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Une élaboration en réponse à des questions identitaires portée par une pluralité de mécanismes

Ch. 2 Des dispositifs élaborés et utilisés par des producteurs

MRERS/ FOREC

II- Une élaboration en réponse à des questions identitaires portée par une pluralité de mécanismes

MRERS/ FOREC O 1971-1976 : 1er RERS 1986 : 1ers inter-réseaux 16 mai 1987 : MRERS 1985 : Adoption de la charte - -

II- Une élaboration en réponse à des questions identitaires

portée par une pluralité de mécanismes

Les dispositifs de qualité de l’économie solidaire sont instaurés lors de l’extension du collectif dont ils relèvent et contribuent à la structuration de celui-ci. Les raisons invoquées pour justifier leur mise en place renvoient à la résolution de questions d’identité collective. Leur construction est portée par quelques individus particulièrement actifs, souvent en réaction à une action (plus ou moins volontaire) des pouvoirs publics. Le recours à la formation des membres des réseaux est fréquemment employé pour renforcer ou diffuser les dispositifs.

A-Répondre à des questions d’identité collective

La genèse du dispositif de qualité d'un mouvement d'économie solidaire ne peut s'expliquer sans recourir à la question de l'identité collective du mouvement dont il relève (association de commerce équitable, réseau des régies de quartier ou encore mouvement des RERS...). L'identité peut être définie comme « ce dans quoi se reconnaît un individu et ce dans quoi les autres le reconnaissent. Elle est à la fois affirmation d'une ressemblance entre les membres du groupe identitaire et d'une différence avec « les autres » » (Akoun, 1999).

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L'identité possède ainsi une dimension « pour soi » et une dimension « pour autrui ». Les raisons invoquées par les membres des réseaux étudiés pour justifier la création d'un dispositif font écho à cette définition. La première101 est la nécessité d'être reconnu par le public (identité pour autrui). La deuxième est de défendre l'identité existante en luttant contre des « dérives » (identité pour soi et pour autrui). Vient ensuite le souhait de définir collectivement « qui l'on est » (identité pour soi), puis celui de permettre à l'identité d'évoluer.

1) Être reconnu par le public

Un premier ensemble de justifications invoquées pour la création des dispositifs de qualité renvoie à la nécessité d'être reconnu par le public (usagers, consommateurs). Elle renvoie à la dimension de l'identité dirigée vers autrui. Ces motifs de création s’accordent avec les approches de sciences sociales envisageant les labels et logos comme destinés à orienter les consommateurs : l'économie considère que ces outils apportent des informations supplémentaires sur un bien ou service en situation d'information imparfaite, la sociologie les envisage comme prescripteurs d’une information, d’une technique ou encore d’une appréciation (Hatchuel, 1995).

Dans les cas de l'agriculture biologique et du commerce équitable, la nécessité de permettre aux consommateurs de distinguer les produits concernés des produits conventionnels est invoquée comme motif de création des labels et logos, comme l’indique ici Jacques, administrateur :

« Dans le contexte de l'époque, il fallait qu'il y ait un logo. Puisque pour reconnaître les produits, les choses, il fallait bien qu'il y a un logo.

-(DR) Vous parlez des consommateurs ?

-Oui. De reconnaître que ce produit est différent. » (Nature et Progrès, administrateur 2, SP)

La création du logo de commerce équitable Max Havelaar est de même liée à la revendication de petits producteurs de café du Mexique de pouvoir placer leurs produits dans les circuits de la grande distribution tout en les distinguant des produits conventionnels. C’est ce que souligne par exemple Jérôme :

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« L'appel des producteurs et des coopératives qui viennent, qui se déplacent au début c'est bien pour dire : ce n'est pas suffisant ce que font les boutiques102. (...) Ils disent : notre produit est un produit de qualité. Ce qui est une injustice c'est qu'on n'a pas le droit de le vendre partout à l'égal des grands exportateurs des plantations, c'est ça qui est la cause de l’injustice. On voudrait être présent partout et revendiquer, et avoir un signe de reconnaissance qui nous représente aux yeux des consommateurs. » (Max Havelaar, salarié 2, CPT)

N. Roozen et F. Van der Hoff se saisissent de cette revendication et imaginent en réponse la création d’un label :

« Pour que notre café soit distribué dans les supermarchés, je ne vois que deux solutions : ou nous lançons notre propre marque, ou nous aspirons à un label de qualité pour un café « éthique » ». Un label de qualité qui pourrait servir à différents distributeurs. » (Nico Roozen, in Roozen et Van der Hoff, 2002, p. 12)

La nécessité d'être reconnu par les consommateurs (et donc distingué des produits « conventionnels ») est principalement invoquée comme motif de mise en place d'un label ou logo. Cette justification est également formulée, bien que plus rarement, pour expliquer l'émergence des systèmes participatifs ne s'accompagnant d'aucun logo ou mention. Salarié de Minga, Martin énonce par exemple ce motif pour relater la création du système participatif :

« L’origine du projet [SP] est importante. De bien comprendre que c'était lié quand même à une problématique d'importateurs. Qui se posaient des questions de comment je peux évaluer, comment je peux montrer aussi aux boutiques, aux clients, bah.... que j'essaie de faire des choses un peu différentes, sur quels critères... » (Minga, Salarié 2, SP)

La reconnaissance par le public n’est cependant pas le seul élément avancé comme motif de création d’un dispositif de qualité.

2) Définir qui l'on est

Un deuxième motif invoqué par les enquêtés est celui de « définir qui l'on est », c’est-à-dire l'identité pour soi du mouvement. Une telle raison est le plus souvent évoquée pour l’écriture d’une charte, mais peut aussi, plus rarement, concerner les autres types de dispositifs. La rédaction d’une charte s’effectue souvent dans les premiers temps d’un collectif. C'est le cas des réseaux d’AMAP, du CNLRQ, du MRERS, comme de SEL’idaire,

102 Les boutiques spécialisées dans le commerce équitable, avant l'introduction des produits en grande distribution.

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ou du CNEI... Le dispositif présent lors de la structuration d’un mouvement peut parfois prendre la forme d’une certification (Finansol) ou d’un système participatif (Nature et Progrès). Dans le cas du MRERS (devenu FORESCO) par exemple, la charte est rédigée au moment où se rassemblent les différents RERS pour fonder un réseau national. C’est ce qu’indique notamment Thierry, salarié du réseau :

« La charte c’est en 87 quand ils ont décidé de créer le mouvement, il leur fallait un document de référence, au moins qui dise qui on est et ce qu’on fait. Et donc, plutôt que d’avoir un truc qui s’appelle « règlement... machin et tout »…on fait une charte. La première a été faite en 87, avec l’idée que ce soit quelque chose qui puisse être modifié régulièrement en fonction de l’évolution du projet aussi, et elle a été modifiée en 2000/2001. » (FORESCO, Salarié, charte)

Dans le cas des AMAP, une première version de la charte est proposée un an après la création du premier réseau régional en Provence. Le texte est soumis à quelques modifications puis adopté un an plus tard. Il semble accompagner la formation du mouvement, comme en témoigne Abdia, salariée :

[à propos de la création des AMAP en France] « En gros c'est la rencontre de paysans de la Conf' du Var et de gens d'ATTAC du Var, qui se sont rencontrés, qui parlaient tous d'alimentation d'agriculture, de production, qui se sont dits il faudrait peut-être essayer de faire quelque chose, ... (...) et voilà s'est inventé à ce moment là les AMAP....s'est écrite à ce moment-là la charte des AMAP entre quelques personnes qui ont monté un petit truc... » (AMAP-IdF, Salariée 1, SP)

Les membres associatifs qui ont contribué à la création d’un dispositif de qualité justifient sa mise en place par le besoin de « dire qui ils sont », développer une « identité » :

« Dans un premier temps, l'essentiel de l'action de FINANSOL est la mise en place de ce label et son attribution. (…) Naturellement ce label n'est pas attribué aux établissements financiers eux-mêmes mais aux produits particuliers dont ils assurent la gestion. Il s'agit, en fait, d'établir et de développer une même identité103 éthique et technique dans la collecte de ressources et dans l'usage qui en est fait. » (Vigier, 1998).

La création d’un dispositif des années après la structuration du collectif peut également correspondre au souci de redéfinir l’identité collective. Invoquant un tel besoin, l’association de promotion de l’agriculture biologique Nature et Progrès rédige une charte quarante ans après sa création, comme en témoigne Bruno, administrateur :

« La charte, c'est...issu d'un travail collectif, ça date de 2004... Déjà depuis très longtemps à Nature et Progrès il y avait cette démarche un peu de définir qu'est-ce que c'est la démarche de Nature et Progrès... Et en 2004 il y ait eu l'idée de dire, ben on va

103 Sauf indication contraire, les extraits d’entretiens sont mis en italiques par l’auteure de ces lignes, dans ce chapitre et les suivants.

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l’écrire, le mettre vraiment sur un document spécifique qui va être la charte. » (Nature et Progrès, administrateur 1, SP)

La perspective d'adopter un jour une certification avec label ou logo semble même envisagée par FORESCO comme dirigée avant tout vers le mouvement lui même (et non vers un public extérieur) pour conforter l'identité collective, « faire mouvement ». Thierry, salarié de FORESCO, l’évoque de la façon suivante :

« On a fait ce dépôt à l'INPI104 [du terme « réseau d'échanges réciproques des savoirs »], et ce n'est pas forcément d'une actualité urgente mais il y a toujours cette idée de… travailler autour de la labellisation est en tout cas d'aller creuser la question (…). En fait, ouais y en a qui rêvent un peu…comme une franchise là… avec un logo-type… Une charte graphique... (Rires) il y en a qui rêvent à ça ! Mais je pense que c'était aussi à un moment donné où il y avait un besoin de… de se reconnaître entre nous quoi. Et de voir qu'il y avait tellement de disparités aussi bien dans….et besoin de faire mouvement, de refaire mouvement quoi ! Et pour ça, on a besoin d'avoir des signes de reconnaissance communs quoi. » (FORESCO, salarié, charte seule)

Réflexion sur l'identité collective et création de dispositif de qualité vont de pair, même lorsque la justification de définir l’identité du mouvement n'est pas explicite. La création d'une nouvelle structure (un « SEL » par exemple), bien que faisant partie d'un mouvement global (« SEL'idaire ») doté d’une charte (la charte nationale, « Esprit du SEL ») peut s'accompagner de l'écriture d'un nouveau texte. Celui-ci correspond à l'identité propre de la structure locale, comme le précise ici Brigitte, adhérente :

« La charte Esprit du SEL, ce n'est pas notre charte. Il y a des SEL qui ne veulent pas la prendre, ils veulent se faire une charte personnalisée. Par exemple j'ai ramené la charte de [lieu], on leur a dit « il y a une charte qui existe déjà » ils ont dit « oui mais nous on veut la nôtre ». Ils veulent la leur. » (SEL'idaire, adhérente 1, charte seule)

Enfin, longtemps après l’organisation du mouvement, l'élaboration d'un dispositif de qualité supplémentaire tel qu'un système participatif (SP), s'accompagne d'une réflexion sur l'identité collective du mouvement. Vincent a été chargé de concevoir le système participatif des AMAP dans le cadre de son stage de fin d’étude :

« On travaille avec un groupe de travail [chargé d'élaborer le SP] aussi, qui était constitué pour l'occasion, qui est composé de deux producteurs, d'un certain nombre d'amapiens, il y a trois membres du réseau également (…) Par exemple la dernière fois on a travaillé en groupe sur une déclinaison de la charte, c'est-à-dire on voulait essayer de trouver un squelette qui puisse définir avec un certain nombre de critères, de sous critères, ce que c'est, ce que ça peut être l'AMAP. » (AMAP-IdF, stagiaire en charge du SP)

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Le groupe de travail chargé de mettre en place le système participatif a débuté sa mission par la mise à plat des critères définissant une AMAP. Le questionnement sur ce que recouvre une telle initiative resurgit régulièrement, au fil des réunions. A la septième, plus d’un an après le début du groupe de travail, les participants ressentent encore le besoin de préciser ce qu’est une AMAP et quel est son objectif (encadré 4).

Encadré 4 : « C’est quoi une AMAP ? »

Observation participante du groupe de travail sur le système participatif d’AMAP-IdF, 22 septembre 2011.

Le groupe de travail sur le système participatif du réseau AMAP-IdF en est à sa septième réunion depuis sa création. Sept personnes se rassemblent en fin de journée au siège de l’association, dans le centre de Paris : Manon, la coordinatrice actuelle (salariée), Abdia, l’ancienne coordinatrice restée active au sein du réseau, deux agriculteurs administrateurs (Olivier et Tony) et trois « amapiens », dont l’observatrice. Les participants arrivent successivement, avec plus ou moins de retard, durant une heure. Chacun a apporté de quoi constituer un rapide buffet ; ces réunions finissant souvent à plus de 22h. Des discussions s’amorcent pendant ce temps informel. Il est question ce soir des « abus ». Certains se plaignent du manque de participation des amapiens au réseau, d’autres (les agriculteurs présents, en particulier) fustigent les agriculteurs qui fonctionnent avec dix AMAP, ou qui refusent de montrer leurs comptes aux adhérents. La conséquence de ces pratiques, précise l’un, est que les amapiens « n’ont aucune idée de la réalité du métier ! ».

La réunion débute enfin. Au tableau blanc accroché sur un des murs de la salle a été rappelé l’objectif de la soirée : faire un outil d’enquête auprès des producteurs qui soit opérationnel. Des documents sont distribués : le questionnaire utilisé par la FADEAR105 pour son propre système d’évaluation des producteurs, celui construit par le réseau des AMAP Rhône-Alpes et enfin, la charte des AMAP présentée sous forme de fleur. Un nouveau sujet vient retarder la mise en œuvre du programme fixé pour ce soir : les participants discutent, comme à chaque réunion, du but du « Système Participatif de Garantie » (SPG). Un administrateur du réseau, également maraîcher, insiste : « Il ne faut surtout pas de notes ou quoi que ce soit, mais des questions ouvertes », « avec ça les gens se posent des questions qu’ils n’auraient pas pensé se poser, les amapiens en posent au producteur, et le producteur aux amapiens ». Une amapienne renchérit : « c’est une démarche collective de plein de gens qui veulent qu’il y ait des choses qui changent. Et ce questionnaire c’est pour que les gens se sentent concernés…». Manon saisit le questionnaire utilisé dans le réseau Rhône-Alpes : « ça c’est très descriptif, c’est plus un diagnostic, c’est pour un agriculteur qui rentre ». L’administrateur-maraîcher acquiesce : « ce n’est pas du tout ce qu’on veut faire ». Abdia abonde dans le même sens en soulignant que l’objectif du système participatif c’est « de créer le premier lien » entre l’agriculteur et les amapiens.

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Fédération des ADEAR, les Associations pour le développement de l’emploi agricole et rural, qui regroupent des paysan-e-s, pour majorité membres de la Confédération Paysanne, et d'autres acteurs du monde rural, dans un but de partage d’expérience et de savoir-faire.

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D’une discussion portant sur le rôle du dispositif, sa capacité à exclure ou au contraire à faire réfléchir, les participants dérivent vers un débat sur ce que sont les frontières d’une AMAP. Pour Olivier, maraîcher, « le SPG, c’est pas des règles et des machins, c’est deux ou trois grands principes et le SPG aide à comprendre comment les incarner sur ta ferme. Pour moi, tout est possible, en AMAP, mais si tout le monde est conscient de ce qu’il est en train de faire ». Pour Abdia, le SPG doit être « une mise en discussion », car aujourd’hui « on n’est peut-être pas encore capable de mettre les limites » d’une AMAP, mais on peut « mettre en discussion ». Ces propos font réagir une amapienne, préoccupée depuis le début de la soirée, par les « abus » : « On ne domine plus rien, il y a une inflation des pratiques, on se dit AMAP… Le concept existe déjà de faire des « paniers-choses » on va être récupéré !... par des gens qui ont beaucoup plus de moyens, qui vont trouver plus simple d’aller acheter un panier chez Carrefour. Des paniers faciles, sans problèmes. On est là parce qu’on défend une autre agriculture ! Y a plein de gens qui vont rentrer là dedans parce que c’est plus simple qu’une AMAP mal comprise ! ». Abdia confirme : « oui, mal comprise. Une AMAP ce n’est pas une agriculture respectueuse de l’environnement, c’est une agriculture qui fasse vivre un paysan ».

La réflexion sur les frontières d’un projet, sa définition et ses objectifs, comme dans le cas des AMAP, s’accompagne souvent d’un débat sur ce que représente une « dérive » de l’initiative initiale.

3) Lutter contre les dérives et les récupérations, défendre son identité

La nécessité de lutter contre des « dérives » ou des « récupérations » est également avancée comme motif de création d'un dispositif de qualité. La « dérive », telle que mentionnée par les enquêtés, renvoie au détournement du projet initial par des structures locales. Cela peut correspondre notamment à une situation où une structure utilise le nom de l'initiative (« régie de quartier », « SEL » ou « RERS » par exemple) sans en appliquer le fonctionnement conçu au départ par les fondateurs. Cette justification est invoquée pour les trois types de dispositifs (charte, certification, système participatif). La rédaction de la charte des SEL, décrite par J.-M. Servet, répond à une telle situation : « Pour éviter certaines dérives, une charte éthique des SEL a été proposée. » (Servet, 1999, p. 53). La crainte principale dans ce cas est celle de l’utilisation de l’initiative par des groupes sectaires, comme on l’a vu plus tôt. Les systèmes participatifs sont élaborés suite au même type de préoccupations, comme l’évoque Vincent :

« -(DR) Est-ce que tu sais pourquoi les AMAP ont choisi de faire des systèmes participatifs de garantie en plus de la charte ?

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-À mon avis (...), c'est le.... [fait] de constater simplement qu'il y avait un certain nombre de dérives au sein des AMAP, assez facilement identifiables, et de constater qu'il n'y avait pas d'outils vraiment pour le réseau, autres que la discussion, pas d'outils clairs, des bases théoriques qui permettent ça quoi. Qui permettent de faire un retour aux fondamentaux de ce que doit être une AMAP et de trouver un outil satisfaisant (...) pour permettre de gérer ces dérives-là. » (AMAP-IdF, stagiaire, SP)

De même, le « label » des régies de quartier est décrit comme une assurance contre le non respect du projet, comme l’exprime ici Christian :

« Si on a voulu faire un label c'est parce qu'on voulait que ça [le projet des régies à l’origine, qu’il vient d’expliquer] ce soit respecté. » (CNLRQ, adhérent 2, SP)

La volonté de protéger l'identité du projet s'accompagne parfois d'un dépôt du nom à l'INPI, en même temps qu’est rédigée la charte du mouvement. C’est le cas aussi bien pour les RERS que pour les régies de quartier, ou encore les AMAP comme en témoigne Abdia :

« Les personnes [à l'origine des AMAP] se sont dit « comment est-ce qu'on va essayer de structurer ça, de protéger aussi ça... » (...) c'est allé assez vite à partir de 2001, ils ont déposé le nom AMAP, à ce moment là à l'INPI. » (AMAP-IdF, salariée 1, SP)

La crainte d’une « récupération » peut être évoquée comme motif de mise en place d’un dispositif. Le terme renvoie à un dévoiement du projet d’un type particulier : non plus par de petites structures marginales ne respectant pas les règles originelles (il serait alors question de « dérives »), mais par de grosses structures ou institutions s’emparant du nom de l’initiative et du pouvoir de décision. Il s’agit en premier lieu de l’Etat, comme dans le cas des régies de quartier évoqué ici par Bénédicte :

« Arrive 90, Michel Rocard est ministre et Michel Rocard c'est le 1er Ministère de la Ville, (…) Michel Rocard dit, quatre cents quartiers difficiles déjà, à l'époque c'était quatre cents, on va faire quatre cents régies de quartier. Et à ce moment-là c'est