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D - Une érosion du niveau opérationnel des armées en partie due au haut niveau d’engagement en opération

transitoires, pour les métiers déficitaires connaissant une forte concurrence avec le secteur civil, peuvent aussi être mises en œuvre57.

D - Une érosion du niveau opérationnel des armées en partie due au haut

• si les nombres d’heures de vol des pilotes d’avions et d’hélicoptères sont dans l’ensemble conformes aux prévisions, ils n’en restent pas moins la plupart du temps en-deçà des normes d’entraînement individuel, en particulier pour l’armée de terre et l’armée de l’air.

Par ailleurs, ces indicateurs portent sur un niveau d’activité final. Or, l’entraînement nécessite la rencontre de matériels disponibles, de militaires recrutés et formés, d’une doctrine d’emploi arrêtée et de soutiens suffisants. Des éléments plus qualitatifs issus de chaque armée, portant sur ces différentes dimensions, permettent de mieux caractériser l’érosion du niveau opérationnel des armées montrée par ces indicateurs d’activité (cf. D 2 et D 3) et d’en dégager l’origine. Il s’avère que si les opérations extérieures apportent un aguerrissement et un savoir-faire spécifique, le haut niveau d’engagement actuel, sur des théâtres dispersés et difficiles pour les matériels, contribue à pénaliser la préparation opérationnelle des forces, d’une part en ralentissant la maîtrise de savoir-faire non employés en opérations et d’autre part en mobilisant des équipements et des ressources humaines qui ne sont plus disponibles pour la préparation.

La poursuite de l’application de différents principes mis en œuvre depuis 2014 par les armées est nécessaire, afin de contourner les contraintes pesant sur la préparation et de préserver la pleine capacité opérationnelle des armées pour le futur : recentrage et différenciation de la préparation (adaptation au strict besoin opérationnel en termes de délais, de volumes et d’aptitudes requises), développement de la simulation et de la substitution par des équipements moins coûteux, mutualisation interarmées dans des domaines communs d’entraînement, voire externalisation (par exemple, location d’heures de vol d’hélicoptères pour les besoins de la préparation).

2 - Un effet conjugué des opérations extérieures et intérieures à l’origine du déficit de préparation dans l’armée de terre

Les modalités de préparation opérationnelle de l’armée de terre jusqu’en 2015 Le cycle opérationnel appliqué jusqu’en 2015 comportait cinq phases d’une durée de quatre à six mois chacune. La projection et la remise en condition succédaient à trois phases de préparation :

Ce cycle de préparation opérationnelle est en cours de refonte, afin de tenir compte de la pérennisation de l’engagement sur le théâtre national (OPINT Sentinelle) et, de façon transitoire, de l’accompagnement de la montée en puissance de l’effectif de l’armée de terre.

Source : Cour des comptes, EMA

Dans son analyse des indicateurs, l’EMAT souligne, dès 2012, que le « niveau de préparation opérationnelle tend à diminuer sur le plan qualitatif, en raison d’une disponibilité technique insuffisante (équipements majeurs, engins du génie, moyens SIC, etc.) ». En 2014, le nombre de journées de préparation opérationnelle (84 JPO) n’est pas très éloigné de la

Préparation décentralisée (dans les régiments) Acquisition et entretien de savoir-faire métiers de base

Préparation interarmes (dans les espaces et centres

d'entraînement) Collective pour les unités, en fonction de leurs engagements futurs et du budget disponible

Préparation spécifique ou mise en condition avant

projection Contenu en fonction des engagements, des types d'unités

et du niveau de maîtrise des savoir-faire métiers

norme (90 JPO), mais la diminution de la préparation générique a été compensée par un accroissement de la préparation spécifique des unités devant être engagées, ce qui entraîne une fragilisation de certains savoir-faire non employés dans les opérations.

2015 a ouvert une période de transition, qui durera tant que les effectifs de la force opérationnelle terrestre n’auront pas atteint 77 000 hommes (au moins jusqu’à la mi-2017).

L’opération intérieure Sentinelle, qui s’ajoute aux engagements extérieurs existants, pèse en effet sur la préparation opérationnelle, occasionnant « de multiples renoncements », selon l’armée de terre. Si la préparation décentralisée a été réalisée en 2015, la préparation interarmes, indispensable pour conduire des opérations d’une intensité telle que Serval, s’est trouvée « quasiment à l’arrêt ». 65 % des rotations en centres spécialisées ont, par exemple, été annulés, la quasi-totalité des rotations restantes étant consacrées aux mises en condition avant projection. L’armée de terre vit donc sur un capital opérationnel qu’elle peine à régénérer. Le délai de remontée en puissance pour atteindre un degré de préparation jugé satisfaisant pour conduire une nouvelle opération majeure58 est estimé par l’état-major de l’armée de terre à près d’un an.

3 -Une activité aérienne et des capacités d’entraînement réduites pour les pilotes La préparation opérationnelle dans l’armée de l’air

L’armée de l’air vérifie la préparation permanente de ses unités au travers de cinq grands domaines :

- les normes d’entraînement individuel ;

- le nombre d’équipages « aptes à la mission de guerre » : il s’agit d’une première qualification permettant d’accéder au qualificatif d’opérationnel, nécessaire pour être projeté en OPEX, qui s’acquiert à travers un certain nombre d’heures de vol ;

- le taux d’encadrement : le savoir-faire à un haut niveau tactique est détenu par les pilotes expérimentés en unités opérationnelles, qui concourent de ce fait à l’entraînement des jeunes équipages aux tactiques de combat évoluées ;

- les référentiels d’entraînement opérationnel : ils définissent des fréquences de participation à des exercices de très forte valeur ajoutée, qui permettent d’obtenir et d’entretenir certaines aptitudes (exemple : ravitaillement en vol, tir de munitions de guerre, etc.), reconnues par des labels ; - une courte préparation spécifique au théâtre de déploiement : mise en condition avant projection

pour des aptitudes individuelles au sol et missions aériennes.

Source : Cour des comptes, d’après état-major de l’armée de l’air

Selon le rapport annuel de performance du programme 178, les OPEX ont représenté en 2014 pour l’aviation de chasse 25 % de son activité, pour la flotte de transport 32 % et pour les avions de support opérationnel 40 %. Les résultats globaux présentés supra masquent des disparités entre types d’appareils et entre pilotes expérimentés et jeunes pilotes. L’armée de l’air est concernée au premier chef, mais les autres armées font face à des difficultés du même ordre.

58 La mise en condition avant projection ne pouvant, selon l’armée de terre, combler le déficit de préparation générique.

Pour l’armée de l’air, l’indisponibilité de certains appareils (ou de certains équipements sur les appareils), mobilisés en OPEX et y connaissant un vieillissement accéléré, implique des entraînements en métropole sur des appareils différents et un usage accru de la simulation.

Aucune nacelle de reconnaissance59 de nouvelle génération n’est par exemple disponible sur les avions en métropole. Pour les pilotes de l’armée de terre comme de la marine, le faible niveau de disponibilité des hélicoptères et de certains parcs critiques a contraint, de la même façon, la capacité d’entraînement des équipages. Dans le cas des ravitailleurs en vol, qui nécessitent une aptitude particulière, la mobilisation des appareils sur les théâtres ne permet plus d’assurer d’entraînement en métropole. La fragilisation actuelle de ce savoir-faire est sans précédent selon l’état-major de l’armée de l’air.

Les retours d’expérience des opérations Serval et Harmattan ont montré que la forte sollicitation des pilotes qualifiés pour les besoins des opérations a freiné la progression des pilotes non engagés, dont ils auraient dû encadrer l’entraînement. La phase de régénération des équipages s’allonge et la formation des plus jeunes entre en concurrence avec le maintien de certaines compétences complexes détenues par les équipages formés.

Enfin, la forte intensité des OPEX entraîne une allocation des heures de vol totales des pilotes, limitées par le temps et les appareils disponibles, au profit des OPEX et au détriment de l’entraînement. Or, paradoxalement, les heures de vol effectuées pour les OPEX en cours ne sont pas nécessairement aussi qualifiantes pour les pilotes de chasse que celles d’entraînement : une part de ces heures peut être consacrée à de longs trajets et toutes les fonctionnalités des appareils ne sont pas toujours mises à profit. La participation à une OPEX n’en nécessite pas moins une préparation spécifique, y compris sous la forme de missions aériennes destinées à appréhender un cadre particulier qui n’aurait pas été abordé dans l’entraînement normal (par exemple, travail en patrouilles mixtes, c’est-à-dire avec des avions différents).

II - Les fragilités et les lacunes du soutien des forces projetées en

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