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c Les avantages des modèles de zone cohésive par rapport à la

I.3 Les modèles de zone cohésive

I.3.1. c Les avantages des modèles de zone cohésive par rapport à la

Les avantages présentés ci-dessous proviennent en grande partie de la différence suivante(3): la mécanique de la rupture s’intéresse à la définition de critères de propagation, alors que les approches micromécaniques — auxquelles appartiennent les modèles de zone cohésive — s’in-téressent à la recherche de lois de comportement pour la fissuration. La possibilité d’amorçage de fissure et de suivi de leur propagation découle de cette connaissance de l’état du système pour chaque valeur des variables de la fissuration (champs de la discontinuité de déplacement le long de la fissure,. . .). Ainsi, parmi les alternatives à la mécanique de la rupture présentées au paragraphe I.2, celles qui sont les plus proches des modèles de zone cohésive sont les ap-proches micromécaniques (mécanique de la rupture ductile, mécanique de l’endommagement surfacique).

L’amorçage des fissures L’amorçage des fissures est possible avec les modèles de zone co-hésive. Elle émerge naturellement des trajets de chargement et des caractéristiques du

com-(3)voir REMARQUE(I.3)

portement de la zone cohésive sans hypothèses ad hoc supplémentaires concernant un critère d’amorçage. Sur ce point, les avantages des modèles de zone cohésive par rapport aux alterna-tives à la mécanique de la rupture sont les suivants :

1. La notion de zone cohésive offre la possibilité d’un suivi continu de la propagation de fissure (sous réserve d’hypothèses données au chapitre III) ; ce que ne permettent pas les critères d’amorçage basés sur des bilans énergétiques incrémentaux.

2. Le coût numérique de l’utilisation des modèles de zone cohésive est lié à celui des itéra-tions d’équilibre nécessaires pour l’application de condiitéra-tions aux limites qui dépendent de la solution :

σ·n = R([u]) sur les lèvres de la fissure.

Ce coût est cependant plus modeste que celui des méthodes de recherche de l’état de fissuration qui minimise l’énergie E(Γ, U) de (I.39) (voir [BOURDINet al., 2000]).

3. En ce qui concerne la mécanique de la rupture ductile, des modifications successives du modèle de GURSON[1977] ont été proposées ([TVERGAARD, 1981 ; MATHURet al., 1996] pour des versions locales du modèles et [LEBLOND et al., 1994 ; TVERGAARDet NEED

-LEMAN, 1995] pour des versions non locales). Elles ont conduit à des simulations numé-riques de croissance-coalescence de cavités et de propagations de fissures dans les ma-tériaux ductiles tout à fait conformes aux observations expérimentales [TVERGAARD et NEEDLEMAN, 1984] ou d’intérêt prospectif évident [TVERGAARDet NEEDLEMAN, 1995, 1997 ; NEEDLEMANet TVERGAARD, 1998]. Ces modèles ne permettent cependant pas vé-ritablement d’amorçer la fissuration : les fissures se propagent soit à partir de préfissures, soit à partir de microcavités (matériaux poreux par exemple).(4)

4. En mécanique de l’endommagement, la notion d’évolution de l’endommagement — comme celle de la porosité dans le modèle de Gurson — est liée à l’adoucissement du comportement. Cette notion est essentielle dans les modèles de zone cohésive (la force de résistance sur les lèvres de la fissure doit s’annuler pour une ouverture de fissure suffisamment grande). Ces deux modèles sont donc relativement proches. Les modèles de zone cohésive ont l’avantage de réintroduire la notion de surface de rupture. Ainsi l’adoucissement présent dans ces modèles est qualifiable d’endommagement surfacique. La fissure est alors une surface matérielle, c’est-à-dire une surface ayant un comportement thermodynamique propre. Ce caractère endommageable est fortement marqué dans le modèle de zone cohésive présenté au chapitre II.

(4)Une voie de recherche intéressante serait d’associer un modèle de zone cohésive (dont les paramètres peuvent être issus de travaux atomistiques) pour amorçer la création de cavités à un modèle de type Gurson modifié pour le calcul de la croissance et de la coalescence des cavités ainsi créées. La propagation de la microfissure résultant de cette coalescence peut ensuite s’opérer via un modèle de zone cohésive dont les paramètres sont issus cette fois-ci de l’analyse micromécanique précédente.

L’évolution temporelle des trajets de fissuration Le suivi temporel des fissures est un point délicat des modèles de zone cohésive comme en mécanique de la rupture [CHABOCHEet al., à paraître]. Cependant, l’approche par zones cohésives permet une étude fine des propaga-tions instables de fissure (voir chapitre III). Une condition d’unicité pour les problèmes quasi-statiques de fissuration de solides élastiques par des modèles de zone cohésive a ainsi pu être obtenue par l’auteur (voir théorème III.1). La rapidité d’adoucissement du comportement de la zone cohésive (constante de Lipschitz de la courbe contrainte-saut de déplacement) est un paramètre essentiel de cette condition d’unicité. Ainsi, pour un problème donné, il est possible d’adapter le modèle de zone cohésive pour garantir une propagation stable des fissures. Cette adaptation peut se faire soit par une modification des coefficients du modèle (augmentation de l’ouverture critique δC en particulier), soit par l’introduction d’ingrédients physiques supplé-mentaires dans le comportement cohésif [MONERIEet al., 1998 ; MONERIE et RAOUS, 2000] : viscosité [FRÉMOND, 1985], formulation dynamique,. . .

L’évolution spatiale des trajets de fissuration Le suivi spatial des fissures est évident aux in-terfaces : l’interface entre deux matériaux est une surface de “guidage” pour les fissures. En ce qui concerne la fissuration des solides eux-mêmes, aucun critère de branchement n’est néces-saire dans le cas d’une fissuration par des modèles de zone cohésive. Il s’agit d’un avantage fort par rapport à la mécanique de la rupture. L’idée, largement détaillée dans [XUet NEEDLEMAN, 1994 ; XUet al., 1997], est de considérer chaque point d’un maillage éléments finis comme une “zone” cohésive. Comme dans le cas des zones cohésives surfaciques, le trajet de fissuration résulte naturellement du chargement. L’utilisation de cette méthode reste cependant délicate : la dépendance de la fissuration au maillage nécessite l’utilisation de maillages extrêmement fins et “isotropes”. Ce thème de recherche mérite une attention particulière.

Les conditions de bords Ces conditions ne sont évidemment plus des conditions de bords libres dans le cas des modèles de zone cohésive. Ces modèles permettent la prise en compte de nombreux phénomènes physiques sur les lèvres de la fissure : frottement, usure, contact unilatéral, etc (voir modèle proposé au chapitre II).

En conclusion, la notion de zone cohésive se révèle être extrêmement efficace dans l’analyse de l’amorçage et de la propagation des fissures, que ce soit aux interfaces entre constituants ou dans les solides eux-mêmes. Elle permet notamment de pallier certaines lacunes de la méca-nique de la rupture et offre la possibilité d’introduire davantage de physique dans le processus de fissuration (temps d’activation, usure, frottement,. . .). Cette notion présente cependant une difficulté : la nécessité de définir une longueur caractéristique. Cette nécessité est liée à l’ab-sence de notion de déformation sur la surface matérielle, remplacée par celle de discontinuité de déplacement. Cette longueur caractéristique peut être par exemple la taille de la zone d’élabo-ration de la fissure ou l’épaisseur de l’interphase séparant les constituants des matériaux

posites. Il est d’ailleurs fréquemment avancé que la notion de surface matérielle de fissuration convient mieux aux matériaux fragiles. Elle convient en réalité à tous les matériaux présentant une zone d’élaboration de fissure petite devant la longueur de fissure (voir l’hypothèse 1 de Barenblatt) : matériaux à plasticité très localisée par exemple.

Les avantages de la notion de zone cohésive sont d’autant plus intéressants qu’elle permet des bilans énergétiques identiques à ceux proposés par la mécanique de la rupture, ainsi que nous le soulignons dans le paragraphe suivant.

I.3.2 Le lien entre les modèles de zone cohésive et la mécanique de la rupture