux auteurs se sont intéressés à mettre au point des procédés pour diminuer cette forte concentration afin de réduire les risques de contamination. Les contaminants azotés peuvent ainsi être éliminés avec des méthodes physico-chimiques ou biologiques. Les traitements physico-chimiques les plus utilisés sont l’extraction d’ammonium et la précipitation chimique (Cheung et al., 1997 ; Kurniawan et al., 2006). D’un point de vue biologique, l’ammonium est traditionnellement extrait des centres de stockage des déchets par des systèmes conventionnels de nitrification autotrophique / dénitrification hétérotrophique (Horan et al., 1997 ; Vives et al., 2004 ; Laitinen et al., 2006). Cependant, l’extraction par traitement biologique de l’azote présent dans les centres de stockage des déchets est difficile en raison de la grande concentration d’azote sous forme ammonium et de la faible biodégradabilité de la matière organique. Récemment, d’autres méthodes de nitrification ont également été développées (Van Dongen et al., 2001 ; Ganigué et al., 2007, Cabeza et al., 2007). Les nitrites et les nitrates formés par nitrification aérobique du NH4+ sont dégradés en azote (N2)

sous conditions anaérobiques (Buss et al., 2004).

L’ammonium peut interagir avec les argiles par échange d’ions et, de ce fait, avoir une influence sur leur texture et leur perméabilité (Gaucher et al., 2006). La séquence de sélectivité de l’échange ionique par les smectites décrite par Stumm (1992) et Mc Bride (1994), puis reprise par Domenico et Schwartz (1998) et Malfoy (2003) montre la séquence suivante : Al3+>Ca2+>Mg2+>NH4+>K+>Na+>Li+. Parmi les cations monovalents, un échange

naturel des autres monovalents présents dans l’espace interfoliaire est très facilement possible. De plus, Guyonnnet et al. (2005) ont mis en évidence que la préhydratation de l’argile avec un fluide semble favoriser l’accès des NH4+ dans les sites d’échange pendant le

contact avec les lixiviats. Le fond du site de stockage étant un milieu saturé, l’échange sera donc facilité. Pivato et Raga (2006) ont montré que l’adsorption d’ammonium dans les bentonites, compactées ou non, est grande et conseille l’utilisation de ce matériau dans le fond des sites de stockage pour limiter la pollution par l’ammonium.

Notre étude s’est portée sur le cation NH4+ et plus particulièrement sur une argile

appréhender les comportements de cette argile modèle en présence de molécules diverses. En effet un échange cationique naturel peut être envisagé entre les cations originellement présents dans la barrière argileuse (majoritairement le calcium, le sodium et le potassium) et l’ammonium.

Conscient de la diversité des cations présents dans les lixiviats et de la compétition qu’il va exister entre ces différentes espèces, il est évident que l’échange total avec les cations ammonium ne pourra pas être atteint dans les conditions naturelles. Cependant, pour mieux comprendre les mécanismes, il est préférable d’étudier une argile totalement échangée NH4+. Les échanges cationiques ont été réalisés avant de mettre l’argile en interaction avec

les molécules organiques.