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1. CHOIX MÉTHODOLOGIQUE

4.5. Des arguments au détriment de l’oral

4.5.1. Le cours dialogué

Dans la séance de l’enseignant EB3, nous assistons à un cours dialogué, les apprenants participent oralement (Cf. à l’extrait ci-après). Mais cette façon classique, dont cet enseignant EB3 se sert, pour conduire son cours, présente certaines limites dans la prise en compte efficace du travail oral des apprenants.

En effet, la participation orale (dans cette séance) se résume souvent à des réponses courtes aux questions choisies et posées par l’enseignant. Dans ce cas, seuls les apprenants les plus à l’aise en maîtrise des savoirs scolaires participent réellement. Comme le souligne cet extrait receuilli de l’appendice [A] en annexe.

76 38. Me: les autres! Les autres! Seulement quatre 88- Me: il y’a quatre élèves qui parlent!

139- Me: le même élève!

On remarque que, les apprenants timides, ne prennent pas la parole alors qu'ils ont probablement des choses à dire. Les apprenants leaders monopolisent la parole. Les apprenants ayant peu de confiance en eux restent muets ou fuient la situation.

4.5.2. Interventions contraignantes

Une enquête de M.Joulain (1990)[44] portant sur le dialogue maîtresse-enfants en maternelle révèle que 53 % des séquences dialogales se réduisent à un échange; 25% à deux échanges; 14 % à trois; 8 % se ulement dépassant les quatre...les séances de langage proprement dites contenant à 70 % des séquences à deux tours de parole. Ce n’est pas seulement le nombre d’enfants qui produit cet effet mais la nature des interventions de l’enseignant. Elles sont de deux ordres, l’un pédagogiq ue, l’autre d’autorité.

Dans cette tradition constituée, sur le plan pédagogique, l’enseignant fait progresser sa séance par un habile jeu de questions-réponses. La question peut être adressée collectivement à la classe ou nominativement, le résultat reste le même. L’enseignant dirige et l’apprenant doit suivre: « tu ne suis pas », « répète ma question? ».L’apprenant finit par s’adapter à ce mode de fonctionnement. D’ailleurs, les exemples pris en petite section (Cf. aux trois séances transcrites concernant les enseignants (E3A, E3B, E3C, appendice [A] en annexe), consolident bien notre argumentation.

Me: on lève les doigts > El: avec du bois

Me: Non, fais une phrase!

176. Me: relis tu as fais, une faute

178. Me: il y a une faute, reprends la phrase 182- Me: répète >

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77 186- Me: relis les cons-ti- tu- ants

196- Me: tu ne suis pas c’est normal! oui

201- Me: reprends, reprends, reprends, il y’a une faute

126. Me: malgré! Votre camarade vient de faire une faute, malgré on a, non, pourquoi? Corrigez votre camarade

149. Me: malgré! Il vient de faire une faute, corrigez le. Malgré que/ il y a la route, la route qu’est ce qu’elle a? / continue la phrase

Ainsi la majorité des actes de langage de l’enseignant ont pour fonction de remettre l’apprenant à sa place pour qu’il n’intervienne que lorsqu’il en a l’autorisation. Il s’agit de maintenir la discipline. Cette habitude est tellement ancrée que si les apprenants avaient un jour l’envie de travailler en ateliers, l’enseignant aurait toujours l’impression qu’ils parlaient « trop fort».

En résumé, l’usage de ces deux types d’interventions (question-réponse et maintient de la discipline) organisent un type particulier de communication où l’apprenant ne peut ni construire son apprentissage sur un oral participatif entre pairs ni se construire en tant qu’apprenant en dehors d’une soumission passive à l’autorité imposée et à un dialogue inégal avec son enseignant.

4.5.3. Interaction orale ou oral scriptural Extrait: E4A

184. Me: ça y est, dans un petit paragraphe de quatre phrases, cinq phrases pas plus alors vous allez nous dire comment vous aidez vos parents chaque jour ou bien occasionnellement ça y est rapidement.

185. Me: l’élève qui peut euh // qui peut dire // ça oralement donc il lève le doigt si non je vous laisse cinq minutes jusqu’à sept minutes pour écrire ça sur une feuille.

186. Me:ça y est, sept minutes pas plus hein sur une petite feuille,

205. Me: alors on s’arrête ça y est, on va se contenter de ce que vous avez réalisé, alors qui veut parler? Alors, qui veut nous lire son essai? C’est un essai, hein même s’il y a des fautes.

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En analysant les pratiques langagières orales, cet extrait de la 4ème année moyenne, concernant l’enseignant E4A, nous permet de constater que:

« L’école est le lieu où l’on traitre la parole des apprenants comme la combinaison d’une syntaxe et d’un vocabulaire ». [45]

La légitimité de ce constat, émane du comportement de l’enseignant E4A, en achevant sa séance de production orale, cet enseignant préconise aux apprenants d’aller vers la rubrique « je vais vers l’expression écrite», où ils vont essayer de reformuler et récapituler sous forme d’un résumé scriptural. Ce résumé sera oralisé par une lecture à haute voix; une démarche, que nous pensons, n’engage pas l’ensemble de la personne et focalise l’attention sur le débit, l’articulation ou les mouvements du regard.

En outre, cette dernière situation, même si elle utilise un médium oral, présente beaucoup d’analogies avec l’écrit, puisque les apprenants peuvent effacer, recommencer et se réécouter comme ils le font à l’écrit.

4.5.4. Volume horaire

Un autre obstacle à l’enseignement/apprentissage de l’oral est constitué par le temps nécessaire à cet enseignement, à la fois dans le temps des pratiques de classe et dans le travail personnel de l’enseignant.

Dans le temps des pratiques de classe, l’effectif actuel des divisions du moyen, oscillant entre la fourchette (30-35) ne permettra qu’un passage très occasionnel des interactions et des interventions des apprenants. D’autant plus que les enseignants ont l’illusion que, pour que les apprenants réussissent à l’oral, il faut qu’ils participent, or, l’analyse détaillée des prises de parole recueillies lors des séances enregistrées, montre que, dans ce cas, les apprenants ne produisent que des bribes qui s’insèrent dans la parole magistrale de l’enseignant.

Nous ne pouvons dire par ailleurs que les enseignants n’ont jamais pensé à intégrer de façon pleine et entière cette activité dans leur pratique. EIle est ressentie comme une perte de temps pour les enseignants (parler pour ne rien dire).

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