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Introduction de la problématique théorique

1. Une approche systémique pour favoriser l’organisation apprenante

1.1. Les éléments de la compétence

Bien que notre travail ne soit pas centré sur celle-ci, la notion de compétence est essentielle dans notre approche théorique. La compétence permet de définir la prescription scolaire et professionnelle au travers de la notion de maîtrise attendue. Cet élément fait partie du cadre et du langage institutionnel. Les éléments du socle commun en lien direct avec notre propos s’articulent autour de trois compétences. Celles-ci sont liées aux dimensions techniques du numérique, sociales et civiques et relatives à l’autonomie des élèves formés. La compétence peut être définie, selon le rappel de Raulin (2008, p. 50), comme la combinaison d’aptitudes, de connaissances et d’attitudes à mettre en œuvre de façon adaptée, dans des situations variées. La posture professionnelle des formateurs doit donc répondre à une commande institutionnelle qui se définit au travers d’un référentiel de compétences évoqué dans la première partie de ce travail. Dans une approche assez comparable nous retrouvons les travaux de Jonnaert :

« Une compétence se développe en situation et est le résultat du traitement achevé et socialement accepté de cette situation par une personne ou un collectif de personnes dans un contexte déterminé. » (Jonnaert, 2011b, p. 35)

La notion de compétence est présente dans de nombreux référentiels mais elle demeure une notion assez « floue » et très souvent liée au champ de la professionnalisation. Ce lien socio-historique observé, par Marcel (2009a) et Boutte (2008), se développe également de façon concomitante avec l’évolution des théories des organisations. Pour rappel, la place croissante occupée par la notion de compétence est liée aux changements industriels et économiques consécutifs des crises économiques des années 30 et des chocs pétroliers des années 70. Ces événements historiques majeurs ont consécutivement modifié l’approche de la qualification professionnelle ainsi que le développement des entreprises formatrices.

87 Dans les années 90, la notion d’entreprise qualifiante apparait et modifie de nouveau le cadre professionnel.

A partir de cette date, la notion de compétences dites « transversales » apparait. Les professionnels sont davantage mobiles au niveau des emplois et la dimension réflexive intègre l’activité. La formation par alternance se développe pour répondre au besoin de complémentarité entre savoirs scolaires et savoirs professionnels. Dès lors la compétence apparait comme un savoir agir conforme et intègre les composantes cognitives et relationnelles. Cette dimension collective qui devient une composante essentielle pour tout métier traduit la mise en œuvre d’un savoir professionnel lié au travail d’équipe (Wittorski, 1997). Cette dimension collective place l’entreprise comme un lieu d’apprentissage pour ses acteurs ainsi que pour elle-même. De là apparait l’émergence et le développement du concept d’organisations apprenantes depuis le début des années 2000. Ce type d’organisation apprenante favorise le développement de projets qui se trouvent placés au centre des dispositifs de management. Cette nouvelle approche propose une interrelation importante entre les savoir-faire disponibles et la dimension collective du métier. (Boutte, 2008, p. 15; 17). Le développement professionnel, voire la professionnalisation, sont connus comme l’articulation entre la formation initiale, l’activité professionnelle et la formation continue, avec pour objectif le développement de la maitrise de compétences professionnelles spécifiques. Un tel développement devrait, de nos jours, favoriser l’augmentation des composantes individuelles et collectives des compétences. Dans le champ des pratiques enseignantes, nous lierons la compétence à certaines dimensions de l’activité.

En raison de ces évolutions historiques, nous constatons la présence de la notion de compétence que nous tenons à différencier de l’expression d’usage questionnée par Bourbao (2008) d’ « enseignant compétent ». Actuellement, l’approche par compétences, présente dans le discours officiel, ne sollicite pas seulement les individus apprenants et formateurs mais également les organisations (locales) et leurs divers cadres.

Par exemple, les travaux de Strebelle, Depover et Noël (2002) s’intéressent à la notion de transfert de compétences au travers de diverses situations. Ce que nous apprenons sur la motivation des élèves et leur développement cognitif est significatif au travers de pratiques de décontextualisation, qui favorisent la stabilité cognitive, et la recontextualisation, qui permet de solliciter les élèves afin qu’ils trouvent des situations

88 permettant la remobilisation des compétences. Ce type de travail nous intéresse également pour le développement professionnel des enseignants au niveau de la pratique réflexive que chaque enseignant saura adopter comme outil pour enseigner. Apollon (2010, p. 152) s’intéresse à la notion de dépassement des ajustements du système lorsque celui-ci est bloqué. Il soulève l’implication dans les « différents bricolages » qui participe de l’invention de soi et, selon nous, du développement de certaines compétences. L’appropriation du contexte et l’engagement individuel et collectif dans la mise en place d’artéfacts imaginatifs ou de catachrèses, en détournant certains objets de leur fonction originelle permet d’envisager un nouvel usage. L’interrelation entre pratique individuelle et pratique collective peut s’observer au travers de la mutualisation des outils (Marcel, 2005, p. 59) . Cette démarche de transformation « à sa main » des outils numériques semble être un vecteur de développement professionnel dans une dimension réflexive et liée au numérique (Apollon, 2010, p. 157). D’autre part, ce type de transposition autour de la notion de compétences favorise le travail en équipe et l’expérimentation. Ces démarches professionnelles font progresser le travail d’auto-formation, permettent une forme d’auto-critique des enseignants engagés, ce qui génère une action positive afin d’éviter un réflexe de recentration sur la matière (discipline) (Strebelle et al., 2002, p. 4).

Selon Mallet (2008, p. 124), les technologies offrent de nouvelles opportunités quantitatives et qualitatives d’interaction entre les groupes sociaux qui sous-tendent des apprentissages formels et informels. Mallet rejoint en ce sens les travaux de Marcel (2009a) sur l’opportunité qui existe autour de nouvelles compétences individuelles et collectives en lien avec les pratiques numériques. La compétence collective se fonde sur les pratiques de coopération. Les quatre compétences du collectif que l’on retrouve dans les recherches sont :

Se donner des objectifs communs, partager des ressources et des responsabilités, assurer la coordination , suivre et réguler des actions et insérer des périodes de mise en commun, d’analyse et de réflexion (Blanc & Eymard, 2008, p. 47).

Cette approche se fonde d’une part sur les théories de développement de l’organisation qui considère dans un premier temps la compétence collective comme l’agrégation de compétences individuelles des acteurs, et d’autre part sur la mise en place d’une démarche de projet. La compétence collective semble difficile à définir et à observer dans un établissement, en revanche, le développement de compétence du

89 collectif apparait comme mieux adapté à la forme des établissements scolaires et à leurs organisations.