• Aucun résultat trouvé

6/:,4'*+&;'(;(+242(1+&'5=*14*+&'*1(,3*..*14&./(,42..:ge conceptuel avec lequel on peut envisager de travailler la dimension sociale de la cour. Parmi elles, la notion de communauté

1 B. GUILLEMAIN, +'" .)6&" 1)*0/C/.'2," #$%@/(*)*" JK_M`-K_aLN8" P06#," #$6*," -)./P0P, Paris, De Boccard, 1962, p. 38.

2 Ibid., p. 39.

3 A:&O:1:.2+:42(1&9*&=*44*&)('H,.*&9:1+&./N2+4('2(7':;N2*&45H(271*&,1*&)(2+&*1=('*&9*&./2H;('4:1=*&9*+&53(.,42(1+& ;'(3(J,5*+&;:'&.:&;'(;(+242(1&9/:1:.B+*&+(=2(.(72J,*&9*&$('O*'4&D.2:+%&;:'-delà la question de la validité de la .*=4,'*&9*&.:&=(,'&J,/2.&;'(;(+*K

45

émotionnelle forgée par Barbara Rosenwein, dans le cadre du développement récent de ./N2+4(2'*&9*+&5H(42(1+&:,&C(B*1&z7*1%&J,/*..*&;'(;(+*&9/:;;.2J,*'%&*14'*&:,4'*+%&-&.:&=(,'K

A*+& =(HH,1:,45+& 9/5H(42(1+& +(14& .:'7*H*14& .*+& HUH*+& J,*& .*+& =(HH,1:,45+& +(=2:.*+& y familles, voisinages, syndicats, institutions académiques, monastères, usines, casernes, cours princières2.

La notion, précisée au fil des publications de Barbara Rosenwein, est synthétisée par Damien Boquet de la façon suivante :

Les communautés émotionnelles sont superposables aux communautés sociales (famille, voisinage, parlements, corporations, monastères, etc.) dont elles constituent un aspect ou une façon de les =(1+295'*'& +(,+& ./:17.*& 9*+& '*.:42(1+& :))*=423*+K& A*+& =(HH,1:,45+& 5H(42(11*..*+& +(14& 9(1=& .*& ):24& 9*& =(1+295'*'&,1&7'(,;*&+(=2:.&;:'&.:&):V(1&J,/2.&:&9/53:.,*'&.*+&5H(42(1+%&9/*1&;'(H(,3(2'&=*'4:21*+%&9/*1& déclass*'& 9/:,4'*+%& 9:1+& .*+& 1('H*+& J,/2.& +,24& J,:14& -& .:& H:12I'*& 9(14& .*+& 5H(42(1+& 9(23*14& U4'*& exprimées. Dit autrement, tout groupe de personnes animées par des intérêts et des objectifs communs peut être qualifié de communauté émotionnelle3.

La réception rapide assurée en France à cette proposition par les acteurs du programme de recherche « EMMA : Les émotions au Moyen Âge »4, est allée de pair avec ,1*&21P(1=42(1&-&+/*H;:'*'&9*&=*&=(1=*;4%&,1&k discours de la méthode » « +/2H;(+}:14~&-&4(,+& les historiens po,'&.*,'&':;;*.*'&J,/2.&1/*+4&;:+&9*&7'(,;*&+(=2:.%&*4&9(1=&;:+&9/N2+4(2'*&+(=2:.*%& +:1+&92+=(,'+&*4&,+:7*&9*&./5H(42(15 ». Un accueil aussi enthousiaste fait naître les questions suivantes : la cour est-elle une communauté, voire une communauté émotionnelle ? La communauté émotionnelle permet-elle de penser la cour ?

A/:+;*=4& .*& ;.,+& +42H,.:14& 9*& =*+& J,*+42(1+& *+4& 9*& +*& =(1)'(14*'& -& ./NB;(4NI+*& 9*& .:& =(,'&=(HH*&=(..*=423245%&(,&O2*1%&;,2+J,*&=/*+4&9*&=*.:&J,/2.&+/:724%&=(HH*&k communauté ». Ce terme conduit *1& *))*4& -& =(1+295'*'& .:& +(=2545& =,'2:.*& *1& 4:14& J,/*1+*HO.*& '*.:423*H*14& cohérent, qui fait corps, et qui partage une expérience commune. On peut, dans un premier 4*H;+%& =(1+295'*'& J,*& =/*+4& ,1*& :;;'(=N*& ;:'*14*& 9*& =*..*& J,2& *132+:7*& .:& =(,'& =(HH*& entour:7*& 953(.,& :,& +*'32=*& 9,& '(2K& A/,12=245& 9,& O,4& :++2715& -& ./*14(,':7*& 9:1+& .*& +*'32=*&

1 B. ROSENWEIN, Emotional communities in the early Middle Ages, Ithaca, Cornell University Press, 2006 ; K. OSCHEMA, Freundschaft und Nähe im spätmittelalterlichen Burgund : Studien zum Spannungsfeld von

Emotion und Institution, Cologne, Böhlau, 2006.

2 B. ROSENWEIN, « Problems and Methods in the History of Emotions », Passions in Context : Journal of the

History and Philosophy of the Emotions, 2010, n° 1, p. 11, en ligne, http://www.passionsincontext.ed/.

3 D. BOQUET, « Le concept de communauté émotionnelle selon B. H. Rosenwein », BUCEMA : Bulletin du

.,*0&,"#$P06#,-"3P#/P@'2,-"#$%6b,&&,, hors série n° 5, p. 2, en ligne, http://cem.revues.org/12535.

4 Ce programme de recherche, porté par Damien Boquet (UMR 7303 y TELEMME) et Piroska Nagy (Université du Québec à Montréal), est particulièrement bien documenté par un riche carnet de recherche sur la plateforme Hypothèse : http://emma.hypotheses.org/

5 D. BOQUET, « Le concept de communauté émotionnelle selon B. H. Rosenwein », BUCEMA : Bulletin du

46

9(H*+42J,*&*4&.:&7*+42(1&9*+&:)):2'*+&9*&./R4:4%&:21+2&J,*&.:&92H*1+2(1&=(..*=423*&9/,1*&7':19*& partie de la vie à la cour, contribuent indéniablement à « faire communauté ».

S*;*19:14%& 9:1+& ,1& 9*,M2IH*& 4*H;+%& .:& 92H*1+2(1& 9*& .:& =(HH,1:,45& 9/2145'U4+& J,2& sous-tend la définition du terme vient brouiller cette tentative de penser la cour comme une communauté. En effet, on ne saurait postuler que les individus qui composent la société curiale partagent tous les mêmes intérêts ; au contraire, on est porté à supposer que les rivalités individuelles ou collectives structurent au moins autant cette société que les =(HH,1:,45+& 9/2145'U4+& J,2& ;(,3:2*14& +/B& 9*++21*'K& A*+& ;(++2O2.245+& 9/:+=*1+2(1& +(=2:.*& ())*'4*+& ;:'& .*& +*'32=*& 9*& ./Nb4*.%& =(HH*& .*+& 21+424,42(1+& 9*& 7(,3*'1*H*14%& ='5*14& nécessairement à la cour des logiques de compétition, comme celle pour la faveur princière1, troublant ce qui pourrait ou devrait être un fonctionnement communautaire harmonieux. La possibilité même de la distinction de certains individus par la seule faveur du roi subvertit ./295*&9*&=(HH,1:,45K&$2=(.:+&.*&W(,M%&-&;'(;(+&9,&q#@e siècle, a décrit la faveur comme une :

situation de pouvoir informel ne reposant ni sur le statut social ni sur les charges officielles, mais sur un lien dilectif traduisant une relation volontaire et affective avec des personnages choisis2.

6:1+&.*&=:+&9*&.:&=(,'&9,&C:71:12H*&-&$:;.*+%&9/:,4'*+&5.5H*14+&J,2&)*'(14&./(OP*4&9*& dével(;;*H*14+&;*,3*14&HUH*&=(19,2'*&-&'5=,+*'&./295*&9/,1*&=(HH,1:,45&9,&;(214&9*&3,*& des curiaux Q&.:&923*'+245&1:42(1:.*&9*+&;*'+(11*+&:,&+*'32=*&9,&'(2&*+4&-&./('2721*&9*&.271*+&9*& fracture dans la société curiale, et de manifestations de xénophobie. Néanmoins, il est indéniable que du point de vue du prince, la cour doit « faire communauté » à son service ; =/*+4&;(,'J,(2&2.&*+4&;*,4-U4'*&;.,+&;'5=2+%&:,&.2*,&9/:++2H2.*'&.:&=(,'&-&,1*&=(HH,1:,45%&9*& =(1+295'*'&J,*&.:&=(HH,1:,45&*+4&*1&J,*.J,*&+('4*&./N('2Z(n idéal de la cour.

Quant à la communauté émotionnelle comme « groupe de personnes animées par des intérêts et des objectifs communs » et partageant une même évaluation de certaines émotions :,&954'2H*14&9/:,4'*+%&(1&1*&+:,':24&:))2'H*'&+:1+&954(,'+&J,*&.: cour en forme une. Mais à 1(,3*:,%&(1&;*,4&;'(;(+*'&./295*&+*.(1&.:J,*..*%&;(,'&.*&;'21=*%&=/*+4&,1*&;*'+;*=423*&;(.242J,*& +(,N:24:O.*&J,*&9*&9(4*'&9/,1&.:17:7*&=(HH,1%&9/,1&=(H;('4*H*14&=(HH,1%&9/5=N*..*+&9*&

1 F. FORONDA, « La privanza ou le régime de la faveur : autorité monarchique et puissance aristocratique en Castille (XIIIe-XVe siècle) », thèse de doctorat inédite dirigée par C. Gauvard, soutenue en 2003 -&./0123*'+245& Paris I-Panthéon-Sorbonne. ]& ,1*& ;5'2(9*& ;.,+& 4:'923*& *4& *1& <':1=*%& ./:1:.B+*& 9*& Nicolas Le Roux de « ./5=(1(H2*&9*& .:& ):3*,' » royale et de ses conséquences sur les conceptions du pouvoir royal est tout à fait éclairante : N. LE ROUX, La Faveur du roi : mignons et courtisans au temps des derniers Valois (vers 1547-vers

1589), Seyssel, Champ Vallon, 2001.

47

valeurs communes les individus qui composent s:&=(,'K&A:&H5H(2'*&N,H:12+4*&9/".;N(1+*&.*& Magnanime, façonnée par Antonio Beccadelli, mettant en scène le roi inspiré par la lecture des Anciens comme instance de définition de la norme des comportements à la cour, peut 9/:2..*,'+&U4'*&21+='24*&9:1+&,1&4*l processus1K&@.&):,4&9(1=&O2*1&92+4217,*'&./:1:.B+*&9*&.:&=(,'& 9:1+& 4(,4*& +:& 923*'+245& +(=2:.*%& 4*..*& J,/(1& ;*,4& *++:B*'& 9*& .:& '*=(1+424,*'& :3*=& 9*+& (,42.+& comme la prosopographie, et les représentations idéales, ou tout simplement normatives, de la cour.

Cette proposition selon laquelle la cour peut être décrite comme une communauté 5H(42(11*..*&*+4&,1&(,42.&J,2&+/:3I'*&2145'*++:14&;(,'&;*1+*'&.:&=(,'%&H:2+&92))2=2.*&-&H*44'*&*1& ^,3'*%&+2&./(1&+(,N:24*&./,42.2+*'&4(,4&-&):24&;':7H:42J,*H*14%&=(HH*&,1&H(B*1&9/54,9*&J,2& ;(,'':24& +*'32'%& 9:1+& .*& =:+& ;'5+*14%& -& =:':=45'2+*'& .:& =(,'& 1:;(.24:21*& 9/".;N(1+*& .*& Magnanime. Surgit alors toute une série de difficultés : comment régler la focale de ./*1J,U4* ? Doit-(1& ;:'42'& 9*& ./NB;(4NI+*& +*.(1& .:J,*..*& 2.& *M2+4*& 9*+ émotions proprement =,'2:.*+%&2++,*+&9/,1*&=,.4,'*&=(HH,1*&(,&9/,1*&=(1+=2*1=*&9*&7'(,;* ? Une étude lexicale ;.,+&7515':.*&+,;;(+*&9/54:O.2'&a priori ,1&=(';,+&9*+&4*'H*+&J,*&./(1&+(,N:24*&'*;5'*' [&1/*+4-=*&;:+&O2:2+*'&./*1J,U4* ? Peut-on se contenter de procéder à une recherche lemmatique pour '*;5'*'&.*+&4':=*+&9*&./*M;'*++2(1&9*&./5H(42(1&9:1+&.*+&+(,'=*+&4*M4,*..*+ ? Une lecture plus J,:.24:423*&J,*&J,:1424:423*%&J,2&+/:))':1=N2':24&9*&./:,4(H:42=245&9/,1*&'*=N*'=N*&21)('H:42+5*%& 1/*+4& ':2+(11:O.*H*14& *132+:7*:O.*& J,*& +2& ./(1& +/:++271*& =(HH*& +*,.& (OP*=42)& ,1*& :1:.B+*& +*''5*& 9*& ./*M;'*++2(1& 9*+& 5H(42(1+K& 01& 4':3:2.& :,++2& *M27*:14& 1*& ;*,4& ;:+& U4'*& '5:.2+5& rapidement, comme on fait des relevés statistiques simples. Dans les cas où il est entrepris, =/*+4 donc per se%&*4&':'*H*14&=(HH*&,1&21+4',H*14&:,&+*'32=*&9/,1*&:,4'*&'5).*M2(1%&;('4:14& sur une autre notion. Les usages épistémologiques de la communauté émotionnelle décrits par 6:H2*1&\(J,*4&+(14&9/:2..*,'+&.2H245+ :

La communauté émotionnelle permet de ;*1+*'& .:& 4':1+)('H:42(1& N2+4('2J,*& :3*=& ./5H(42(1& (essentiellement dans la confrontation entre plusieurs communautés contemporaines) et la 4':1+)('H:42(1& 9*+& 5H(42(1+& -& ./2145'2*,'& 9/,1& HUH*& 7'(,;*& +(,+& ./*))*4& 9,& =(14*M4*K& @.& '*+4*& J,*& .*+& communautés éH(42(11*..*+%& +*& 95)212++:14& ;:'& .*+& 1('H*+& 9/,1& 7'(,;*& +(=2:.%& ;*,3*14& :;;:':g4'*& conservatrices, au sens où les manifestations émotionnelles, même conflictuelles, sont par définition ./*M;'*++2(1&9*+&1('H*+&;:'4:75*+2.

1 R. CHILÀ, « Alphonse le Magnanime et la discipline des comportements curiaux à Naples » dans Passion et

pulsions à la cour, A. JAMME, L. MOULINIER-BROGI et M. NICOUD éd., Florence, SISMEL - Edizioni del Galluzo, à paraître en 2014.

2 D. BOQUET, « Le concept de communauté émotionnelle selon B. H. Rosenwein », BUCEMA : Bulletin du

48

82&./(OP*4&9*&./*1J,U4*& *+4& 9:3:14:ge le groupe social que les émotions, il vaut donc H2*,M&4':3:2..*'&+,'&+:&1('H:423245&*4&.*+&3*=4*,'+&21+424,42(11*.+&9*&+:&H2+*&*1&^,3'*%&J,*&+,'& les formulations des émotions dans les sources produites dans ce contexte. Nous rejoignons en ce sens les ob+*'3:42(1+&9/R42*11*&"1N*2H&*1&):3*,'&9/,1&,+:7*&':2+(115&9:1+&=*&9(H:21*&9*& ./N5'24:7*&5.2:++2*1 :

Élias permet aussi de proposer une perspective nourrie de sciences sociales à une histoire des émotions souvent attirée par une approche cognitiviste, voire anhistorique, en mettant en évidence le fait que ./5=(1(H2*&;+B=N2J,*%&HUH*&9:1+&,1*&;*'+;*=423*&)'*,92*11*%&*+4&.*&)',24&9/,1&;'(=*++,+&+(=2:. Q&=/*+4& ,1*& ;:'42*& 9*& ./*1P*,& 9*& +(1& 4':3:2.& +,'& .*& +;('4%& J,2& ;(+*& .:& J,*+42(1& 9*& .:& 32(.*1=*& H:g4'2+5*& *1& déd(,O.:14&./:1:.B+*&:,&123*:,&9*&./:,4(=(14'b.*&9*+&2192329,+%&H:2+&:,++2&9*&./,+:7*&9*+&'24,*.+&+;('42)+& comme forme de gestion, voire de sublimation, de la violence potentielle y à cet égard, les jeux médiévaux, en particulier les tournois, ou la chasse, semblent fournir un point de comparaison idéal1. D1&+(,.271:14&.*&'b.*&9,&;'(=*++,+&+(=2:.&9:1+&./5=(1(H2*&;+B=N2J,*&9*+&2192329,+&*4& 9*+& 7'(,;*+%& R42*11*& "1N*2H& '*=(,;*& .*+& 95H(1+4':42(1+& 9*& ./:14N'(;(.(7,*& O'24:112J,*& Mary Douglas sur la capacité des institutions à informer les savoirs et les normes individuelles2. Il nous semble plus profitable de retenir le rôle fondamental des institutions, et de la cour comme institution, dans le processus de formation de la culture commune de ses membres, que de mener une enquête empirique à partir des manifestations (sous la forme 9/,1*&=(HH,1:,45&9/5H(42(1+&(,&1(1c&9*&=*44*&=,.4,'*&=(HH,1*K

C. La familia

Autre approche, plus éprouvée, permettant de penser la cour, la notion de familia, qui est dans les sociétés anciennes le groupe domestique dans lequel sont inclus les 95;*19:14+&*4&+*'324*,'+&9/,1&+*271*,'%&9(14&2.&:++,'*&.:&+,O+2+4:1=*&J,(4292*11*&*1&.*,'& ouvrant sa table. Cette notion incite à envisager la société curiale comme une extension symbolique de la famille charnelle du prince. Contrairement aux notions empruntées à la description sociologique, ou forgées par les historiens, la familia est un moyen de décrire ,1*& )('H*& +(=2:.*& *1& +/:;;,B:14& +,'& .*& 3(=:O,.:2'*& 9*+& +(,'=*+%& *4& .*+& =:457('2*+& H59253:.*+K& S/*+4 9/:2..*,'+& 9:1+& =*44*& ;*'+;*=423*& J,*& +/21+='24& .:& 95)21242(1& 9*& .:& =(,'& proposée par Werner Paravicini à propos de la Bourgogne :

A:&=(,'%&J,:14&-&+:&+4',=4,'*%&*+4&./*1+*HO.*&9*+&N(HH*+&*4 des femmes qui, à des titres divers, forment ./*14(,':7*& =(1421uel, périodique ou occasionnel du prince. Son principe est la familiaritas,

1 É. ANHEIM, « 6*& ./,+:7*& 9*& ./^,3'*& 9*& $('O*'4& D.2:+& *1& N2+4(2'*& H59253:.* », en ligne sur Menestrel.fr, consulté le 10 septembre 2013, http://www.menestrel.fr/spip.php?rubrique1879

2 M. DOUGLAS, Comment pensent les institutions, Paris, La Découverte, A. ABEILLÉ trad., 2004, p. 89-103, p. 133-174.

49

./:;;:'4*1:1=*&-&.:&H:2+(1&J,/2.&;'5+29*&*1&4:14&J,* pater familias, et le service personnel du prince en 4:14&J,/2192329,%&=*&J,2&*M;.2J,*&.: cessation de tout office curial (et même local) à la mort du maître1. La familiaritas est un statut privilégié, qui agrège les individus à la juridiction curiale, en tout cas selon les termes du Magnanime. Dans certains cas, le terme semble '*13(B*'&*M:=4*H*14&:,M&H*HO'*+&9*&./Nb4*.&;'21=2*'% comme en Bourgogne, mais aussi par exemple à Urbino où un Libro degli Uffici perdu a probablement été partiellement transcrit sous le titre Memoria felicissima de lo Illustrissimo Signor Duca de Urbino Federigo et de la sua famiglia che teneva2. Mais cett*&5J,23:.*1=*&9*+&+;NI'*+&9*&./Nb4*.& et de la familia 1/*+4& ;:+& :,++2& 1*44*& 9:1+& .*& =:+& :3271(11:2+& 54,925& ;:'& \*'1:'9& Guillemain :

A*+&=,'2:.2+4*+&9(14&.*&;:;*&;'*19&*1&=N:'7*&.:&+,O+2+4:1=*%&9(14&./*))*=42)&*+4&;('45&+,'&.*+&=(H;4*+%&9(14& le rôle est rap;*.5&9:1+&./:29*-mémoire publié par Haller, sont les membres de la familia. Ils forment, autour du pape, une communauté domestique : même ceux qui sont devenus, au XIIIe siècle, des :9H212+4':4*,'+&=(1421,*14&9/U4'*&=(1+295'5+&=(HH*&9*+&+*'324*,'+&;*'+(11*ls du pontife. Mais quoique figurent parmi eux les principaux officiers de la Chancellerie, de la Chambre, de la Pénitencerie, ce sont .*+&;'5;(+5+&:,M&)(1=42(1+&9(H*+42J,*+&J,2&9(H21*14&9:1+&=*44*&=:457('2*K&S/*+4&:21+2&J,*&.*+&+='2O*+&9*& la Chancellerie 1/*1& )(14&;:+&;:'42* [&2.&*+4&3':2&J,*& .*,'&'*=(11:2++:1=*&())2=2*..*& 1/:& 545&:=J,2+*& J,*& vers le milieu du XIIIe siècle, car ils ne relevaient auparavant que des notaires. Dans le groupe des familiers, on distingue encore un groupe privilégié : la parva ou stricta familia touche ses rations de vivres même quand la cour se déplace : gens de la cuisine, panetiers, notaires des offices domestiques, =N*)+& 9*& .:& H:'5=N:.*'2*%& ;:.*)'*12*'+%& :,Hb12*'+%& +*'7*14+& 9/:'H*+%& ())2=2*'+& 9*& .:& SN:HO'*& *4& O,..:4*,'+&1/(14 jamais à se préoccuper de leur ravitaillement auquel le pape pourvoit comme au sien propre et à celui de ses chapelains qui ne le quittent pas.

A/2H;('4:1=*&'*=(11,*&-&.:& familia pontificale rend frappant le premier trait dont est marquée la cour des papes : son caractère patriarcal3.

La société correspondant à cette catégorie de familia 1/*+4& 9(1=& ;:+& N(H(7I1*& +*.(1& .*+& =(,'+%& 2.& ):,4& 92+4217,*'& 1(4:HH*14& 9*+& =:+& (X& ./(1& '*;I'*& 9*+& ):H2.2*'+& in presentia et in absentia%&:21+2&J,/,1*&H:P('245&9*&H*HO'*+&9* ./Nb4*.%&H:2+&:,++2&9/:,4'*+& 2192329,+& :;;:'4*1:14& -& ./:9H212+4':42(1& 9*& ./R4:4& ;.,4b4& J,/:,& +*'32=*& 9(H*+42J,*& 9,& ;'21=*K&6:1+&./R4:4&;(142)2=:.%&2.&):,4&;'*19'*&*1&=(H;4*&.*&):24&J,*&.*&+4:4,4&9*&):H2.2*'%& voire de « familier commensal », confère à son détenteur une série de prérogatives dans ./:44'2O,42(1& 9*+& 7's=*+& T1(4:HH*14& 9*+& O515)2=*+& *==.5+2:+42J,*+c%& =*& J,2& *M;.2J,*&

1 W. PARAVICINI, « Structure et fonctionnement de la cour bourguignonne au XVe siècle », dans Milano e

Borgogna, due stati principeschi tra Medioevo e Rinascimento, J. M. CAUCHIES et G. CHITTOLINI éd., Rome, Bulzoni, 1990, p. 67-74, p. 67.

2 C. CLOUGH, « A:&t):H27.2:u&9*.&9,=:&?,29(O:.9(&9:&C(14*)*.4'( », dans « Familia » del Principe e famiglia

aristocratica, C. MOZZARELLI éd., Rome, Bulzoni, 1988, p. 335-347, p. 335.

3 B. GUILLEMAIN, +'" .)6&" 1)*0/C/.'2," #$%@/(*)*" JK_M`-K_aLN8" P06#," #$6*," -)./P0P, Paris, De Boccard, 1962, p. 39-40.

50

combien ce « titre honorifique » est recherché1. La souplesse et le caractère transversal de la « familia » en fait en tout cas une 92H*1+2(1&*++*142*..*&9*&.:&+(=2545&=,'2:.*K&@.&+/:724& O2*1&9/,1*&« communauté patriarcale2 », également composée de nombreux absents pour qui ce titre a une fonction honorifique, et qui contribuent à faire de la familia princière un groupe réticulaire, à ./5=N*..*& 9*& 4(,+& .*+& 4*''24(2'*+& 9*& .:& =(,'(11*& 9/"':7(1& *1& =*& J,2& concerne Alphonse le Magnanime. La distinction de la parva familia 1/:;;:':g4& ;:+& *M;.2=24*H*14&9:1+&.*+& +(,'=*+&=:4:.:1*+&*4&1:;(.24:21*+%&H:2+%& *1&./:O+*1=*&9*&+5'2*+&9*& sources financières suffisamment complètes pour permettre de trancher la question, on ne ;*,4& 5=:'4*'& ./NB;(4NI+*& J,/,1& 4*.& ;'21=2;*& :24& ;,& ;'5+29*'& -& ./*14'*42*1& ;.,+& (,& H(21+& important de certaines catégories du personnel domestique qui apparaissent fréquemment dans les fragments de paiements conservés, comme les pages du roi

Guido Guerzoni dans ses travaux consacrés à la cour des Este de Ferrare3 a souvent concentré son enquête sur la compréhension délicate du vocabulaire de la sociologie curiale, et particulièrement la notion de familiaritas :

In the case of the Este, at least until the middle of the Cinquecento, family and Court referred to two 92+421=4&7'(,;+&()&;*(;.*&N(&*'*&H*:14&4(&O*&>*;4&92+421=4K&}‚~&GN*&):H2.B&:+&4N*'*)('*&:&+,O+*4%&:& minority portion not coincident with the whole court. From the late Quattrocento the courts of the Este dukes, with a hundred familiari, averaged more than four hundred courtiers. In fact, lords, gentlemen, camerieri and squires were part of the familia, as were some secretaries and chancellors, a few House officers (carvers, stewards, the maestro of the House, the maestri of the guardaroba, stable and hunt masters), some chaplains, barbers, only a few musicians, some stable boys and the pages. Substantially it consisted of the élite and their closest servants, who ate at their table and slept under their roof4. D1&+/:;;,B:14&+,'&9*+&+(,'=*+&1('H:423*+&*4&1:'':423*+&'*.:423*+&-&.:&<*'':'*&9*+&q#e

et XVIe +2I=.*+%& 2.& 54:O.24& J,*& 9:1+& =*& =:+%& .*+& =(19242(1+& '*J,2+*+& ;(,'& J,/,1& 2192vidu bénéficie pleinement du statut de familiaris sont les suivantes Q&9*H*,'*'&-&./:115*&.-&(X&+*& trouve le prince, sans interruption dans son service ; recevoir un traitement en numéraire pour ce service, tout en étant entièrement pris en charge au quotidien par la cour ; et enfin les

1 A. MENNITI IPPOLITO, « A:& t):H2.2:u& 9*.& ;:;:K& 84',44,':& *& ('7:12ZZ:Z2(1* », dans Offices, écrits et papauté

(XIIIe-XVIIe siècle), A. JAMME et O. PONCET éd., Rome, École française de Rome, p. 545-558.

2 Ibid., p. 38.

3 G. GUERZONI, « t<:H2.2:u%&t=('4*u%&t=:+:uK& The Este case in Fifteenth-Sixteenth Century », dans La Cour de

E)6&()(*," ,0" 2$V6&)1,, W. PARAVICINI éd., Ostfildern, Thorbecke, 2013, p. 515-541 ; ID., « Familia, Corte, Casa e Stato. Alcune precisazioni sul caso estense tra Quattro e Cinquecento », Cheiron, Materiali e strumenti di

aggiornamento storiografico, 2006, n° 45-46, p. 213-233 ; ID., « The Administration of the Este courts in the XVth - XVIIth Century », Micrologus, 2008, n° 16, p. 537! 567.

51

;'(;'*+&):H2.2*'+&9*&=*+&):H2.2*'+&1*&9(23*14&;:+&U4'*&9*+&N(HH*+&9/:'H*+1. En conséquence, Guido Gerzoni estime que le maniement du vocabulaire par les acteurs dans les sources est 4(,P(,'+&.*&)',24&9/,1&:'O24':7*&O2*1&21)(rmé entre les différents termes (courtisans, serviteurs, familiers etc.) désignant des membres de la société curiale. La familia est donc un sous-ensemble curial bien appréhendé par les contemporains.

Ce constat valant pour Ferrare peut probablement faire ./(OP*4& 9/,1*& 7515':.2+:42(1 : les contours de la familiaritas +(14& ;.,+& 1*4+& ;(,'& .*+& =,'2:,M& J,*& ;(,'& ./N2+4('2*1K& S(14':2'*H*14&-&./Nb4*.&'(B:.%&2.+&1*&)(14&;:+&./(OP*4&9*&4*M4*+&1('H:42)+2, ce qui suppose une certaine banalité de la réalité recouverte par ce terme3. Pour en donner une définition simple, retenons que la familiaritas est un statut juridique lié à une décision souveraine du roi. Mais il ):,4& 7:'9*'& -& ./*+;'24& J,/*..*& *+4& +,+=*;42O.*& 9*& 3:'2*'& 9*& ):V(1& 2H;('4:14*& 9:1+& .*& 4*H;+& *4& 9:1+& ./*+;ace. Enfin, on peut inscrire le groupe des familiares dans la juridiction curiale 53(J,5*&;.,+&N:,4%&J,(2J,*&=*44*&9*'12I'*&+(24&+,+=*;42O.*&9*&+/:;;.2J,*'&-&4(,+&.*+&='2H*+&*4& délits commis à la cour. Comme dans le cas du terme « élite », on ne peut prétendre :;;'5N*19*'& .:& 4(4:.245& 9*& .:& +(=2545& =,'2:.*& -& ./:,1*& 9*& .:& familiaritas%& 2.& +/:724& 9/,1& )2.4'*& +(=2:.&1*&;*'H*44:14&9*&+:2+2'&J,/,1*&;:'42*&9*+&2192329,+&=(1=*'15+K