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2. Fondements théoriques

2.2. Contexte littéraire : le conte

2.2.1.2. Caractéristiques du conte

De nombreux chercheurs se sont penchés sur la question du conte et ont élaboré, selon leur approche, une méthodologie différente. Nous avons rassemblé des bribes de méthodologie pertinentes pour notre analyse. Nous avons suivi les observations de Max Lüthi (2004) sur les caractéristiques communes des contes européens. Notre sous-chapitre s’organise comme suit : nous parlons d’abord du schéma narratif, puis des personnages et des objets caractéristiques du conte et finalement, nous abordons le thème du style des contes.

Commençons par analyser le schéma narratif du conte. Max Lüthi (2004 : 25) a en effet établi un schéma narratif que suivent généralement les contes : difficultés, combat pour surmonter les difficultés et dénouement heureux. La fin heureuse est l’une des caractéristiques principales des contes. Nous pouvons également relier ce schéma à l’approche structuraliste de Vladimir Propp. En effet, les structuralistes « […]

s’intéressent aux composantes structurelles sous-jacentes du genre […]. » (McCallum 2000 : 18, notre traduction). Stein ajoute : « Propp viewed the fairy tale morphologically, that is, in terms of its component parts and their relationship to the overall structure of

tale » (Stein 2000b : 168). La structure étudiée par Propp s’organise donc comme suit :

« [h]e suggested that “any narrative can be a wonder tale that develops from an act of injury or state of lack, through mediating functions, to an eventual wedding or other concluding function” » (Stein 2000b : 168). Nous retrouvons ici la même structure que celle proposée par Max Lüthi, à savoir une situation difficile et la remédiation à cette situation qui se solde par un dénouement heureux (en général un mariage). Par ailleurs, à la fin du conte, le héros tire un enseignement de ces aventures (Larousse encyclopédique 2015). Cet enseignement, souvent appelé morale, est caractéristique du conte.

Un autre trait commun des contes et qui est lié au schéma narratif concerne les thèmes récurrents, qui sont les suivants : « Widerstreit von Schein und Sein, Verkehrung der Situation in ihr Gegenteil, Sieg des Kleinen (bzw. Schwachen, Unscheinbaren) über das Große (bzw. Mächtige, Bevorzugte), Selbstschädigung » (Lüthi 2004 : 26). Ces thèmes communs sont également énoncés par Ellis Davidson (2006 : 57), qui parle de

« […] passage de la pauvreté à la richesse, mariage avec une personne issue de la classe supérieure, et le triomphe du bien sur le mal, ou de l’apparente faiblesse sur la force écrasante » (Ellis Davidson 2006 : 57, notre traduction). Ce schéma narratif et ces thèmes communs servent l’objectif des contes, à savoir « […] éveiller en nous un sentiment de respect envers la vie, vie qui peut être modifiée grâce à une intervention magique afin de compenser le manque de pouvoir, de richesse et de plaisir rencontré par la majorité des gens » (Zipes, 2000 : xviii, notre traduction).

Les personnages du conte ont également des traits communs. Selon Lüthi (2004 : 27), les personnages caractéristiques des contes sont : le héros, l’acolyte du héros (que ce soit un conseiller ou une personne qui l’aide indirectement), le faux héros (le personnage jaloux, l’usurpateur, etc.) et le personnage sauvé ou délivré par le héros. Les personnages vivent dans un monde manichéen ; ils sont soit bons soit mauvais, soit beaux soit repoussants (il arrive également d’avoir une opposition beau/laid à l’intérieur du même personnage ; c’est notamment le cas de Cendrillon à la maison et Cendrillon au bal) (Lüthi 2004 : 27). De plus, « […] ils correspondent à des types caractérisés par un trait dominant et sont dépourvus de toute profondeur psychologique » (Larousse encyclopédique 2015) : les hommes et les femmes bons sont beaux, gentils et bienveillants, alors que les vilaines marâtres, sorcières et autres ogres sont hideux et méchants (Ellis Davidson 2006 : 57). Grâce aux catégorisations claires des

personnages, le lecteur peut facilement s’identifier à ces personnages et ainsi, adapter le conte à sa propre expérience et par là, réaliser l’objectif du conte (Zipes 2000 : xvii). En plus de ces personnages communs, les contes ont un autre trait commun : la personnification d’objets et d’animaux. En effet, il arrive souvent qu’un objet, ou un animal qui parle, intervienne auprès du héros (Lüthi 2004 : 27). Cette personnification représente l’élément magique caractéristique du conte.

Finalement, la simplicité du genre narratif est également une caractéristique commune des contes. Comme mentionné dans la définition, le conte est un récit simple (Bottigheimer 2006 : 57). Cette simplicité permet l’accès aux textes au plus grand nombre et surtout, elle permet de multiples interprétations (Ellis Davidson 2006 : 10).

Tout est simplifié : les personnages sont simplement définis, en étant classés dans des catégories simples (méchant vs gentil, beau vs repoussant, etc.), la structure du récit est simplifiée (difficultés à surmonter, difficultés surmontées, bonheur du protagoniste principal) et la syntaxe est simple. Par ailleurs, il n’y a que très peu de descriptions dans les contes (Lüthi 2004 : 29-30). Les descriptions des sentiments intérieurs des personnages ainsi que l’environnement de ces derniers (famille, paysages, village) ne trouvent pas leur place dans le conte (ibid. : 30). Au contraire, seul ce qui a trait au cheminement du héros est rendu clairement visible au lecteur (ibid. : 30). Cependant, si la narration est simple, le langage du conte, lui, est empreint d’exagérations, de métonymies, de comparaisons et de métaphores (Jones 2002 : 12). Pour Jones, « […] les contes parlent le langage de l’inconscient. » (Jones 2002 : 11, notre traduction). Par ailleurs, les contes débutent souvent par une formule fixe, qui permet de marquer le caractère mensonger ou intemporel du récit (Larousse encyclopédique 2015). Le meilleur exemple est le fameux Il était une fois, qui marque le caractère intemporel du récit qui va suivre (ibid.).

En résumé, nous avons présenté ici les caractéristiques du conte que nous avons jugées importantes et pertinentes pour l’analyse de notre travail, à savoir : le schéma narratif répétitif, les personnages simples, caractérisés par des attributs simples (bon/mauvais, beau/moche, etc.) et finalement, un langage empreint de métonymies, comparaisons et métaphores.