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Anneaux intégralement clos

Dans le document Algèbre 2 (Page 114-117)

II. Modules

8. Extensions finies et entières d’anneaux

8.2. Anneaux intégralement clos

Définition 8.15. — Un anneau est dit intégralement clos s’il est intègre et intégralement clos dans son corps des fractions.

Exemple 8.16. — L’anneau intègre A = Z[√5] n’est pas intégralement clos : son corps des fractions est K = Q[√5], l’élément (1 +√5)/2 de K est entier sur A (il est annulé par le polynôme X2− X − 1 ∈ A[X]), mais il n’est pas dans A. Sa clôture intégrale dans K est Z[(1 +√5)/2] (exerc. 8.20).

Exercice 8.17. — Soit A un anneau intègre. Montrer que les propriétés suivantes sont équiva- lentes (cf. exerc. 6.4) :

(i) l’anneau A est intégralement clos ;

(ii) pour tout idéal premier p de A, l’anneau Apest intégralement clos ; (iii) pour tout idéal maximal m de A, l’anneau Amest intégralement clos.

Exercice 8.18. — Soit A un anneau intégralement clos de corps des fractions K et soit K ,→ L une extension algébrique de corps. Montrer qu’un élément de L est entier sur A si et seulement si son polynôme minimal sur K est à coefficients dans A.

Un corps de nombres L est une extension finie de Q. L’anneau des entiers de L est la clôture intégrale B de Z dans L. C’est un anneau intégralement clos. Comme Z, l’anneau B est de dimension 1 (th. 11.8 ; mais il existe une preuve plus simple dans ce cas particulier que l’on peut trouver dans [L], prop. I.5.6). Enfin, il est noethérien grâce au théorème suivant.

C’est donc un anneau de Dedekind, comme défini brièvement dans le § 4. Remarquons que le groupe abélien (B, +) est sans torsion, de type fini par le théorème, donc isomorphe à un Zn(th. II.4.9).

Théorème 8.19. — Soit A un anneau noethérien intégralement clos, de corps de fractions K et soit K ,→ L une extension finie séparable de K. La clôture intégrale de A dans L est un anneau noethérien, extension finie deA.

Démonstration. — Soit B la clôture intégrale de A dans L. Soit x un élément de L. Il satis- fait alors à une équation

xn+ λn−1xn−1+ · · · + λ1x + λ0= 0,

avec λn−1, . . . , λ0∈ K. Soit a ∈ A 0 tel que aλisoit dans A pour tout i. On a alors (ax)n+ aλn−1(ax)n−1+ · · · + an−1λ1(ax) + anλ0= 0,

de sorte que ax est entier sur A, donc dans B. En particulier, il existe une base (b1, . . . , bm) du K-espace vectoriel L constituée d’éléments de B.

Posons

N := {x ∈ L | ∀j ∈ {1, . . . , m} TrL/K(xbj) ∈ A}.

C’est un sous-A-module de L contenant B (prop. 8.14). L’extension K ,→ L étant séparable, l’application TrL/K définit une forme K-bilinéaire symétrique non dégénérée sur L (th. I.5.31) et il existe une base (x1, . . . , xm) du K-espace vectoriel L telle que TrL/K(xibj) = δi,j(symbole de Kronecker). On a alors N = Ax1+ · · · + Axm, de sorte que N est un A- module de type fini. Comme A est noethérien, B est aussi un A-module de type fini (exerc. 2.3) ; c’est ainsi une extension finie de A. C’est un anneau noethérien par cor. 2.5.

Exercice 8.20. — Soit d un entier sans facteur carré, différent de 1. Montrer que l’anneau des entiers du corps Q(√d) est Z[√d] si d ≡ 2 ou 3 (mod 4), et Z[(1+√d)/2] si d ≡ 1 (mod 4).

Lorsque d < 0, l’anneau des entiers de Q(√d) est principal si et seulement si d ∈ {−1, −2, −3, −7, −11, −19, −43, −67, −163}. Pour d > 0, les anneaux principaux sont beaucoup plus nombreux. En 2008, il est conjecturé qu’il en existe une infinité(11).

Proposition 8.21. — Un anneau factoriel est intégralement clos.

La réciproque est fausse : on a vu (ex. 1.4) que l’anneau intègre Z[√−5] n’est pas facto- riel ; mais il est intégralement clos (exerc. 8.20).

11. Pour tous les anneaux d’entiers de corps de nombres, et plus généralement pour tous les anneaux de dimension 1, le fait d’être principal ou factoriel est la même chose (exerc. 1.6).

Démonstration. — Soit A un anneau factoriel. Supposons qu’un élément x/y de son corps des fractions (avec x ∧ y = 1) soit racine d’un polynôme unitaire

Xn+ an−1Xn−1+ · · · + a1x + a0∈ A[X]. On a alors

xn+ an−1xn−1y + · · · + a1xyn−1+ a0yn = 0,

de sorte que y divise xn. La prop. 1.3 entraîne que y divise x, donc est une unité de A, de sorte que x/y ∈ A.

Exemple 8.22. — Si K est un corps, on a vu dans l’exerc. 1.5 que le sous-anneau A = K[X2, X3] de K[X] n’est pas factoriel. Il n’est en fait pas intégralement clos, puisque son corps des fractions est K(X), que X est entier sur A (il est annulé par le polynôme T2−X2 A[T ]), mais qu’il n’est pas dans A.

Théorème 8.23. — Soit A un anneau intégralement clos. L’anneau A[X] est intégralement clos.

Démonstration. — Commençons par deux lemmes.

Lemme 8.24. — Soit A ,→ B une extension d’anneaux et soit P un élément de A[X] tel que P = QR, où Q et R sont des polynômes unitaires de B[X]. Les coefficients de Q et de R sont entiers surA.

Démonstration. — Notons B1l’anneau B[T ]/(Q). Comme Q est unitaire, c’est un B-module libre de rang deg(Q) et l’application B → B1est en particulier injective. Si α1est la classe de T dans B1, on a Q(X) = (X − α1)Q1(X) dans B1[X]. En répétant cette construction, on a obtient une extension finie d’anneaux B ,→ C dans laquelle Q(X) = Q

j(X − αj) et R(X) = Q

k(X − βk) sont scindés. Les αj et βk sont entiers sur A car annulés par P , donc aussi les coefficients de Q et de R, puisque ce sont des polynômes en les αjet βk(cor. 8.7).

On en déduit immédiatement le lemme suivant, qui est une version du « lemme de Gauss » (lemme I.1.9) pour les anneaux intégralement clos.

Lemme 8.25. — Soit A un anneau intégralement clos de corps des fractions K et soit P ∈ A[X] tel que P = QR, où Q et R sont des polynômes unitaires de K[X]. Alors Q et R sont dansA[X].

Revenons à la démonstration du théorème. Si K est le corps des fractions de A, celui de A[X] est K(X). On prend donc un élément P de K(X) entier sur A[X] et il s’agit de montrer qu’il est dans A[X]. Comme K[X] est principal, donc intégralement clos (cor. 2.14 et prop. 8.21), P ∈ K[X] et on a une relation

où A0, . . . , An−1∈ A[X]. On peut donc écrire A0comme le produit de P et d’un autre po- lynôme. Malheureusement, on ne peut pas appliquer le lemme 8.24, puisque ces polynômes n’ont aucune raison d’être unitaires. L’astuce consiste à poser Q = P − Xm, où m est un entier > max(deg(P ), deg(A0), . . . , deg(An−1)). On a alors

0 = (Xm+ Q)n+ An−1(Xm+ Q)n−1+ · · · + A1(Xm+ Q) + A0, qui peut se réécrire

Qn+ Bn−1Qn−1+ · · · + B1Q + B0= 0, avec

B0= A0+ A1Xm+ · · · + An−1Xm(n−1)+ Xmn∈ A[X].

Le choix de m entraîne que −Q et B0 sont unitaires, puis le lemme 8.24 que Q est dans A[X], c’est-à-dire P ∈ A[X].

Exercice 8.26. — Soit A un anneau factoriel dans lequel 2 est inversible et soit a ∈ A un élément divisible par le carré d’aucun élément irréductible de A. Montrer que l’anneau A[√a] := A[X]/(X2− a) est intégralement clos (Indication : utiliser l’exerc. 8.18).

Exercice 8.27. — Soit A un anneau intègre sur lequel agit un groupe fini G. On note AGl’an- neau des invariants, c’est-à-dire AG:= {a ∈ A | ∀g ∈ G g · a = a}.

a) Montrer que l’action de G sur A s’étend de façon unique en une action sur son corps des fractions KA.

b) Montrer que le corps des fractions KAGde AGest un sous-corps du corps des invariants

KAG.

c) Montrer que l’on a en fait KAG= KAG.

d) Si A est intégralement clos, montrer que AGest intégralement clos.

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