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Annexe A : les sources des données utilisées

Dans le document Le financement des entreprises innovantes (Page 79-87)

Identification des entreprises innovantes

Pour mesurer l’innovation, trois principales sources d’information peuvent être mobilisées : les dépenses en recherche et développement, les données de brevets et les enquêtes communautaires sur l’innovation. Chacune de ces mesures présente des limites.

Les dépenses en recherche et développement sont une mesure d’un input possible de l’innovation. En effet, l’innovation ne provient pas nécessairement d’une activité de recherche et développement. De plus, les dépenses en recherche et développement ne fournissent aucune indication sur le résultat de l’activité de R&D. Cette mesure de l’innovation peut également être considérée comme restrictive : l’effort d’innovation d’une firme est également porté par des activités non scientifiques qui n’entrent pas dans la définition des dépenses en recherche et développement.

En tant que mesure de l’innovation, les brevets présentent également des li- mites (Insee 2003). Le champ des brevets est limité aux inventions scientifiques et techniques, toutes les innovations ne sont pas brevetables7. Par ailleurs, tous les

brevets déposés ne sont pas systématiquement suivis d’une application industrielle. Enfin, une entreprise n’a pas nécesssairement intérêt à breveter son invention pour la protéger. Déposer un brevet signifie révéler de l’information et les firmes peuvent considérer que leurs inventions sont mieux protégées par le secret (Duguet et Kabla, 1998).

Afin d’avoir une mesure de l’innovation fondée sur une définition moins restric- tive que celle des brevets, des enquêtes sur l’innovation ont été mises en place. Le cadre méthodologique des enquêtes communautaires est celui du manuel d’Oslo de l’OCDE. Le concept d’innovation retenu dans ces enquêtes communautaires est es- sentiellement celui de l’innovation technologique. Dans ce cadre, une entreprise est considérée comme innovante dès lors qu’elle a introduit une innovation technologique

7Pour être brevetable, l’invention doit être nouvelle, impliquer une activité inventive et être sus-

ceptible d’applications industrielles. Par exemple, on ne peut pas breveter une idée, des découvertes scientifiques ou encore des principes et des méthodes.

« sur le marché (innovation de produit) ou [qu’elle a utilisé une innovation technolo- gique] dans un processus de production (innovation de procédé)» [paragraphe 130 du manuel d’Oslo (édition de 1997)]. Ces innovations technologiques de produits et de procédés «couvrent les produits et procédés technologiquement nouveaux ainsi que les améliorations technologiques importantes de produits et de procédés qui ont été accomplies». Par conséquent, selon cette définition une firme est considérée comme innovante seulement si elle a mené à son terme un projet innovant. Par ailleurs, est considérée comme innovante, une firme ayant introduit un produit ou un procédé nouveau pour elle-même, il ne s’agit donc pas forcément d’une innovation pour le marché.

L’analyse des résultats des enquêtes sur l’innovation permet ainsi d’avoir une vi- sion de l’innovation portant sur le résultat des activités innovantes, moins restrictive que celle donnée par les brevets.

Toutefois, cette définition de l’innovation fondée sur son contenu technologique ne permet pas de prendre en compte l’ensemble des changements significatifs dans l’entreprise tels que la mise en place de nouveaux outils de gestion, de nouveaux concepts de vente, l’externalisation d’une activité ou la création d’une filiale spé- cialisée. Elle se révèle ainsi peu adaptée pour cerner l’innovation dans les services (Insee, 2002).

Pour traiter la question posée dans ce chapitre, nous ne nous intéressons pas aux résultats de l’innovation, mais nous avons besoin d’identifier les entreprises engagées dans des activités innovantes afin d’examiner si les problèmes de risque et d’asymétries d’information qu’elles peuvent rencontrer induisent des contraintes financières qui leur sont spécifiques. C’est la raison pour laquelle nous nous appuyons sur les enquêtes communautaires sur l’innovation pour identifier les entreprises qui ont entrepris des projets technologiquement innovants.

Les enquêtes communautaires sur l’innovation (CIS)

Les enquêtes communautaires sur l’innovation (CIS) ont pour objet de collec- ter des informations sur le comportement des entreprises en matière d’innovation. Depuis 1990, quatre enquêtes communautaires ont été réalisées (CIS1 porte sur la

période 1990-1992, CIS2 sur la période 1994-1996, CIS3 sur la période 1998-2000 et CIS48 sur la période 2002-2004).

Ces enquêtes ont été mises en place pour avoir des informations nouvelles sur l’in- novation dans les entreprises, complémentaires de celles disponibles par ailleurs sur les dépenses de recherche et développement et les brevets. La mesure de l’innovation est donnée d’un point de vue qualitatif (l’introduction de produits ou de procédés technologiquement nouveaux ou améliorés) mais aussi quantitatif via la part du chiffre d’affaires réalisé par les produits innovants. Les enquêtes communautaires permettent également de cerner les mécanismes de l’innovation. Par exemple, des questions portent sur les sources d’information mobilisées pour innover, les coopé- rations avec des partenaires et notamment la recherche académique, les mécanismes de protection de l’innovation adoptés (brevets, secret)...

Les données sont collectées à partir d’une méthodologie et d’un questionnaire élaborés par Eurostat pour l’ensemble des pays de la communauté européenne. Ce questionnaire de référence peut éventuellement être complété par des questions addi- tionnelles au niveau national. La méthodologie de l’enquête a été améliorée au cours des campagnes successives. Ces améliorations ont eu pour objectif de renforcer les comparaisons internationales et d’élargir la mesure de l’innovation à des aspects non technologiques9.

L’enquête CIS3 couvre les secteurs de l’industrie, des services aux entreprises et du commerce de gros. Dans l’industrie (hors agroalimentaire), environ 5500 en- treprises de plus de vingt salariés ont été enquêtées par le Service d’étude et de statistiques industrielles (le Sessi) du Ministère de l’industrie. Le taux de réponse de l’enquête a été de l’ordre de 86%. Dans ce secteur, l’enquête a été exhaustive pour les entreprises de plus de 500 salariés. Les entreprises de 20 à 49 salariés ont été interrogées avec un taux de sondage de 1/8, celles de 50 à 99 salariés un taux de 1/4 et celles de de 100 à 499 salariés un taux de 1/2. Au final, la base de données de l’enquête française CIS3 que nous avons utilisée comprend plus de 4000 firmes de

8La dernière enquête CIS4 n’était pas encore disponible au moment de la rédaction de la présente

thèse .

9Toutefois comme nous l’avons souligné plus haut, les enquêtes communautaires passées sont

inadaptées pour cerner précisément l’innovation à caractère non technologique dans le secteur des services. La dernière édition de l’enquête CIS4 a introduit des questions qui permettent de mieux appréhender l’innovation dans les services.

l’industrie manufacturière (tableau 1.A.1).

Tableau 1.A.1. Composition de la base de données CIS3 pour l’industrie manufacturière

Nbre de firmes % Répartition des firmes par taille* Innovantes* du total (nombre d'employés)

entre 20 et 100 entre 100 et 499 500 et plus

Biens de consommations 1016 24,77 13,48 7,41 3,88 11,97

Automobiles 142 3,46 1,10 1,12 1,24 2,32

Biens d'équipements 956 23,31 12,12 6,83 4,36 15,24 Biens intermédiaires 1987 48,45 24,16 16,02 8,27 28,60

Total 4101 100,00 50,87 31,38 17,75 58,13

* % du total de l'échantillon, il s'agit des données brutes, non redressées

Source : CIS3 (SESSI), échantillon de l’industrie manufacturière (hors IAA)

Les enquêtes communautaires sur l’innovation (Community Innovation Survey, CIS) sont utilisées ici pour identifier les entreprises ayant eu des activités innovantes. Dans les enquêtes CIS et FIT, l’identification des firmes innovantes se fait par le biais de leurs réponses aux trois questions-types suivantes :

[Sur la période considérée]

- Votre entreprise a-t-elle introduit sur le marché des produits technologiquement nouveaux (ou technologiquement améliorés) pour votre entreprise ?

- Votre entreprise a-t-elle introduit des procédés technologiquement nouveaux (ou technologiquement améliorés) pour votre entreprise ?

- Votre entreprise a-t-elle eu des projets de produits ou de procédés technologi- quement nouveaux ou améliorés pour votre entreprise ?

- qui sont en cours de développement ou de mise sur le marché - qui ont été des échecs

Une entreprise est alors définie comme effectivement innovante dès lors qu’elle répond positivement à l’une ou à l’autre des deux premières questions.

L’ensemble des firmes engagées dans des activitées innovantes et qui peuvent donc être considérées comme potentiellement innovantes sont celles qui ont répondu positivement à l’une des trois questions, ie elles ont effectivement in- nové ou elles ont développé des projets de produits ou de procédés technologiquement

nouveaux ou améliorés qui ont pu être des échecs.

Après ces questions servant de filtre, les entreprises engagées dans des activités innovantes sont interrogées dans les enquêtes communautaires sur les mécanismes de l’innovation .

La Centrale de Bilans de la Banque de France

La Centrale de Bilans de la Banque de France est une base de données descrip- tives et comptables d’entreprises qui y adhèrent par un acte volontaire (Banque de France, 2002). Elle comprend environ 14 000 entreprises de l’industrie manufactu- rière (tableau 1.A.2). Dans ce secteur, le taux de couverture de la Centrale de Bilans, en termes d’effectifs salariés de l’ensemble des firmes10, était de 51,6% en 2001 et

l’on peut remarquer que la répartition sectorielle des entreprises de la Centrale de Bilans est identique à celle des enquêtes présentées précédemment.

Tableau 1.A.2. Composition de la Centrale de Bilans de la Banque de France (industrie manufacturière, année 1998)

Nbre de firmes % Répartition des firmes par taille* du total (nombre d'employés)

moins de 100 entre 100 et 499 500 et plus Biens de consommations 3142 22,06 17,32 3,84 0,89 Automobiles 351 2,46 1,49 0,67 0,30 Biens d'équipements 3449 24,21 19,40 3,80 1,00 Biens intermédiaires 7304 51,27 40,97 8,73 1,57 Total 14246 100,00 79,18 17,05 3,77 * % du total de l'échantillon

Source : CdB, Banque de France

Les données de la Centrale de Bilans de la Banque de France sont constituées des informations contenues dans les feuillets fiscaux auxquelles s’ajoutent des ren- seignements complémentaires. Ces renseignements complémentaires permettent no- tamment de mieux cerner d’éventuelles opérations de restructuration des entreprises

10Il s’agit de l’ensemble des firmes soumises aux Bénéfices Industriels et Commerciaux - régime

(par exemple des opérations de fusion, rachat, etc..) en identifiant les apports qui leur sont liés. Les renseignements complémentaires de la Centrale de Bilans de la Banque de France portent également sur les sources de financement et les dépenses imma- térielles des entreprises. Pour l’étude du financement des entreprises innovantes, ces informations complémentaires s’avérent ainsi très utiles. Elles sont directement uti- lisées dans ce chapitre pour identifier si les entreprises ont contracté de nouveaux emprunts bancaires au cours d’une année.

L’appariement des données Centrale de bilans avec les enquêtes

Comme mentionné plus haut, la Centrale de Bilans de la Banque de France est une base de données qui couvre environ 50% des emplois de l’industrie. Afin de tenter d’avoir une idée des problèmes potentiels induits par la non exhaustivité des données de la Centrale de Bilans, nous examinons comment se modifient les échantillons des enquêtes sur l’innovation lorsqu’ils sont appariés avec les données de la Centrale de Bilans.

Tableau 1.A.3. Comparaison des caractéristiques des échantillons

Nobs % innovantes Taille (nbre employés) Q1 Médiane Q3 Moyenne CIS2 4253 55,86 38,0 80,0 288,0 375,6 CIS3 4730 58,13 34,0 80,0 290,0 405,5 CIS2*CdB 2384 62,3 48,0 117,5 440,0 453,3 CIS3*CdB 2218 62,9 51,0 128,0 414,5 457,6 Note : Ils s'agit des données brutes, non redressées

Source : CdB (Banque de France), CIS2, CIS3 (Sessi)

Le croisement avec les données de la Centrale de Bilans permet de conserver 50% des entreprises enquêtées dans CIS2 ou CIS3. L’appariement avec CdB semble déplacer l’échantillon vers des firmes de taille plus importante. Il exclut alors de l’échantillon une plus grande proportion d’entreprises non innovantes, ce qui conduit à des taux d’entreprises innovantes dans les échantillons appariés de l’ordre de 62%. Pour notre étude, ces statistiques indiquent un biais potentiel des résultats vers les entreprises qui rencontrent a priori le moins de difficultés financières : les firmes

les plus grandes et ayant effectivement entrepris des activités innovantes. Ceci est donc susceptible d’entraîner une sous-estimation des difficultés de financement de l’innovation des entreprises françaises. Par conséquent, si à partir de ces échantillons nous sommes en mesure de mettre en évidence des contraintes financières spécifiques aux entreprises engagées dans des activités innovantes, nous pourrons conclure à leur existence pour l’ensemble des entreprises industrielles.

La fusion des enquêtes communautaires

Les entreprises enquêtées dans CIS2 et CIS3 ne sont majoritairement pas les mêmes : seules les plus grandes sont communes aux deux enquêtes. Plus de 80% de ces firmes ont eu des activités innovantes sur au moins une des deux périodes considérées et 60% pendant les deux périodes (tableau 1.A.4).

Tableau 1.A.4. Composition de l’échantillon croisé CIS2*CIS3

1994-1996 1998-2000

(CIS2) (CIS3)

Nombre d’innovantes 844 814

Nombre de non innovantes 312 342

Nombre total de firmes 1156 1156

Nbre de firmes ayant des activités innovantes

sur les deux périodes 697

Nbre de firmes avec des statuts innovants différents sur les deux périodes

Nbre de firmes sans activité innovante sur les deux 264

périodes 195

Echantillon CdB*CIS2*CIS3

En croisant les trois bases CIS2, CIS3 et CdB, l’échantillon obtenu est composé de firmes aux caractéristiques très spécifiques. En particulier, elles sont beaucoup plus grandes que les firmes industrielles de l’ensemble de CdB. Ces firmes sont aussi caractérisées par un taux de marge plus élevé et des taux d’investissement matériel et immatériel plus importants. Enfin, elles sont moins endettées à court et à long termes (tableau 1.A.5).

Tableau 1.A.5. Comparaisons entre les caractéristiques de l’ensemble de CdB et de l’appariement CIS2*CIS3*CdB

Q1 Médiane Q3 Moyenne

Echantillon CdB complet

taille (nombre d’employés) 44 93 265 246

taux de marge 13,43 21,71 31,00 23,03

taux d’endettement bancaire de court terme 0,01 4,63 36,76 28,63

taux d’endettement bancaire de long terme 2,23 18,41 50,00 39,16

Investissement (% de valeur ajoutée) 3,91 7,79 14,28 11,11

Investissement immatériel (% de valeur ajoutée) 0,00 0,13 0,80 0,51

Echantillon restreint : CIS2*CIS3*CdB

taille (nombre d’employés) 145 470 866 777,26

taux de marge 14,96 23,65 32,70 24,33

taux d’endettement bancaire de court terme 0,23 4,30 25,24 22,63

taux d’endettement bancaire de long terme 0,22 7,47 32,24 27,59

Investissement (% de valeur ajoutée) 5,29 9,07 14,81 11,78

Investissement immatériel (% de valeur ajoutée) 0,04 0,21 0,63 0,62 Echantillon CIS2*CIS3*CdB

La particularité des firmes composant l’échantillon CIS2*CIS3*CdB s’explique par la méthode de construction des échantillons des enquêtes françaises CIS2 et CIS3 : les entreprises communes à ces deux enquêtes sont les plus grandes. Ainsi, il n’apparaît pas souhaitable de restreindre l’analyse empirique à ce seul échantillon. Par conséquent, l’étude empirique menée dans ce chapitre est menée à partir de l’échantillon constitué des entreprises industrielles de la Centrale de Bilans qui sont enquêtées dans CIS2 et/ou CIS3..

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